Une semaine déjà depuis que j'ai entendu le Philharmonique de Berlin sous Simon Rattle. Qu'en reste-t-il? Tant de choses... partagées de vive voix, ici et là, avec des élèves, des amis, car, oui, ce concert demeure certainement l'un des moments les plus mémorables de ma vie musicale. Bien sûr, j'ai écouté l'orchestre des dizaines (sinon des centaines) de fois sur disque, ai été soufflée par l'excellence des prestations, mais il faut bien admettre que rien ne remplace le contact direct en salle, surtout quand celle-ci est la mythique Philharmonie.
Le positionnement de mon billet (section E à gauche, i.e. plus ou moins derrière les premiers violons, mais un niveau au-dessus) m'a permis de vivre l'expérience de l'intérieur, d'une certaine façon, un peu comme si Simon Rattle me dirigeait, moi. La lecture d'articles à son sujet ne transmet que maladroitement le charisme qu'il dégage au podium, mais aussi son réel plaisir d'être là, de disposer d’un tel instrument pour transmettre les subtilités du répertoire. Par moments, il bougeait à peine, se laissant plutôt porter par la musique, comme s'il était lui aussi émerveillé par la richesse des cordes, qui devenaient un seul instrument polyphonique dans l'Apollon Musagète de Stravinski, qui leur est dédié exclusivement. La battue est souple, souvent minimale et pourtant le plus minuscule geste donne une impulsion différente aux musiciens, comme si toute la section n'était qu'un quintette à cordes magnifié.
En deuxième partie, la Quatrième Symphonie de Mahler a permis d'apprécier la virtuosité et l'excellence de tous les pupitres. Je n'aurai jamais entendu un son de hautbois solo aussi parfaitement juste, moelleux, splendide, que ce que celui offert ce soir-là. La dimension nasillarde de l'instrument devenant entièrement occultée, on se laissait happer par la moindre inflexion du jeu. Il faut également souligner la présence remarquable de la clarinette solo et le jeu absolument irréprochable, ample et chaleureux, de Daishin Kashimoto, premier violon solo dans les deux œuvres présentées. Seul point moins exceptionnel de cette soirée: la soprano Christine Schäfer, qui a chanté un « Wir genießen die himmlischen Freuden » plutôt fade.
Indice qui confirmait que nous n'avions pas affaire au public montréalais type: le silence de quelques secondes, une fois la dernière note envolée, qu'a maintenu sans effort apparent Simon Rattle. Plutôt que de sauter immédiatement sur ses pieds, le public berlinois a pris le temps de clore la boucle, de laisser l'émotion se déposer, de refermer mentalement la partition, avant d'offrir une ovation méritée d'une quinzaine de minutes aux artistes.
Indice cette fois que nous avions affaire à des musiciens qui travaillent autrement: le plaisir évident qui se transmettait sur les visages tout au long du concert. On sentait une réelle écoute et il n'était pas rare qu'un sourire vienne marquer tel solo ou tel passage particulièrement prenant, un peu comme les jazzmen le font entre eux quand l'un ou l'autre tire une colombe de son chapeau. Plutôt que de faire lever les pupitres vedettes en les pointant du doigt, Simon Rattle s'est déplacé vers chaque musicien visé, pour lui serrer chaleureusement la main et n’a pas hésité à remettre son bouquet au Konzertmeister. Une fois les applaudissements dissipés, plusieurs musiciens ont fait de même avec leurs collègues. Une fierté bien compréhensible quand un travail est si parfaitement accompli.
Wow, c'est comme si j'y étais. Quel bel article!
RépondreSupprimerexact!!! c'est ce que je me disais aussi
RépondreSupprimerMais vous y étiez en pensée! :)
RépondreSupprimerVeinarde, j'en rêve, qui sait... Dimon Rattle, tu sais comme je suis fan. Et si je pouvais en plus le voir jouer...
RépondreSupprimerQuelle chanceuse ! :)
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