La musique et l’écriture ont été de tout temps les deux pôles de la vie créatrice de l'auteure. Ce site se veut donc un hommage à la musique (particulièrement classique) et à la littérature, mais aussi au théâtre et aux autres manifestations artistiques.
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samedi 29 septembre 2007
Brahms Intermezzo opus 118 no 2
Ma partition de l'intermezzo est l'une des plus annotées que je possède, en deux langues (avec l'italien noté par Brahms, ça fait trois...). Il y a les commentaires de mon professeur de l'époque, Harvey Wedeen (habitant toujours Philadelphie, qui enseignait à la même époque à Marc-André Hamelin), certains jetés d'un geste très large. Tout au haut de la page: « balance » (équilibre) et « tone projects » (le son projette). Il y a aussi les endroits encerclés, peut-être avec un brin d'énervement (« learn » à côté de la fausse note qui refait surface à chaque semaine!). Il y aussi mes annotations, qui permettaient de suivre le fil de la narration de cet intermezzo si particulier: « tendresse », « tristesse », « couleur différente », « intensité », « souvenir », « extase ». De revoir l'écriture de mon professeur m'a plongée quelques instants dans ces années d'apprentissage, où tout est possible. J'ai revu son immense studio, son regard alerte, j'ai entendu sa voix chantante, posée, la délicatesse avec laquelle il posait sa main sur le clavier. Comme quoi, parfois, la musique peut nous plonger dans un tout autre univers...
Cet intermezzo est l'un des plus denses, des plus intimes que Brahms ait composés, un condensé sublime de son écriture. La polyphonie y est particulièrement éblouissante, les phrasés le plus souvent absolument magiques mais il y a surtout une profonde émotion qui surgit à l'interprétation (et à l'écoute). Tous les pianistes que je connais qui jouent (ou ont joué) l'oeuvre y vouent une profonde affection, fait rare qui mérite d'être mentionné. Quand ils en parlent, c'est souvent avec le ton que l'on choisit pour partager un secret, presque avec un vague rougissement, comme s'ils venaient d'être surpris en train d'embrasser passionnément l'être aimé.
Pour moi aussi, il y a une vague sensation de partager un pan d'intimité quand je l'interprète. Même si je me sens moins dénudée que lorsque je joue le Rondo en la mineur de Mozart, il y a quelque chose de si étrangement organique dans l'oeuvre qu'il est très difficile de la transmettre sans s'y laisser engouffrer. J'y entends une histoire d'amour, avec ses deux voix distinctes, parfois franchement unies, parfois presque indépendantes. On l'entend particulièrement clairement selon moi juste avant la section en fa dièse majeur en accords (più lento) et juste après. Les deux voix se chevauchent, sont aussi essentielles à la compréhension du texte, du sous-texte, l'une que l'autre. Quand elles finissent par s'unir, c'en est à la fois déchirant et exaltant. Au passage, Brahms aura teinté l'histoire de mélancolie, les souvenirs du temps passé l'auront envahi, avant qu'il ne décide de plonger vers l'avant, le présent.
En faisant des recherches sur You Tube pour trouver une version qui me convenait le moindrement, j'ai été renversée par les différences des interprétations. On sent bien que chaque pianiste a cherché à s'approprier l'oeuvre, comme si elle était la sienne et uniquement la sienne. Si certains choix de tempi, certaines libertés me séduisent ici et là, aucune interprétation ne m'a entièrement convaincue de A à Z, fort probablement parce que j'ai chevillée au coeur l'oeuvre et que, moi aussi, je me la suis appropriée. Je vous propose ici la version de Lugansky, que je trouve personnellement un tantinet précipitée mais néanmoins pleine de poésie.
mardi 25 septembre 2007
Un autre disparu
mercredi 19 septembre 2007
Maria Callas, la sublime...
mardi 18 septembre 2007
Norman McLaren
Expérimentateur extraordinaire, Norman McLaren (1914-1987) reste un géant incontestable du cinéma d’animation canadien. Il fréquente d’abord l’École des beaux-arts de Glasgow en décoration. Très rapidement, il adhère à la Glasgow Film Society et découvre les chefs-d’œuvre d’Eisenstein, Poudovkine et Fishinger. Impatient de s’approprier le medium, il commence par peindre directement sur la pellicule dont il a auparavant gratté l’émulsion de façon à la rendre transparente. Dès 1935, deux de ses films remportent des prix au Scottish Amateur Film Festival. Impressionné par le talent du jeune cinéaste, John Grierson lui offre un emploi au General Post Office Film Unit de Londres. En 1936, McLaren couvre la guerre civile espagnole, expérience qui aura un profond impact sur les choix de carrière qu’il effectuera et la façon dont il traitera certains sujets cinématographiques (Hell Unlimited, par exemple). Quand il ressent les premières secousses de la Deuxième guerre mondiale, il émigre à New York. Deux ans plus tard, en 1941, Grierson, devenu premier commissaire du gouvernement à la cinématographie, l’invite à se joindre à l’Office national du film du Canada, organisme auquel son nom restera profondément associé.
