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jeudi 11 octobre 2012

Art et musique baroques

L'année dernière, lors de ma série de conférences pré-concert pour Arion, j'avais fait sauter les barrières entre commedia dell'arte et musique. Demain, samedi et dimanche, je poursuis mon opération rapprochement entre les formes artistiques et traiterai alors des liens entre peinture et musique baroques, parce que, malgré les apparences, musique et art – qu’on le décline en peinture, en sculpture ou même en architecture –  sont deux muses jumelles, qui refusent de s’encombrer des mots pour transmettre lieux réels, paysages rêvés, pages d’histoire, sensations, émotions... ou même l'indicible.

Bernardo Strozzi, Ératosthène enseignant à Alexandrie (MBAM)
Déjà, on ne peut ignorer un vocabulaire commun entre la musique et l'art, que l’on pense aux termes composition, style, tension, équilibre, forme, texture, mais surtout à celui de la couleur.

Dès le 16e siècle, Arcimboldo avait établi un système d'équivalences entre les notes de la gamme et les dégradés de couleurs, du noir au blanc. En 1740, le jésuite mathématicien Louis-Bertrand Castel a tenté de relier la gamme tempérée telle que nous la connaissons aujourd’hui au spectre chromatique, en utilisant comme points d'ancrage les couleurs primaires (rouge, jaune, bleu) et les notes de l’accord parfait. Isaac Newton et Goethe ont eux aussi travaillé sur le sujet. En 1895, le Britannique Wallace Rimington a même conçu un orgue à couleurs, dispositif constitué d'une boîte éclairée de l'intérieur et munie de trous recouverts de verre coloré, sans oublier le clavier de couleurs du compositeur Alexandre Scriabine, utilisé dans son Prométhée. Plusieurs compositeurs associaient aussi des couleurs aux tonalités. Ainsi, pour Beethoven, si mineur était associé à la couleur noire.

On peut aussi, aussi bien en musique qu’en peinture, parler de rythme, de mouvement. (Ce n'est sans doute pas un hasard que c'est ainsi que l'on nomme les subdivisions d'une même œuvre.) On peut même avancer que l’adhésion à une tonalité donnée (la majeur, majeur) peut trouver un écho en peinture, alors qu’une couleur dominante habite un tableau, qu’un travail de la lumière permet de créer une atmosphère définie, que le choix des dégradés permet à l’œil de rester dans une même émotion.

Comme les concerts, qui mettront en vedette Stefano Montanari (dont l'interprétation énergique des Quatre Saisons de Vivaldi m'avait éblouie il y a deux ans), se donnent Salle Bourgie, une salle faisant partie du Musée des beaux-arts de Montréal, j’ai songé qu’il serait naturel de m’appuyer sur les œuvres baroques italiennes de la collection permanente du musée pour mieux saisir les parallèles entre art et musique. Retrouvez-moi sur place si vous le désirez. Tous les détails techniques ici...

5 commentaires:

  1. Connais-tu "le Poème harmonique" ? Cet ensemble fait un travail très intéressant avec un metteur en scène - Benjamin Lazar. Leurs productions évoquent des tableaux...

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  2. Pour faire suite à mon commentaire précédent, je me souviens particulièrement d'une mise en scène extraordinaire de Benjamin Lazar, pour "il Sant'Alessio". Les différents tableaux m'ont rappelé ceux que j'ai vus dans des musées italiens, notamment à Sienne, dans un cadre assez sombre, avec un éclairage doré...

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  3. C'est intéressant ça, comme travail, mise en scène d’œuvres picturales. J'ai vu ça avec quelques ballets, mais c'est tout. Je vais voir ce que je peux trouver sur eux sur Internet.

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  4. Le lien vers il Sant'Alessio :
    http://www.youtube.com/watch?v=0h2379QFRWk&feature=related
    Ce n'est pas le Poème Harmonique mais William Christie (pas mal non plus :))

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  5. C'est très beau, en effet, visuellement bien sûr, mais aussi musicalement. Je ne connaissais pas du tout cet opéra. Merci!
    Un prolongement indirect aux tableaux de Georges de la Tour évoquées dans Combustio en plus. :)

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