Marc-André Hamelin ouvrait la saison 2010-2011 de Pro Musica lundi soir avec un programme articulé et réfléchi, comme les grands pianistes du 20e siècle les proposaient, qui favorise une montée dramatique et exige une écoute attentive. En ouverture, le pianiste nous a offert de délicates et puissantes Variations en fa mineur de Haydn (œuvre beaucoup jouée il y a une vingtaine d'années, mais qui semble malheureusement avoir perdu sa cote de popularité). Des textures parfaitement définies, un travail exceptionnel dans le registre ppp à p de l'instrument et une compréhension évidente de la structure de l'œuvre ont su séduire un auditoire qui osait à peine bouger, visiblement porté par l'inspiration du pianiste. J'émettrai quelques réserves sur l'interprétation qui a suivi de la Sonate en la mineur de Mozart qui, pour moi, manquait un peu d'espace pour respirer, pour vivre, pour véritablement toucher. Certains rubatos m'ont laissée perplexe dans le développement du premier mouvement et j'aurais aimé un tempo un iota plus ample dans le deuxième qui aurait alors gagné en pertinence opératique. À l'écoute, il m'est paru évident que l'interprète préfère Haydn à Mozart, choix qui se défend, bien évidemment. Hamelin nous a ensuite offert un triptyque Venezia e Napoli de Liszt parfait, inspiré et cohérent, les particularités de chaque pièce magnifiant celles des autres.
La deuxième partie était entièrement consacrée à la monumentale Sonate de Liszt. Même s'il devait visiblement combattre un piano récalcitrant, qui semblait refuser de projeter toute nuance plus puissante qu'un forte, Marc-André Hamelin a usé d'une finesse touchant au sublime dans les sections lyriques et démontré encore une fois sa maîtrise de l'architecture dans le fugato. Que l'on connaisse un peu ou aime à la folie l'œuvre, on pouvait apprécier camaïeu de sonorités, dessin des voix intérieures et puissance du souffle. Une fois les dernières notes dissoutes, le public est resté suspendu, entièrement subjugué par ce qu'il venait d'entendre et ne s'est mis à applaudir qu'après avoir fait sienne cette interprétation, geste des plus rares à Montréal. Un récital qui réconcilie avec l'art du piano.
Dommage que j'aie manqué ce concert!
RépondreSupprimerOn peut respecter (et avec un peu d'effort comprendre) qu'un interprète préfère Haydn à Mozart, mais cette préférence ne devrait jamais ignorer l'amour, le respect et l'admiration réciproques qui unissait les deux hommes. À défaut de ne pouvoir s'élever à la pureté du chant mozartien, l'interprète devrait alors jouer les sonates de Mozart comme si Haydn était là, prêtant attentivement l'oreille devant l'éternité de la musique de son génial ami.
J'aime l'image...
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