La musique et l’écriture ont été de tout temps les deux pôles de la vie créatrice de l'auteure. Ce site se veut donc un hommage à la musique (particulièrement classique) et à la littérature, mais aussi au théâtre et aux autres manifestations artistiques.
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mercredi 30 septembre 2009
Quêtes d'absolus
Parfois, sans qu'on s'y attende, un livre remarquable nous passe entre les mains. Rencontre exceptionnelle entre cinq grands artistes - le compositeur Pierre Boulez, le poète Yves Bonnefoy, la peintre québécoise Carol Bernier, la violoniste française Jeanne-Marie Conquer et la regrettée contralto Kathleen Ferrier -, Quêtes d'absolus comprend trois poèmes de Bonnefoy à sujet musical, Ut musica poesis (lus par le poète sur un des deux disques) mais aussi un texte sur les relations entre la poésie et la musique, les explications de Boulez au sujet de ses œuvres Anthèmes 1 et 2 (qu'on retrouve sur un même disque pour la première fois), tant écrites que sonores (rien de tel pour mieux décortiquer une œuvre contemporaine) et un essai complet sur les liens entre la musique et la poésie dans les oeuvres d'Yves Bonnefoy signé Jean-Jacques Nattiez.
Ce serait déjà beaucoup mais on y a aussi intégré des enregistrements d'œuvres évoquées par Bonnefoy dans son texte (dont un des lieder du Chant de la terre de Mahler chanté par Ferrier), des facsimilés des premières ébauches d'Anthèmes 1 et des reproductions de cinq tableaux de Carol Bernier, inspirés par Anthèmes 1 (ainsi que des extraits de son journal de création). Comment oser affirmer ensuite que l'art contemporain, sous toutes ses formes, est inaccessible (surtout à 30 $ pour un tel objet)?
La toile, Soufre, est de Carol Bernier.
Livre paru aux Éditions Simon Blais.
mardi 29 septembre 2009
Recommencer
Avoir fait 10 ans de piano il y a 30 ans peut être parfois ingrat. On se souvient que l'on savait alors jouer des pièces de niveau avancé mais elles ne reviennent que par bribes. Les réflexes de lecture, non exercés pendant une si longue période, semblent parfois déficients, rendant le travail sur une nouvelle pièce doublement ardu.
Surtout, il y a l'ego, presque impossible à mater quand on a dépassé la trentaine. Non, ce n'est pas que ces dames en aient un surdimensionné, ce serait en fait plutôt le contraire. Dans le lot, j'ai deux battantes, deux féministes de la première heure, ces pionnières qui ont complété un cursus universitaire au milieu d'un océan d'hommes, qui ont dû s'élever au-dessus de la masse avec volonté, qui ont atteint des sommets professionnels assez saisissants. Mais mettez-les face à un instrument de musique, un objet particulièrement ingrat s'il en est (même les professionnels vous le diront), et cela vous remet le caquet au plus bas en une croche pointée suivie d'une double.
Le plus difficile ici est le lâcher-prise, comme dans accepter que les sonorités produites ne seront pas celles que l'on conserve au creux de notre image mentale. Non, notre interprétation ne ressemblera pas à celle de Brendel. Oui, de jouer devant un professeur est terrifiant. (J'ai parfois l'impression d'être devenue une tortionnaire quand je les vois palpiter devant moi, avec une difficulté certaine à respirer correctement.) Oui, la mémoire est une faculté qui oublie. Oui, les doigts ne suivent plus aussi vite qu'on le souhaiterait.
De la part d'un prof, cela exige aussi un lâcher-prise, d'un autre type. J'essaie bien sûr de les réconforter, de leur faire comprendre que je n'ai pas d'attentes face à elles, que je n'ai pas un fouet caché dans ma poche arrière. Cela demande une bonne dose d'abnégation et de psychologie. Mais quand les planètes sont alignées et que, enfin, on joue pour le plaisir, toutes les barrières semblent tomber d'un seul coup (même si jamais longtemps) et là, on assiste à un instant de musique mais surtout de réelle communication: communion avec la musique, réconciliation avec celle d'avant, volonté consciente d'être entendu. Parce que, même si la musique est une activité qui se pratique dans l'intimité d'un studio de pratique, elle ne prend son sens véritable que lorsqu'elle est partagée.
