Le thème de la correspondance ne pouvait que m'interpeller. En effet, depuis l'école primaire, je demeure une épistolière convaincue (le facteur était mon héros, sans contredit) et ai abreuvé pendant des années les amis de missives sur papiers tous plus exotiques les uns que les autres et qui, aujourd'hui, m'entretiens par courriel avec quelques proches sur une base régulière sinon quotidienne et ce, même si je leur parle au téléphone ou les rencontre régulièrement. Je suis incapable de tenir un journal plus de trois jours de suite, peut-être parce je préfère de beaucoup l'échange et que, des mots de l'un surgissent ceux de l'autre, que le partage de pièces musicales, de citations tirées de livres aimés, de petits instants d'une vie dont on aime être témoin m'est infiniment précieux.
Dans À toi, deux écrivains s'apprivoisent. Ils se sont rencontrés à Monaco, ont senti tout de suite qu'une complicité pouvait se développer entre eux, et ont décidé de se connaître à travers ce qu'ils maîtrisent le mieux: les mots. Il y sera question de souvenirs d'enfance, de déracinement, d'amours perdues, de celles qu'on protège, de maternité assumée et de paternité à venir, de patries perdues, de terres d'accueil, d'écriture, du temps qui passe.
« Toi, je sais où est ta place : elle est avec les rondeurs des o des a, entre les roucoulements des r ou sur la pente des accents aigus et graves, parce que ta voix se révèle dans les murmures des espaces blancs et sous les accents circonflexes les jours de pluie. » (Kim, p. 65)
On plonge en quelques instants dans ces pages, happé par la vie qui bat, tout simplement, revenant sur quelques tournures de phrase habiles, laissant la douceur d'une émotion se prolonger encore un instant juste parce que, conscient que les deux complices n'ont pas tant partagé de façon impudique une correspondance qu'ils ont érigé une œuvre littéraire à part entière, qui se savoure par fragments, comme ces souvenirs que l'on accumule en secret, qui nous soutiennent dans les moments où tout chavire.
« Ce que j'aime dans notre correspondance, c'est cet étrange silence des messages, qui ressemble au faux silence des déserts. En ce moment précis, un magnétophone posé dans la chambre ne capterait rien d'autre que mes doigts sur les touches, un léger cliquetis, quand dans nos têtes résonnent les voix d'une conversation ininterrompue, les nuances et les modulations de nos gorges et le claquement des langues contre les palais, les exclamations et les rires, et les interrogations muettes. » (Pascal, p. 100)
J'ai découvert avec plaisir une nouvelle voix, celle de Pascal Janovjak (8 des 12 passages que j'ai recopiés dans mon fichier de citations sont de lui), plaisir que je prolongerai par la lecture de son roman. Vive les rencontres...
La photo est de Robert Skinner, Cyberpresse.
ça a l'air attirant, en effet!
RépondreSupprimerMerci pour cette généreuse analyse de ce bouquin.
RépondreSupprimerAdrienne: la sortie européenne est prévue pour novembre. :)
RépondreSupprimerLibraire philanthrope: ce fut un plaisir de partager! :)
Acheté aussi compulsivement la semaine passée mais je n'ai toujours pas le temps de le lire .. peut-être en octobre su je lâche mon vélo :)
RépondreSupprimerKikine: Après tout, j'avais lu ton exemplaire, c'est peut-être normal que nous ayons posé le même geste à la sortie du deuxième livre de l'auteure! :)
RépondreSupprimerTiens, moi aussi le facteur était mon héros! ;)) J'ai failli l'acheter au salon du livre de ma région mais j'ai plutôt pris le premier pour me le faire dédicacer par l'auteur ;) Je verrai si j'aime, déjà!
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