« La littérature québécoise est à
mon avis encore à l’état de projet. C’est une littérature qui continue de se
faire parce qu’elle n’a pas encore donné ses plus beaux fruits. C’est une
littérature qui menace de se défaire à tout moment, parce que rien n’assure sa
pérennité. Il faut donc la lire, l’enseigner, la relire, la réfléchir. Sans
relâche. Il faut célébrer ses plus grands écrivains, nous édifier par leurs
œuvres. Il faut aussi y ajouter. La mener plus loin. Il faut la rendre, une
fois pour toutes, absolument indispensable. »
Voilà la place qu’occupe la
littérature québécoise dans la vie de lecteur de notre Recrue ce mois-ci,
Alexandre Mc Cabe, auteur de Chez la
reine, professeur de littérature à St-Augustin-de-Desmaures. En
signant ce premier opus, il interpelle son lecteur, presque de façon
subversive. On pense d’abord lire un hommage touchant d’un petit-fils à son
grand-père, mais au fil des pages, on se rend compte que l’auteur a usé d’un
subterfuge pour nous mener à une réflexion autre, que l’histoire que l’on
croyait personnelle, intime presque, a de fait une portée beaucoup plus grande.
La question de l’identité se
décline aussi, à d’autres niveaux, dans Saut-au-Galant
d’Isabelle Grégoire, La corbeille
d’Alice de Maude
Deschênes-Pradet, L’incédé, premier recueil de poésie de
Sarah Bernier et Peut-être jamais,
deuxième roman d’une ancienne recrue, Maxime Collins.
À première vue, Saut-au-Galant
ressemble à des tas d’autres petits villages québécois banals, en apparence
tranquilles – comme l’est Sainte-Beatrix de Chez
la reine d’ailleurs –, mais sous la surface, la réalité est autre… parce
que les « pure laine » côtoient des immigrants colombiens, qu’un
petit garçon de dix ans disparaît, que les secrets finissent par ronger les
deux clans. Au début de La corbeille
d’Alice, la narratrice rentre du Sénégal. Elle y a connu assurément un choc
culturel, mais surtout le grand amour, qui s’est terminé dans les déchirements.
Peut-elle apprendre à se redéfinir? Il a été lu avec intérêt par notre nouveau
collaborateur, Antoine Houlou-Garcia, installé à Paris, à qui je souhaite la
plus chaleureuse des bienvenues.
Peut-être jamais pourrait se décliner non pas tant
comme un roman d’apprentissage qu’un roman d’émancipation, le héros finissant
au fil des ans par se libérer du fantôme de son amoureux. L'incédé
quant à lui « déroule l'aventure de cette part indiscernable de soi où
l'on invente et renouvelle les formes de notre existence », explique
elle-même la poète. Dans un autre registre, tout en légèreté, la bande dessinée
de Bach, C’est pas facile d’être une
fille, décortique certains des – si
– petits travers de la femme moderne et la façon dont elle interagit
avec son entourage.
« Ce n’est pas tout d’écrire. Ce
n’est pas tout de raconter de belles histoires. Ce n’est pas tout de parler de
soi. Il faut savoir se situer. Se placer là où on doit être. Au péril de la
littérature, s’il le faut », nous rappelle Mc Cabe. Heureusement qu’il y a les livres!
Pour lire le numéro courant de La Recrue, c'est par ici...
Je me souviens d'avoir lu son récit lorsqu'il a gagné le prix Radio-Canada.
RépondreSupprimerCela se déroulait le jour du référendum de 1995. La question d'identité était déjà donc bien présente. C'était un texte très fort. Deux ans, plus tard je me souviens de l'atmosphère si particulière qu'il décrivait.
Je vais tout de suite commander son livre.
Merci Lucie !
Passe une belle journée.
Je pense qu'il te plaira, celui-là. On s'en reparle...
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