samedi 26 septembre 2009
Adieu Alicia
vendredi 25 septembre 2009
Question osée du vendredi
En même temps, elle aurait peut-être bien été l'auteure qui se serait le moins offusquée de la question qui m'a été posée par des amis il y a quelques jours à peine et que je vous poserai ici. Dans un monde magique et idéal, vous pouvez passer une nuit avec un être polymorphe qui changera de personnalité (et d'apparence) quatre fois au cours d'une même soirée. Qui sera-t-il lors des préliminaires, de l'acte lui-même, des câlins qui suivront et de la conversation dite de l'oreiller (avec ou sans cigarette, selon l'époque et les lieux). Une difficulté supplémentaire ici: ces quatre personnes doivent être des personnalités, vivantes ou décédées (donc votre amoureux/se ne se qualifie pas). J'ai hésité longuement et ai même reformulé ma réponse trois fois. En toute impudeur, je vous livre ma réponse du moment. Après tout, l'amour, réel ou imaginé, est souvent une denrée fort volatile.
Je confierais donc les préliminaires à David Bowie (je n'ai possédé qu'un seul poster d'un chanteur rock dans toute mon existence...), me laisserait emporter par le jeune Ivo Pogorelich (celui avec des cheveux, qui jouait merveilleusement et avait un charme fou pour séduire les femmes, même quand il s'est habillé après son veuvage d'un tailleur féminin pour une séance de photos pour le magazine Piano), me blottirais contre Alessandro Barrico et parlerais jusqu'à l'épuisement avec Paul Auster.
Dans la « vraie » (hum!) vie et non sur l'oreiller, j'aimerais bien écouter David Bowie me parler de son périple jusqu'ici mais je serais sans doute fort intimidée (tout comme si j'interviewais n'importe lequel de ces quatre artistes). Mais, après tout, j'ai déjà interviewé Dieu lui-même (Brendel) et je suis encore ici pour en parler...
Et vous, des réponses à partager?
jeudi 24 septembre 2009
Les 100 livres préférés des Français
1 La Bible (tout le monde y a plongé à un moment ou l'autre... l'ai-je lue au complet? non...)
2 Les misérables de Victor Hugo (un classique, quand même... et j'ai vu Les Miz, plusieurs films, mes enfants suivaient la version en dessins animés...)
3 Le petit prince d’Antoine de Saint-Exupéry (absolument, certainement le livre que j'ai relu le plus souvent. Je me souviens avec émotion du disque avec Gérard Philippe, qui a bercé nombre d'heures de mon enfance.)
4 Germinal d’Emile Zola
5 Le seigneur des anneaux de J.R.R. Tolkien (et je n'ai pas vu les films non plus... oui, je sais, haro sur moi!)
6 Le rouge et le noir de Stendhal
7 Le grand Meaulnes d’Alain-Fournier (livre imposé en Secondaire V, mais qui reste dans ma mémoire comme un plaisir de lecture)
8 Vingt mille lieues sous les mers de Jules Verne
9 Jamais sans ma fille de Betty Mahmoody
10 Les trois mousquetaires d’Alexandre Dumas (j'ai vu nombre de versions filmées, est-ce que ça compte?)
11 La gloire de mon père de Marcel Pagnol
12 Le journal d’Anne Frank d’Anne Frank
13 La bicyclette bleue de Régine Deforges
14 La nuit des temps de René Barjavel (ah! ces fameuses pages plus « graphiques », qui nous avaient tant perturbées - positivement! - à l'adolescence!)
15 Les oiseaux se cachent pour mourir de Colleen Mc Cullough (j'ai une image très précise de la lecture de ce livre, à l'adolescence aussi, dans un autobus...)
16 Dix petits nègres d’Agatha Christie
17 Sans famille d’Hector Malot
18 Les albums de Tintin de Hergé (je ne suis pas très BD mais j'ai lu les Astérix, les Tintin, les Rubrique-à-Brac, certains Gaston Lagaffe, des Boule et Bill... bon, j'arrête!)
