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mardi 29 mars 2016

L'orangeraie: oui, mais...

L'orangeraie de Larry Tremblay est un livre qui hante bien après la dernière page tournée. Un conte qui ne se termine certes pas sur le traditionnel « ils vécurent heureux et eurent beaucoup d'enfants », mais qui donne l'impression d'avoir voyagé, autant ailleurs qu'en soi. En effet, on y raconte en termes volontiers flous un de ces conflits idéologiques (trop nombreux), sur une terre où brille le soleil et fleurit la haine de père en fils.

Il était presque naturel qu'on souhaite porter à la scène cette histoire de jumeaux identiques (chapeau côté casting!) dont un sera sacrifié, qui avait séduit la critique lors de sa parution. Et puis, quel meilleur adaptateur que son auteur, également dramaturge, romancier et poète, Larry Tremblay!

Photo: Gunther Gamper
On voudrait endosser unilatéralement la proposition, mais c'est malheureusement impossible. Si la scénographie épurée de Michel Gauthier et l'environnement sonore imaginatif de Philippe Brault transmettent à merveille cette histoire en demi-teintes et que la mise en scène de Claude Poissant déborde de trouvailles qui enchantent, il y a du sable dans l'engrenage du texte, en deux lieux et deux époques. Si, dans le confort de son salon, on peut choisir de faire une pause franche entre les deux segments, difficile de transmettre cette fractures entre l'hier et l'aujourd'hui. On ne se surprendra pas qu'un dramaturge ait souhaité faire l'apologie du théâtre. (Michel-Marc Bouchard a fait de même récemment avec sa Divine illusion.) Malgré tout, il y a quelque chose de plaqué dans cette deuxième section qui, à la lecture aussi, touchait moins que la première. Est-ce une question de ton? De forme? Aurait-on pu ici contourner le problème en transformant la deuxième section en ellipse, en intégrant une coupure franche entre les deux sections (difficile compte tenu du public souvent souvent adolescent du Théâtre Denise-Pelletier)?

Il faut néanmoins souligner le jeu irréprochable des jumeaux, Gabriel Cloutier-Tremblay et Sébastien, ces deux « gouttes d'eau » qui ne demandaient qu'à abreuver le désert. Daniel Parent dans le rôle du père, déchiré par le choix cornélien qu'il doit poser, Jean-Moïse Martin en seigneur de guerre et Ève Daigle dans la peau de la mère sont tout aussi convaincants. Difficile par contre de comprendre ce que Vincent-Guillaume Otis (qui envahit depuis quelques années le petit écran avec brio) a cherché à transmettre en professeur de théâtre.

N'empêche... Difficile de ne pas se sentir interpellé par cette histoire, éternellement contemporaine.

« Celui qui a le courage de s'élever embrasse d'un seul coup d’œil toute sa vie. Et aussi toute sa mort. »

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