« Ne crois-tu pas que seuls, nous sommes condamnés à vivre du côté de la souffrance? » (p. 91) Secrets parfois murmurés, le plus souvent tus. Distance – distanciation – entre soi et l’autre, passé et présent, lieu de naissance et d’adoption, réalité et rêve. Qu’est-il réellement arrivé pour que la fusion entre Satô et Ayako devienne fission, que leur complémentarité se transforme en dédoublement? Comment la mère d’Ayako a-t-elle pu croire que l’ancien amoureux de sa fille servirait de catalyseur, alors qu’il ne cherche qu’un apaisement? Pourquoi a-t-elle besoin de se fondre dans la peau de cette sœur imaginaire, jour après jour, quand elle contemple son enfant inerte?
Les questions fusent dans ce premier roman de François Gilbert, à l’écriture parfaitement maîtrisée, d’une retenue asiatique, qui ne glisse jamais vers l’esthétisant. On y retrouve les chuchotements, les effleurements d’Ogawa, mais aussi le rapport au tragique de Mishima, qui s’infiltre presque insidieusement entre chaque tableau de ce récit fragmenté, fissuré, tronqué, truqué.
Le lecteur se tapit dans l’ombre des personnages, n’osant respirer trop profondément, histoire de ne pas échapper un seul des fils tissés avec minutie, jusqu’à être balayé par surprise par la violence – mais aussi l’évidence – de la conclusion. On referme le livre en se disant qu’une tout autre lecture se révèle alors, preuve du savoir-faire de l’auteur, qui a su s’effacer au profit de son texte, dans une confondante abnégation.
Les autres collaborateurs de La Recrue du mois ont beaucoup aimé aussi. Pour lire leurs points de vue...
Lali et toi êtes aussi enthousiastes l'une que l'autre sur ce roman à la très belle couverture !
RépondreSupprimerLes quatre collaborateurs de La Recrue qui ont lu le titre ont unanimement aimé. C'est rare!
RépondreSupprimerBon. C'est définitivement tentant ça. Surtout si tu cites Ogawa.
RépondreSupprimerSi tu aimes Ogawa, tu devrais en effet aimer... et complètement oublier que c'est un auteur québécois ;)
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