Au cours de sa carrière, il signera 59 films qui misent avant tout sur la transmission de l’émotion plutôt que l’étalage de la technologie, malgré leur côté expérimental. Dans certains films, plutôt que d’utiliser la technique traditionnelle du dessin animé, il peint directement sur la pellicule ou la gratte (Love on the Wing ou Blinkity Blank, palme d’or à Cannes). Il superpose des personnages sur un décor (Love on the Wing) ou mélange animation et scènes d’action (Hell Unlimited). Il perfectionne également la technique de la pixilation. Dans Voisins, un chef-d’œuvre du genre, les acteurs sont filmés image par image, puis animés, créant une impression de continuité saisissante dans le mouvement. Fable cinématographique pacifiste qui lui a valu un Oscar, Voisins raconte l’histoire de deux hommes qui en viennent à tout détruire avant de s’entretuer pour la possession d’une fleur surgie sur la ligne mitoyenne de leurs terrains. (La version originale, jugée trop violente, a d’ailleurs été tronquée, pour que le film puisse être mis en compétition.) McLaren dira plus tard que si tous ses films devaient être brûlés sauf un, il choisirait de sauver Voisins.
Dans d’autres films, il dessine directement sur la piste sonore optique du film. Grâce à un astucieux système de repérage, il établit des correspondances entre les traits et des notes de musique, ce qui lui permet de réaliser des ondes sonores des plus complexes (À la pointe de la plume). Les implications de la méthode ont d’ailleurs suscité un intérêt considérable chez les compositeurs de musique électroacoustique, dont Maurice Blackburn (qui participera notamment à la création de Lignes verticales et Lignes horizontales).
La musique joue un rôle essentiel dans la grande majorité des films de McLaren, qu’il utilise des chansons folkloriques (Le Merle), des sonorités venues d’ailleurs (on peut entendre Ravi Shankar et Chatur Lal dans Il était une chaise et des flûtes de Pan sont entendues dans Pas de deux), des œuvres classiques (Glenn Gould interprète Bach dans Sphères) ou du jazz (Eldon Rathburn est mis en lumière dans Short and Suite et le Trio d’Oscar Peterson dans Begone Dull Care).
Les œuvres de McLaren reposent toutes sur un sens admirable du rythme, tant au niveau de la trame sonore que du flot narratif. Pour lui, le cinéma d’animation n’est pas tant le prolongement d’un art statique mais plutôt une expression artistique très proche de la danse, ce qui le pousse à utiliser et décomposer le mouvement dans presque tous ses films. Le cinéma le plus pur communique des pensées et des émotions par le mouvement. « Un film pour moi, c’est un peu comme une danse, a-t-il expliqué en entrevue. La chose la plus importante dans un film, c’est le mouvement. Peu importe ce que vous faites bouger, que ce soit des gens, des objets, des dessins, peu importe comment vous le faites, c’est toujours une sorte de danse. C’est comme ça que je vois le cinéma. »
Ici un dessin saisissant de McLaren, Sonata. Bonne découverte!
vendredi 14 septembre 2007
La recrue du mois
Nouveau blogue collectif qui sera lancé dès demain (je prends de l'avance puisque je serai en camp d'intégration avec mes jeunes du cours de culture générale tout le week-end), La Recrue du mois se dédie aux premiers romans d’auteurs d’ici. Chaque 15 du mois, vous y découvrirez un nouvel ouvrage (roman, récit ou recueil de nouvelles). Chaque rédactrice (dont moi) aura lu le livre du mois et vous fera part de ses commentaires. Dans la mesure du possible, nous essaierons également de vous présenter une entrevue avec l’auteur, éplucherons les journaux et autres carnets littéraires pour vous faire part de d’autres points de vue. Ce lieu se veut un lieu d’ouverture, de partage et, bien sûr, restera toujours ouvert à vos commentaires, vos coups de cœur. Mes commentaires se retrouveront également sur ce site. Alors, allez jeter un coup d'oeil. La recrue du mois s'appelle... (ben quoi? vous voudrez le découvrir!)