19 Autant en emporte le vent de Margaret Mitchell (j'en ai amorcé la lecture mais suis restée accrochée aux images du film)
20 L’assommoir d’Emile Zola
21 Jane Eyre de Charlotte Brontë
22 Dictionnaires Petit Robert, Larousse, etc.
23 Au nom de tous les miens de Martin Gray
24 Le comte de Monte-Cristo d’Alexandre Dumas
25 La cité de la joie de Dominique Lapierre
26 Le meilleur des mondes d’Aldous Huxley
27 La peste d’Albert Camus
28 Dune de Frank Herbert
29 L’herbe bleue Anonyme
30 L’étranger d’Albert Camus (dans mes « à lire absolument » par contre)
31 L’écume des jours de Boris Vian
32 Paroles de Jacques Prévert
33 L’alchimiste de Paulo Coelho (et plusieurs autres titres de l'auteur... puis je m'en suis lassée)
34 Les fables de Jean de La Fontaine
35 Le parfum de Patrick Süskind (quelle émotion de lecture! quelle maîtrise des descriptions d'odeurs!)
36 Les fleurs du mal de Charles Baudelaire (incontournable!)
37 Vipère au poing d’Hervé Bazin
38 Belle du seigneur d’Albert Cohen (beaucoup trop long mais une belle intensité tordue dans cette relation de couple)
39 Le lion de Joseph Kessel
40 Huis clos de Jean-Paul Sartre (et j'ai hâte de le revoir au théâtre en mars 2010... et le relirai peut-être d'ici là)
41 Candide de Voltaire
42 Antigone de Jean Anouilh
43 Les lettres de mon moulin d’Alphonse Daudet
44 Premier de cordée de Roger Frison-Roche
45 Si c’est un homme de Primo Levi (un autre sur ma liste de « must »)
46 Les malheurs de Sophie de la comtesse de Ségur (premiers émois de lectrice, absolument)
47 Le tour du monde en 80 jours de Jules Verne
48 Les fourmis de Bernard Werber
49 La condition humaine d’André Malraux
50 Les Rougon-Macquart d’Emile Zola
51 Les rois maudits de Maurice Druon (j'avais adoré la série par contre)
52 Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand
53 Les hauts de Hurlevent d’Emily Brontë
54 Madame Bovary de Gustave Flaubert
55 Les raisins de la colère de John Steinbeck
56 Le château de ma mère de Marcel Pagnol
57 Voyage au centre de la Terre de Jules Verne
58 La mère de Pearl Buck
59 Le pull-over rouge de Gilles Perrault
60 Mémoires de guerre de Charles de Gaulle
61 Des grives aux loups de Claude Michelet
62 Le fléau de Stephen King (j'en ai lu plusieurs, mais pas celui-là)
63 Nana d’Emile Zola
64 Les petites filles modèles de la comtesse de Ségur
65 Pour qui sonne le glas d’Ernest Hemingway
66 Cent ans de solitude de Gabriel García Márquez (un autre dans les « must », décidément!)
67 Oscar et la dame rose d’Eric-Emmanuel Schmitt (j'ai nettement préféré La part de l'autre toutefois)
68 Robinson Crusoé de Daniel Defoe
69 L’île mystérieuse de Jules Verne
70 La chartreuse de Parme de Stendhal
71 1984 de George Orwell
72 Croc-Blanc de Jack London
73 Regain de Jean Giono
74 Notre-Dame de Paris de Victor Hugo
75 Et si c’était vrai de Marc Levy
76 Voyage au bout de la nuit de Louis-Ferdinand Céline (le livre préféré d'un ami... il faudra bien que je cède et m'y colle)
77 Racines d’Alex Haley
78 Le père Goriot d’Honoré de Balzac
79 Au bonheur des dames d’Emile Zola
80 La terre d’Emile Zola
81 La nausée de Jean-Paul Sartre
82 Fondation d’Isaac Asimov
83 Le vieil homme et la mer d’Ernest Hemingway
84 Louisiane de Maurice Denuzière
85 Bonjour tristesse de Françoise Sagan (j'ai eu ma période Sagan et ai presque tout lu de la dame)
86 Le club des cinq d’Enid Blyton
87 Vent d’est, vent d’ouest de Pearl Buck
88 Le deuxième sexe de Simone de Beauvoir
89 Les cavaliers de Joseph Kessel
90 Jalna de Mazo de la Roche (des souvenirs flous de la série télévisée, tout au plus)
91 J’irai cracher sur vos tombes de Boris Vian
92 Bel-Ami de Guy de Maupassant
93 Un sac de billes de Joseph Joffo
94 Le pavillon des cancéreux d’Alexandre Soljenitsyne
95 Le désert des Tartares de Dino Buzzati
96 Les enfants de la terre de Jean M. Auel
97 La 25e heure de Virgil Gheorghiu
98 La case de l’oncle Tom de H. Beecher-Stowe
99 Les Thibault de Roger Martin du Gard
100 Le silence de la mer de Vercors
Hum... 36 sur 100, pas très glorieux j'imagine. Par contre, quelques titres dans ma PAL ou dans ma LAL. Je serais très intéressée de lire une liste « québécoise », par contre.
