J'étais au concert de l'OSM hier soir, pour une soirée qui s'annonçait électrique puisque les Montréalais auraient enfin la possibilité d'un doublé découverte: le jeune chef français Ludovic Merlot et la nouvelle coqueluche asiatique Yuja Wang, peut-être bien la plus girlie des pianistes sur le circuit aujourd'hui, qui a bâti en partie sa carrière sur les remplacements au pied levé. Eh bien, hier, c'était elle qui se déclarait malade et était remplacé par Stewart Goodyear, dans le Concerto de Ravel prévu.
Je pourrais vous parler de l'étrange expérience d'entendre deux orchestres différents avant et après l'entracte. Ce n'est pas la première fois (ni la dernière) que cela arrive, malheureusement. En première partie, nous avons eu droit à un orchestre plutôt mou, en apparence incapable de jouer plus fort que mezzo forte, aux bois brouillons et aux percussions fades dans le concerto. (Le premier coup de fouet a même réussi à sonner étouffé, il faut le faire!) Le pianiste n'a pas vraiment su tirer son épingle du jeu et nous a offert une interprétation correcte mais qui n'avait rien de transcendant (ce qui n'a pas empêché la salle de se lever d'un seul bond, je cherche encore pourquoi).
Les musiciens avaient-ils tous été remplacés par des clones? Peut-être bien. En deuxième partie, nous avons eu droit à des couleurs somptueuses, des plans sonores détaillés, une énergie rythmique saisissante dans certains passages des Danses symphoniques de Rachmaninov et une Valse de Ravel comme l'OSM sait la faire. Je retiendrai donc ceci et oublierai cela.
La véritable histoire de ce concert est ailleurs pour moi. En effet, alors que je quittais deux amis pour rentrer sagement à la maison en métro en compagnie d'un élève/ami féru de répertoire symphonique, nous avons croisé un autre jeune mélomane, meilleur ami d'un autre de mes élèves/amis avancés. (Oui, le monde du classique est minuscule, ici comme ailleurs.) N'ayant qu'une réaction « épidermique » à la musique (il s'est remis récemment au piano et avale des vinyles d'époque goulûment depuis quelques mois) et non pas sur-analytique tendance blasée comme la mienne, j'étais curieuse d'entendre ce qu'il avait pensé du programme. Visiblement encore sous le choc du deuxième mouvement du Concerto de Ravel, il a avoué qu'il n'avait rien retenu du troisième mouvement, bouleversé par ce qu'il venait d'entendre. J'ai aimé qu'il ait cédé aussi entièrement à l'envoûtement, qu'il n'ait pas peur d'en parler, que visiblement il venait d'intégrer un nouveau must à sa liste de lectures musicales. À ma droite, l'autre hochait la tête, en connaisseur, en amoureux comblé, qui continue d'aimer l'œuvre quelques mois après l'avoir découverte (grâce à une suggestion de ma part, je l'admets). Après, on essaiera de me faire avaler que la musique classique est désuète...
Pour vous convaincre de la beauté du mouvement, Martha Argerich avec son ex Charles Dutoit qui dirige l'Orchestre national de France.
no. a dit...
RépondreSupprimeret il faut absolument lire les critiques paues ce matin dans La Presse et le Devoir. J'ai cru rêver! À croire que nous étions dans 2 salles différentes!
Le lien vers la critique du Devoir, autre
RépondreSupprimerhttp://www.ledevoir.com/culture/musique/286508/concerts-classiques-le-chef-qui-n-aime-pas-le-noir
Celle de La Presse
http://www.cyberpresse.ca/arts/musique/musique-classique/201004/07/01-4268094-osm-morlot-un-chef-ordonne.php
Comme quoi on ne réagit pas de la même manière...
Marie a dit...
RépondreSupprimerUn vrai choc pour moi aussi ce deuxième mouvement, lorsque je l'ai découvert et entendu pour la première fois en concert à 16 ans... Une émotion bouleversante dont je me souviens encore comme si c'était hier. C'était lors des concours de sortie en direction d'orchestre, au CNSM. Trois candidats, trois interprétations différentes mais toujours avec le même pianiste : Eric Lesage (qui a fait du chemin depuis !), qui avait le même âge que moi... Trois fois le Concerto de Ravel en direct, dans le même concert, le rêve !
Il y a des moments magiques comme ceux-là... :)
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