samedi 8 septembre 2007
Luciano le magnifique
À une époque où plus personne (sauf les spécialistes) ne peut nommer trois grands artistes de la scène classique, Pavarotti reste indélogeable. Tous les jeunes de la classe savaient qui était Pavarotti (le cours s'est donné le jour même du décès du ténor), même si je peux affirmer avec certitude qu'ils auraient tous été incapables de me chanter les premières notes du fameux « Nessun dorma » de Turandot (une autre version). Mon fils, plutôt porté sur le rock lourd (même s'il possède une certaine culture musicale, génétique oblige) s'est exclamé quand il a vu la nouvelle à la une de La Presse. Parlez à l'homme de la rue et l'évocation du nom suscitera aussitôt des commentaires élogieux et il vous parlera des Trois ténors. De nos jours, seuls les vedettes de la pop (et encore) ont droit à une telle déférence.
Quelques clips magnifiques, certains plus improbables mais tout simplement renversants. D'abord, bien sûr Luciano dans Una furtiva lagrima, dans Caruso, avec les Domingo et Carreras dans La donna e mobile, avec Bono dans Miserere mais aussi avec Barry White dans My first, my last, my everything et ce duo avec James Brown dans It's a Man's World.
Et si vous souhaitez prolonger le souvenir du grand homme en cuisine, je vous propose cette recette de linguini Pavarotti.
Rentrer dans la rentrée
Le contact avec les élèves (35) semble s'être bien établi. Ils semblent allumés et les 90 minutes sont passées très rapidement. J'ai même dû accélérer la cadence à la fin pour avoir le temps de finir le petit atelier que je leur avais proposé (extraire trois nouvelles qu'ils considéraient importantes et pourquoi). La nature du cours a été précisée: il s'agit en fait d'un croisement entre culture générale (incluant un suivi sérieux de l'actualité), initiation à la vie culturelle et journalisme. Il faudra donc que je me replonge dans les bases du métier (les 5 W, la pyramide inversée, comment mener une entrevue, les guides pour rédiger un texte critique qui se tient, l'éditorial, etc.). J'ai profité de la prise de présences en début de cours pour faire un tour de piste de leurs intérêts, en leur demandant quelle section d'un quotidien il voudrait se voir confier, dans un monde « idéal ». Évidemment, pas trop de surprises de la part de la grande majorité des garçons, qui souhaitaient s'occuper de la section des sports (pas exactement culturel, ça, mais je vais voir comment je peux réussir à intégrer les sports à la culture... à suivre!) ou, à la rigueur, de la chronique de jeux vidéos! Quelques agréables surprises dans le lot tout de même: un souhaitait créer les bandes dessinées (belle idée!), une a proposé de s'occuper des horoscopes (je me suis bien marrée!), l'autre a parlé de critiques de restos (la bouffe comme symbole de culture, c'est quand même plein de potentiel). Plusieurs sont prêt(e)s à s'occuper d'une chronique de type arts et spectacles (ça tombe bien, considérant que c'est surtout là-dessus que doit s'orienter le cours). Aucune n'a mentionné vouloir s'occuper de la chronique « mode » (on m'a fait remarquer cette omission qui ne m'avait pas frappée le soir au souper). Une jeune fille est même venue me voir après le cours pour me dire que, au fond, même si elle n'avait pas osé le dire devant les autres, ce qu'elle aimerait vraiment, c'est de s'occuper de la chronique de musique classique! Elle m'a dit qu'elle appréciait particulièrement l'opéra français, dont Lakmé! J'étais assez impressionnée, tout de même. Bref, je suis ravie d'avoir dit oui au projet. Je retrouverai les jeunes du programme dans un environnement autre lors d'un week-end intensif la semaine prochaine (croisement entre classe rouge, cours réguliers et sortie culturelle).
À travers tout ça, peu de temps pour écrire, pour lire (j'espère terminer aujourd'hui Les rescapés du Styx), pour toucher au piano (une semaine loin de lui, sauf pour démontrer des trucs aux élèves!). Période de transition nécessaire, je sais, mais qui me surprend toujours autant à chaque année... C'est quand le prochain congé? Mais non... je blague...(?)
lundi 3 septembre 2007
Verbier
Rentrée littéraire
Du côté français, rien ne semble assuré. Bien sûr, on peut compter sur les classiques: Nothomb, Philippe Claudel, Patrick Besson. Il faudra peut-être aussi jeter un coup d'oeil sur le dernier Darrieussecq (en dépit de la polémique de plagiat psychologique lancée il y a peu par Camille Laurens qui prétend que le sujet est trop proche d'un des siens!). Pas de raz-de-marée Les Bienveillantes prévu cette année (heureusement, finalement). La Presse y consacre un petit article ici mais pour se gaver, consultez plutôt le dossier sur Evene. On y retrouve tous les titres, des entrevues, des premiers chapitres à télécharger, la totale quoi! Je suis assez tentée par Qui se souvient de David Foenkinos? dans lequel Foenkinos s'attaque à l'image de l'écrivain en levant le voile sur les caprices de l'inspiration et du succès. Il y a aussi This is not a love song de Blondel (pourquoi diable un titre anglais? parce que le personnage se sauve de son ancienne vie à Londres), mais je les surveillerai du coin de l'oeil à la bibliothèque!