mardi 22 septembre 2009
Du film au livre au...
En revoyant le film, toutes ces lectures, ces nouvelles donnes, se sont ajoutées à l'expérience. Certes, je me suis encore une fois laissée toucher par le jeu des trois actrices, Nicole Kidman, Meryl Streep et Julianne Moore. Mais cette fois, ma lecture du film était autre. J'ai écouté la trame sonore avec l'oreille de celle qui en connaît les moindres subtilités. J'ai apprécié les multiples épaisseurs du personnage de Virginia Woolf. Je guettais certains jeux de caméra, certaines répliques. J'avais l'impression de retrouver un vieil ami mais de pouvoir saisir combien il avait changé, ce qui m'avait échappé jadis. Comme quoi, parfois, de relire (ou revoir) ajoute une toute nouvelle dimension à une oeuvre.
dimanche 20 septembre 2009
Encore dans les bouquineries
Les commentaires fusent d'une rangée à l'autre. Pêle-mêle, ça pouvait donner: « Tu l'as lu, celui-là, il me semble. C'était comment? » ou « Ont-ils des Angélique? » (trois des cinq ayant succombé à la folie initiée par Caro[line]) ou « Il faut que j'en parle à Lucie » (Karine qui vient de trouver la biographie de Chopin écrite par Liszt) ou « C'est mon livre préféré, que je relis chaque année » (Catherine au sujet de La route des petits matins de Jobidon). J'ai ainsi enfin compris (!) les raisons pour lesquelles un livre « ne compte pas », pouffé de rire quand une des cinq (dont je ne connais pas le surnom et dont je n'ose donc pas révéler le prénom) a téléphoné à son copain pour qu'il vérifie dans sa PAL si elle avait oui ou non tel tome d'une série.
Vous vous mourez sans doute de savoir ce que chacune a rapporté... c'est que... euh... je n'ai pas le droit d'en parler. Un pacte tacite, comme ça, vous comprendrez aisément. Les achats de chacune rentraient dans un seul sac, soyez rassurés. Il suffira d'écrire ici que je me suis acquittée assez brillamment de ma mission officielle, qui « justifiait » cette tournée: glisser des livres québécois dans mes valises pour mon prochain voyage à Paris en octobre. (Le poste d'ambassadeur québécois de la littérature est-il disponible?) Ah, oui, et j'ai quand même craqué pour quelques titres qui, comme par hasard, m'ont jeté des coups d'oeil aguicheurs. Dur, dur, de résister.
jeudi 17 septembre 2009
CATcerto
Le site officiel de CATcerto.
mardi 15 septembre 2009
La massothérapeute
Certains livres continuent de nous hanter ou de nous secouer pendant des semaines, voire des mois. D’autres sont dévorés en quelques heures, sourire aux lèvres, mais tombent assez rapidement dans le domaine sinon de l’oubli du moins du souvenir flou. C’est le cas de La massothérapeute, premier roman pourtant plutôt réussi de Maia Loinaz.
On y retrouve les ingrédients essentiels à tout roman de chick lit qui se respecte : une héroïne plutôt ordinaire qui manque de pot en amour, la présence d’un beau ténébreux, certains revirements cocasses de situations. Loinaz y intègre aussi des questionnements existentiels intéressants et une peinture décapante d’un milieu auquel bien peu de gens ont accès de l’intérieur (celui de la massothérapie et des thérapies alternatives). L’écriture, d’un niveau nettement supérieur à ce qu’on retrouve habituellement dans ce genre d’ouvrage, se révèle maîtrisée, les clins d’œil complices s’intégrant fort naturellement à la trame narrative. Les personnages sont savoureux, fortement typés mais somme toute assez prévisibles. Une chose reste certaine : on n’écoutera plus jamais ces insipides musiques nouvel âge d’une même oreille et, la prochaine fois qu’on s’abandonnera aux mains plus ou moins expertes d’un(e) massothérapeute, on saura que, bien sûr, quelqu’un qui au fond nous ressemble se cache derrière.
