Pages

samedi 20 août 2011

Merci pour vos mots, M. Courtemanche

Je ne le connaissais pas du tout comme homme, mais respectais infiniment Gil Courtemanche comme journaliste et appréciais l'auteur, découvert avec son premier roman, Un dimanche à la piscine à Kigali. En apprenant la nouvelle de sa mort en lisant mon quotidien, j'ai été bousculée pourtant, comme si je venais de perdre non pas un ami ou un proche, mais une conscience.

Et puis, j'ai ouvert mon dossier « citations » et j'ai cherché quelques phrases de son Je ne veux pas mourir seul. Il aurait sans doute souhaité ici qu'on se taise et que ses mots parlent, une fois de plus, pour lui.

« On meurt tellement souvent durant le cours de la vie. Ce sont de petites morts que le vin, la musique ou le cul transforment en vies passagères, supportables. Peines d’amour, faillites d’ambitions, congédiements, déficits. Cela tue autant à trente qu’à quarante ans, quand on apprend la vie et l’amour sans savoir qu’on fréquente encore l’école. » (p.58)

« Quand on n’aime plus, les musiques perdent leur mystères et redeviennent musiques, seulement chansons ou symphonies, jamais émotions et rêves partagés. » (p. 60)

« La vie, l’écriture. Combien de fois m’a-t-on demandé pourquoi j’écrivais et combien de fois ma réponse franche a déçu. J’écrivais parce que c’était mon travail, comme d’autres réparent des robinets ou font sauter des cèpes. J’écrivais pour gagner ma vie et aussi, concession intellectuelle, parce que je croyais que j’avais certaines choses à exprimer. Mais cela, je tentais de le dire humblement et de ne pas y accorder une grande importance.
Maintenant, je sais. J’écris pour vivre encore. Quand j’écris, je vis un peu, je te parle, je discute avec toi, je te fais part de mes découvertes, de mes doutes, de mes regrets, de mes angoisses. Quand j’écris, j’entends ton souffle et aussi tes questions ou tes commentaires. Quand j’écris nous sommes ensemble car nous avons été réunis par des mots et des phrases qui formaient un livre dont nous avons parlé, une longue conversation qui s’est transformée en baiser. De baiser en étreinte en amour et en mariage. Puis les baisers que je gardais dans une escarcelle secrète comme un vieil avare de tendresse t’ont éloignée. Je ne peux plus te toucher qu’avec mes mots que tu liras certainement sans crainte d’être trop émue puisque je suis inscrit dans ta colonne des profits et pertes. » (p.111-112)

2 commentaires:

  1. Je ne veux pas mourir seul m'a vraiment touché, mais comme on pense que les bonnes gens sont parfois éternels, on est sous le choc lorsque la nouvelle tombe...

    RépondreSupprimer
  2. Et dire que la semaine dernière, chez les bouquinistes, je vantais justement un de ses livres à un ami français de passage. Il a hésité, ne l'a pas pris, ayant peur de trop alourdir ses bagages. Je viens de lui annoncer la nouvelle. Il sait maintenant qu'il « doit » lire ce livre. :)

    RépondreSupprimer