En attendant, je collectionne plutôt les formats poche. Suffisamment convaincue par Le secret d'Anna Enquist, un émouvant destin de pianiste classique qui ploie sous le poids des secrets (sa naissance, son frère, son approche pianistique, ses relations amoureuses), lu récemment à la suggestion de tidoigts (grand merci pour la suggestion!), je me suis procurée hier Le chef-d'oeuvre de la même auteure (l'histoire se passe cette fois dans le monde de l'art). Dans un tout autre registre, j'ai également craqué pour La révolte des accents d'Eric Orsenna, une lecture de type « familiale » (de 7 à 77 ans), qui fait suite au délicieux Les chevaliers du subjonctif que nous avions tous apprécié. J'en ai aussi profité pour passer commande pour Obermann de Senancour, livre qui avait inspiré Liszt dans sa « Vallée d'Obermann » (oeuvre que je travaille ces temps-ci). Dur, dur, les passages en librairie... heureusement que j'ai une carte privilège chez mon libraire préféré (la prochaine fois, j'aurai droit à un livre gratuit!).
samedi 1 septembre 2007
Nouveaux défis
J'aurais dû vous parler hier de la journée mondiale des blogues, vous expliquer pourquoi je bloguais (pour partager mes coups de coeur comme mes coups de gueule, mes penchants maladifs pour la musique et la littérature), vous citer cinq blogues que j'apprécie tout particulièrement (choix déchirant parce que j'en fréquente plus que ça et que certains jours, je me perds de façon quasi compulsive dans la blogosphère). Comme je me suis rendue compte de la chose en soirée, après avoir visité quelques blogues que je fréquente, le topo a été un peu loupé.
Il faut dire que la journée avait été déjà suffisamment fertile en émotions, certaines plutôt neutres voire un peu ennuyeuses (la rédaction d'un communiqué), d'autres passablement plus exhilarantes. En matinée, j'ai eu le plaisir de retrouver mon amie homonyme et son charmant bambin de sept mois (à croquer!). Elle arrivait les bras chargés de présents: un demi-gâteau au chocolat fondant et le deuxième livre de Robert Blake (l'un de ses amis proches), Kaya, dédicacé à mon intention en plus, touchante attention! J'ai dû la quitter un peu abruptement puisque j'avais une entrevue en tant que potentielle prof pour un cours de culture générale qui est offert aux élèves du programme DéfiMonde du Collège Sainte-Anne à Lachine. Je sais, je sais, mon horaire est déjà rempli jusqu'à l'éclatement, je n'ai absolument pas besoin d'y coincer quoi que ce soit d'autre mais le projet semblait trop intéressant, alors quand une amie m'a recommandée pour le poste, j'ai accepté de rencontrer les responsables. Il s'agit d'un cours qui se donne après les cours réguliers, une fois par deux semaines, et qui vise à ouvrir une classe de 3e secondaire (14-15 ans) à la vie culturelle. Sujets multiples à aborder, sorties enrichissantes, projets d'équipe, relative carte blanche si j'ai bien saisi. Comment refuser? Après une entrevue sur les chapeaux des roues, on m'annonce qu'on me rappellera mardi ou mercredi pour m'annoncer si ma candidature est retenue (j'ai même dû passer un test objectif de français en quittant!).
J'étais de retour à la maison depuis moins d'une heure que le téléphone sonnait pour m'annoncer que j'étais retenue, qu'ils ne rencontreraient même pas les autres candidats! Je l'avoue franchement, la nuit a été très courte, entre allergies saisonnières et ébullition du cerveau. J'ai toujours été incapable de débrancher mon cerveau et de le mettre dans un bocal comme Frankenstein quand je me couche (mais mon Dieu que j'aimerais ça à l'occasion!). Je pensais à des thématiques (musiques du monde, slam, impro, architecture, photo, théâtre, etc.), à des projets à réaliser, aux sorties à proposer, au MoMA de New York, à Broadway... Pas reposant, mais certainement très motivant...
Je l'avoue franchement: je suis (presque) incapable de dire non à un nouveau défi. Alors, vous avez des suggestions à mettre dans ma besace?