Ce qu'en ont pensé les autres collaborateurs de La Recrue...
lundi 14 septembre 2009
Lire...
vendredi 11 septembre 2009
Le joueur de triangle
Louis, jeune percussionniste qui a de la difficulté à se faire un nom, a l'impression de voir sa vie lui échapper. Célibataire depuis que Véronique l'a laissé six mois auparavant, locataire d'un appartement des plus exigus, incapable de gagner sa vie correctement, il voit sa vie basculer un soir, alors que l'attend sur son répondeur un message de l'Orchestre Symphonique. En effet, on lui offre un contrat qu'il n'espérait plus, pour jouer une seule note de triangle, lors de la création d'une œuvre du compositeur coréen Park In Won. Ce qui aurait pu s'avérer un jeu d'enfant devient bientôt un cauchemar pour Louis, dès qu'il évoque cette dite note, que ce soit chez lui, en répétition, ou dans les instants précédant le concert. Cherchant par tous les moyens à vaincre cette angoisse, il rencontrera d'autres protagonistes qui, l'un après l'autre, dévoileront un nouveau pan d'une histoire contrapuntique.
Nicolas Gilbert m'avait déjà séduite avec son premier roman Le récital, un regard à la fois tendre et caustique sur le monde de la musique contemporaine. S'il situe son deuxième opus encore une fois dans le monde de la musique classique et qu'il a conservé une multiplicité des points de vue pour faire avancer la narration, Gilbert démontre un affinement remarquable du médium. Alors que, dans Le récital, certains tics langagiers pouvaient incommoder et certains éléments architecturaux sembler légèrement plaqués, il n'en est rien ici. L'auteur privilégie une langue fluide, sans aspérités. Les références trop pointues qui pourraient échapper au lecteur moyen ont été gommées, mais le compositeur n'a pas résisté à intégrer juste assez de clins d'oeil pour que les spécialistes sourient (parfois jaune) en catimini.
La grande forme offre une stabilité à l'édifice mais s'efface derrière la vivacité de la narration. On s'attache aux personnages croisés par Louis, que ce soit le chef d'orchestre Pierre Delambre (un composite savoureux des archétypes rencontrés dans le milieu), la mystérieuse Justine (qui doit faire face à certains choix existentiels douloureux elle aussi), Serge Cardinal, chef de la section des percussions qui tente de colmater l'angoisse de Louis en lui faisant rencontrer Deléglise, percussionniste à la retraite (et sacré numéro) ou même le proprio de Louis (qui tient un salon de coiffure au rez-de-chaussée). On tourne les pages, avec plaisir, réalisant parfaitement que l'auteur tisse les fils d'une histoire dont le dénouement n'est peut-être pas celui que l'on attendait. On réalise surtout que, en quelques centaines de pages, l'auteur a su trouver sa voix.
jeudi 10 septembre 2009
Plaisir coupable
Des heures de plaisir (coupable?) en perspective...
Le trailer
Le look and feel du jeu
mercredi 9 septembre 2009
Éditions Lettres Vives
Alors qu'un vent puissant souffle sur la blogosphère, qui vise la dissémination des PAL de tout un chacun, je me suis sentie presque obligée d'y piger un peu plus profondément. Je reviendrai sous peu à ma lecture du deuxième roman de Nicolas Gilbert (qui se retrouvait au sommet de la dite PAL) pour me pencher quelques instants sur un tout petit livre, L'intouchable de Pierre Bettencourt, paru aux Éditions Lettres Vives, qui s'était glissé dans mon sac lors du Marché de la poésie 2008 de Paris.
