Un pyromane qui collectionne les pendaisons, un aristocrate russe
mythomane qui rêve de fonder une cité dans laquelle l’anarchie règnera en
maître, une jeune femme romantique qui traverse le pays à la recherche de
l’homme idéal, un faux prêtre qui sert de témoin, de mémoire. On lui a volé les
carnets sur lesquels ils notaient les destins, petits et grands, de tous ceux
croisés jusque-là. On lui a coupé les mains, mais certainement pas la parole.
En effet, ce sera grâce à sa voix (sans doute rocailleuse) et son imagination
(débordante) que les personnages de ce roman inusité s’incarneront, se
raconteront, évoqueront leur faim de célébrité, de richesse, de reconnaissance,
d’amour ou même de mort.
Le lecteur s’attachera vraisemblablement plus à certains personnages
qu’à d’autres. J’admets volontiers un faible pour Russian Bill. Pourtant
essentiel au récit - sans lui, ce dernier n’existerait pas -, mais se
maintenant délibérément à l’arrière-plan, le Révérend Aaron nous glisse parfois
entres les doigts. Peu importe. On plonge dans cette aventure touffue les yeux,
les oreilles et les narines ouverts. Les chapitres ramassés s’y enchaînent
comme autant de pièces d’un casse-tête, nous menant inexorablement vers l’avant
par quelque implacable effet domino.
Les phrases sont courtes, se dégainent
comme un revolver, laissent ici et là place à une savoureuse ironie. « En été,
c’était un endroit recherché pour sa fraîcheur. En hiver, il fallait une
volonté de fer pour s’y prélasser, même en gardant son manteau sur le dos. Pour
la première fois, on y discutait d’autres choses que de la fourberie des
Américains », par
exemple. L’écriture de Dominique Scali se révèle particulièrement alerte,
travaillée jusqu’à ce qu’à la disparition de toute trace de couture, dépouillée
de scorie. Du grand art.
On a très hâte de découvrir à quel
univers plus ou moins balisé Dominique Scali s’attaquera ensuite.
Pour lire les impressions des autres collaborateurs, c'est ici...
Bonjour Lucie
RépondreSupprimerJ'avais noté ce roman chez mon libraire. Tu confirmes.
Amicalement
Le Papou