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mardi 23 février 2010

Philharmonique de Rotterdam

Ce n'est pas tous les soirs qu'on peut entendre un autre orchestre que l'OSM ou l'OM dans la salle Wilfrid-Pelletier et j'étais donc plus qu'intéressée de découvrir comment la sonorité de l'Orchestre philharmonique de Rotterdam pourrait transporter autrement, même dans une salle à l'acoustique « imparfaite ».

Aucune note n'avait encore été jouée que la fébrilité était à son comble. Quand Yannick Nézet-Séguin s'est avancé en compagnie de la soliste de la soirée, Viktoria Mullova, la salle était déjà debout, heureuse de rendre un hommage senti à son « enfant chéri ». Si on respecte Kent Nagano et que les mélomanes lui donne du « maestro » à tour de bras, le directeur musical du Philharmonique de Rotterdam et de l'Orchestre métropolitain restera, peut-être bien toujours, « Yannick » ou même « le p'tit Yannick » si je me fie aux propos entendus dans les foyers à l'entracte, tant les habitués du Métropolitain semblent donner l'impression de connaître Yannick personnellement et suivent avec un intérêt sincère sa carrière. (Pour les intéressés, il vient de diriger le Philharmonique de Vienne dans le Requiem de Mozart.) Je pense que, au bout du compte, ce genre de complicité entre chef et public est peut-être l'élément qui mène le plus rapidement à la démystification et à l'appropriation de la musique classique.

Après une première partie peu mémorable - Mullova nous a servi un Brahms froid, désincarné, clinique et même pas parfait, dénué de tout vibrato -, la fête pouvait réellement commencer. Nous avons d'abord entendu une page pour orchestre de chambre du compositeur néerlandais Theo Verbey qui, à défaut d'être réellement originale - j'ai failli pouffer quand j'ai entendu ma voisine d'en arrière confier à son amie que c'était « vraiment très contemporain » - mettait en valeur les premières chaises. De présenter en début de deuxième partie une œuvre aux textures relativement dépouillées m'a paru assez astucieux, l'oreille semblant naturellement se tendre vers la virtuosité remarquable du Concerto pour orchestre de Bartok.

Toutes les sections de l'orchestre ont pu tour à tour briller, grâce aux astucieux jeux de couplages de Bartok qui, plutôt que de privilégier des effets scolastiques, creuse la personnalité des divers instruments pour en extraire un remarquable condensé. On peut saluer ici la richesse somptueuse de la section des altos (comment oser avancer une blague idiote sur ces instrumentistes après ça!), la précision de la section de percussions, les attaques remarquables des vents, l'humour sardonique des trombones dans la quatrième section, la justesse infaillible du piccolo solo (instrument faux s'il en est un). Autre élément remarquable: les échanges visuels entre les musiciens des différentes sections qui - ciel! - semblaient absolument ravis de jouer ensemble.

En rappel, un « Jardin féerique » (dernier mouvement de la suite de Ma Mère l'Oye de Ravel) tout en subtilité et en demi-teintes. J'ai encore des frissons en évoquant la façon dont l'ultime climax a été suspendu jusqu'à l'extrême limite par le chef pour se fondre ensuite dans un pianissimo à faire fondre le cœur des plus coriaces. Soupirs...

Le concert sera déposé sur Espace classique au Radio-Canada.ca/musique d'ici quelques jours pour écoute sur demande.

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