Fondées en 1981 par deux passionnés, Claire Tiévant et Michel Camus, les Éditions Lettres Vives présentent essentiellement de la poésie et des récits. J'ai eu le grand plaisir d'échanger avec Claire Tiévant, qui m'a d'abord recommandé Le fantôme de Chopin de Thierry Martin-Scherrer (que je remonte illico dans ma PAL) mais aussi ce charmant livre de Bettencourt. Les livres sont réalisés de façon particulièrement soignée, à petite échelle (tirage de 2 000 dans le cas de L'intouchable) dans la tradition artisanale. (Oui, cela veut dire que, une fois de plus, j'ai dû couper les pages de mon livre avant de le lire.)
Aucun doute ici, le contact privilégié avec un éditeur, qui connaît intimement chacun des textes qu'il partage, fait toute une différence pour le lecteur. Chaque livre que j'ai pris dans mes mains, dont j'ai lu le quatrième de couverture, était comme celui d'un ami. Si j'hésitais une seconde, Claire Tiévant me précisait le parcours de l'auteur (une histoire incroyable dans le cas de Thierry Martin-Scherrer, à laquelle je reviendrai sans doute), les particularités du livre, pourquoi elle avait craqué à sa lecture. Surtout, j'ai compris comment il avait été essentiel d'avoir été sensible à la puissance d'un souffle mais surtout à la qualité de la langue.
Que dire alors de L'intouchable, une touchante lettre à cette aimée de l'auteure, qu'il adore mais qui restera malgré tout une amie, tirée à 133 exemplaires la première fois en 1953, sur les presses personnelles de l'auteur, également peintre, imprimeur et dramaturge? J'ai été soufflée par la luminosité de la langue justement, par la justesse avec laquelle Bettencourt évoque l'intouchable, que ce soit cette femme qui a toujours fait partie de sa vie (même s'il s'est éventuellement lui aussi marié avec une autre) ou le lien (lui aussi intouchable) qui les a unis et qui a vraisemblablement affiné son style littéraire. (Ce livre est le premier de l'auteur que j'aie lu.)
Mon oeil aurait-il été accroché par ce titre dans une librairie « normale »? Vraisemblablement pas... pour la simple raison qu'il ne se serait peut-être jamais retrouvé sur les présentoirs. Quand la diffusion de la littérature devient profession de foi, cela m'émeut. Fortement.
En complément, une entrevue avec Michel Camus, dont la vie a basculé jadis lors d'un séjour au Canada, à lire, dans Le matricule des anges.
dimanche 6 septembre 2009
Le travail de l'huître
J'avais hésité à sa sortie. Je me rappelle avoir été séduite par le personnage Barbe en tournée de promotion mais pas suffisamment pour souhaiter lire son livre sur le champ. Mais quand le livre a croisé ma route en bibliothèque il y a peu, je n'ai pas résisté. Que j'ai bien fait!
L'idée de départ du roman est inusitée. Andreï, révolutionnaire plus ou moins exalté, souhaite assassiner le tsar. Par un curieux concours de circonstances, il se blesse sur le coin d'une table et devient alors invisible. De fable politique, le livre bascule en quelques instants vers la fable humaniste et c'est là que réside sa plus grande force.
Andreï doit apprendre à vivre en marge, à aimer de loin, à ne plus s'immiscer dans une société qui ne sait plus rien de lui. Il voyage de par le monde, espère qu'une découverte scientifique justifie la troublante condition qui est la sienne. Il finit par se retirer entièrement de la société, ne fréquentant les hommes qu'en cas de totale nécessité. Un jour, une jeune femme croise sa route - ou plutôt la percute littéralement. Dans l'ombre, à distance, il deviendra son ange gardien, démontrera hors de tout doute son humanité.
L'écriture de Jean Barbe est recherchée et fluide à la fois. On ressent l'immensité des steppes, la morsure du froid, le dépaysement. Un souffle de tragédie russe, parfois brutale, traverse les pages, mais ce sont les petits gestes qui animent le propos. L'auteur traite son personnage sans complaisance mais avec une certaine tendresse. Surtout, il expose rapidement au lecteur les règles du jeu: ne questionnez pas tout de suite, suivez Andreï dans son périple. Ce dernier le mènera au bout d'une vie à nulle autre pareille. J'ai refermé le livre, totalement envoûtée... en me disant que je lirais assurément d'autres titres de l'auteur.
vendredi 4 septembre 2009
Tarmac
J'avais beaucoup aimé Nikolski, premier roman de Nicolas Dickner et l'avais même offert en cadeau à un ami français, curieux de connaître la littérature québécoise. Je fréquente aussi de façon régulière (si non assidue) son blogue sur Voir et apprécie le ton des chroniques, entre réflexion profonde et capture d'instants du quotidien.
