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lundi 11 janvier 2010

Écrire le deuil

Après l'effervescence de Thomas s'en fout, j'ai abordé un univers complètement différent, avec deux auteurs qui, à première vue, n'ont rien en commun et qui, pourtant, ont intégré le deuil à leurs écrits: Vénus Khoury Ghata, née au Liban mais vivant en France depuis des années et Jean-François Beauchemin.

Khoury Ghata intègre à son roman La maison aux orties sa mère, son mari et son frère disparus, de façon si intime qu'on ne réussit plus à dissocier la part de vérité de la fiction. « Ce que j'appelle mes romans est écrit impulsivement comme on crie. Je couds tel un patchwork des morceaux de ma vie, fais de mes amis des personnages. Tant pis pour ceux qui se reconnaissent. Mon écriture ne va pas au-delà de ma peau et des maisons que j'ai habitées. » (p. 18) On plonge dans un univers où la frontière entre l'ici et l'au-delà n'est que symbolique, le passé rejoignant le présent, les morts dialoguant avec les vivants, dans un émouvant texte qui nous enveloppe comme un châle qu'on se transmettrait de génération en génération.

Dans Cette année s'envole ma jeunesse, Jean-François Beauchemin retrace avec beaucoup de sensibilité le deuil qu'il a dû faire de sa mère, au fil de quatre saisons qui le voit se transformer presque imperceptiblement sous nos yeux. Il évoque sa mère en gestes légers, en mouvements infimes, pour extraire la profondeur du lien qui les unit. Cela donne aussi place à de très belles pages sur l'écriture elle-même, traduites dans la langue si poétique qui reste la sienne.« On croit à tort que les artistes pansent leurs blessures avec leur œuvre. Mais le bel arc de la sculpture, la phrase touchante du livre, l’inoubliable note de la chanson, toutes ces empreintes laissées sur les sens ne sont jamais que d’autres larmes, d’autres cris et d’autres appels. » (p. 49)

Les hasards de la vie ont fait que, cette même semaine, j'ai dû assister à des funérailles. Comme quoi, parfois, la vie se veut prolongement de la fiction...

2 commentaires:

  1. De Venus Khoury Ghata il y a ce joli poème qui commence ainsi: "Qui a dit qu'il était mort / On a simplement clos les volets de ses paupières" et que j'ai mis sur mon blog là http://adrienne.skynetblogs.be/archive-week/2008-47 au moment où j'étais en deuil de mon père.
    Je crois qu'il y a des écrits qui font du bien ;-)
    Merci à vous

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  2. Merci Adrienne pour le partage de ce vers...
    C'était le premier livre de cette auteure que je lisais (un ami me l'a offert). J'y reviendrai sans aucun doute.

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