Bien sûr, on peut établir certains parallèles entre Nikolski et Tarmac: les protagonistes sont jeunes et hors norme, une certaine présence du large imprègne le propos, la narration se veut fragmentée. Là encore, on fait face à une histoire atypique, qui s'amorce à la même époque (1989). Il serait pourtant inutilement réducteur de considérer l'un comme le prolongement de l'autre.
Avec un doigté remarquable, Dickner nous plonge en quelques pages à peine dans une histoire rocambolesque, dans laquelle Hope, en digne héritière des Randall, attend « la » révélation, celle de la fin du monde. Calculs, approximations, appel au hasard: tous les coups sont permis. Cerner la date la ronge, mais en même temps se révèle un moteur puissant de son affranchissement vers l'âge adulte, qui la mènera de la Nouvelle-Écosse à Rivière-du-loup à New York et Tokyo. Le ton reste caustique, légèrement décalé mais toujours profondément savoureux. On se surprend à plusieurs reprises à sourire en coin et parfois même à rire presque jaune, au souvenir de cette fièvre cataclysmique qui a habité la fin du précédent millénaire.
Depuis Nikolski, l'auteur a fait ses devoirs. Les fils qui paraissaient alors lâches ont été resserrés et on se sent porté, presque malgré soi, vers la conclusion du livre. On regrettera peut-être quelques vagues longueurs dans la partie japonaise du périple mais il serait tout à fait inutile de bouder son plaisir. Certes, les esprits trop rationnels devront laisser certains de leurs préjugés au vestiaire. Les autres apprécieront l'humour bien particulier, la maîtrise du récit et l'effervescence de cet univers unique.
mercredi 2 septembre 2009
Une expérience fascinante
World Science Festival 2009: Bobby McFerrin Demonstrates the Power of the Pentatonic Scale from World Science Festival on Vimeo.
mardi 1 septembre 2009
À CIBL ce soir...
Ce soir, on m'entendra dans un nouveau rôle, celui d'« invitée ». En effet, je me joins au tandem de la Schubertiade des temps modernes, Claudio à l'animation et Guillaume à l'improvisation piano, en tant que première invitée d'une nouvelle mouture de l'émission. Vous n'entendrez pas ma douce (!) voix en premier segment d'émission mais plutôt une silhouette musicale me représentant. En effet, à la demande de Claudio, qui souhaitait garder le suspense le plus longtemps possible sur mon identité (allez savoir pourquoi!), il a demandé à Guillaume d'offrir une improvisation qui permettrait d'esquisser certains traits de ma personnalité. Étranges émotions bien sûr de ma part à l'écoute de ce portrait qui se dessinait au gré de l'inspiration... et qui me ressemblait effectivement par plusieurs aspects. En deuxième et troisième partie d'émission, je lis deux textes, un sur l'automne et l'autre sur ma rencontre avec mon piano à queue, discute de musique classique et de Mozart en particulier avec Claudio. Guillaume commente en musique les divers propos, prolonge leur portée et nous permet de rebondir avec d'autres pistes de réflexion. Le dernier segment se veut beaucoup plus léger.
Je vous confie ici quelque chose. Je n'ai eu aucune difficulté à me glisser derrière le micro, à lire mes textes et à discuter musique. Par contre, quand j'ai dû répondre à des questions plus précises sur mon écriture de fiction, j'ai été un instant presque décontenancée. J'ai alors réalisé que, au final, la position d'intervieweur est certes plus confortable que celle d'interviewée! J'ai aussi eu une pensée pour cette amie qui, dans quelques semaines, aura à répondre à plusieurs questions, quand l'identité du lauréat du Prix Robert-Cliche 2009 sera connue...
Vous pouvez écouter l'émission en direct ici à partir de 23 h ce soir. Pour insomniaques québécois donc ou lève-tôt européens (de 5 h à 7 h mercredi matin). On m'a promis que l'émission serait déposée éventuellement sur Imeem pour pouvoir être entendue à une heure légèrement plus accessible.