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vendredi 29 novembre 2013

Cheese: sourire pour ne pas pleurer?

À l’invitation de Katya Montaignac, Nicolas Cantin, reconnu pour ses chorégraphies minimalistes, rencontre Michèle Febvre, interprète majeure des années 1970 et 
Phjoto: Nicolas Cantin
1980, ayant prêté son corps à certains des plus grands. Deux générations, deux voix, mais pourtant une langue commune et un passé partagé, celui de l’immigration. Cantin choisit de révéler Febvre en paroles, en musique et en gestes (on pourrait parler ici d’antimouvement tellement ce dernier est contraint presque du début à la fin), en un instantané éloquent, qui se découvre doucement à travers une série de motifs, transmis par la voix ou le corps, trafiqués comme les autofictions, nous en apprenant autant sur le chorégraphe que sur son sujet comme tout portrait réussi.
« Est-ce que tu me fais confiance? » D’entrée de jeu, la question est posée par Febvre qui, pour la première fois de sa carrière, se sert de sa voix pour communiquer – avec beaucoup de justesse d’ailleurs. Elle peut aussi bien s’adresser au chorégraphe qu’à l’interprète ou au public, qui devra faire fi de certaines de ses attentes pour céder autrement au propos.
Pour lire le reste de ma critique, c'est ici...
Vous pouvez encore assister à ce laboratoire ce soir et demain à l'Usine C...

mercredi 27 novembre 2013

Tout foutre en l'air

Simon Lanctôt est un passionné, de littérature, de transmission, de voyages, d'ouverture à l'autre. Il enseigne au Collégial, avec tout ce que cela peut supposer de désagréments (les bâtons dans les roues du système, la préparation à l'inéluctable Épreuve uniforme de française du Ministère), mais aussi de satisfaction (les étudiants qui le revoient deux ans après et lui confient avoir relu un livre, des travaux bien présentés, le plaisir de pouvoir parler littérature avec des collègues...).

Je me suis entretenu avec lui avec très grand plaisir il y a quelque temps (à écouter en balado ici) de ses Carnets d'un jeune prof, dans lesquels pendant un an il parle de littérature, bien sûr, mais aussi de tout ce qui l'empêche de vraiment n'être qu'un élément de transmission.

En partage, quelques passages qui ont particulièrement résonné en moi...

« Enseigner, j'aime ça. C'est l'école qui me tue. » (p. 22) 
« Je suis abattu et triste. Dans la deuxième partie du cours de ce soir, j'ai parlé des Lumières si vite que ça ressemblait plus à une éclipse. » (p. 28) 
« La société québécoise part souvent en croisade pour défendre le français, mais elle le fait trop souvent contre le mauvais ennemi, contre l'anglais et les anglophones, au lieu de s'attaquer à l'ennemi intérieur, c'est-à-dire notre manière approximative de nous exprimer... » (p. 107)
« L'éducation, c'est le rapport d'un peuple aux événements qui l'ont fondé, aux œuvres qui l'ont raconté, aux théories dont il s'est construit, aux sciences, aux techniques, aux métiers qu'il s'est appropriés - après tout, on ne peut enseigner que ce qui existe déjà, donc ce qui appartient au passé. C'est en enseignant l'histoire de nos relations avec les Amérindiens et en apprenant leurs cultures qu'on va réussir à construire notre pays avec eux, pas en se concentrant sur le commerce triangulaire. » (p. 208)

lundi 25 novembre 2013

Othello

Photo: Andrée Lanthier
Ma relation avec Othello a d'abord été disons un peu difficile, pour ne pas dire forcée. Je débarquais dans une ville étrangère, étudiais dans une langue que je ne maîtrisais pas encore et devais lire la pièce de Shakespeare en vieil anglais (avec multiples notes de bas de page) et rédiger un essay sur je ne sais plus quel point en particulier. Je n'en gardais donc que des souvenirs disons mitigés. Pourtant, je n'ai pas hésité quand j'ai vu que le Centre Segal  en proposait une adaptation, surtout que celle-ci était faite par une femme, Alison Darcy,Othello faisant assurément partie de ces pièces 100 % testostérone du grand Will, avec ces guerriers qui s'affrontent par honneur et tuent parce que celui-ci a, croit-on, été bafoué, Othello étant en fait victime de la manipulation presque diabolique d'Iago.

Ce regard féminin prend tout son sens d'ailleurs dès que Desdémone (Amanda Lisman, pure mais pas idiote, profondément amoureuse de son Maure mais consciente des jeux de pouvoir qui se jouent) et Emilia, sa servante (Julie Tamiko Manning, particulièrement éloquente) entrent en scène. Dans les premières scènes, alors que le décor minimaliste est plongé dans un éclairage diffus, qui souhaite évoquer une Venise nocturne, alors que les hommes entrent - et se mettent - en scène, on peine un peu plus à entrer dans la chair d'un texte très dense (qui fait quand même deux heures et demie avec entracte), qui comprend une série de références plus ou moins dissimulées que l'amateur de théâtre doit extraire. Mieux vaut se préparer à l'avance en relisant quelques analyses sommaires de la pièce. Sean Arbuckle propose un Iago juste assez vil pour être profondément désagréable, teinté toutefois d'une fourberie qui le rend profondément humain. Andrew Moodie, son vis-à-vis, campe un Othello plus victime que conquérant, non dépourvu de certains tics, en demi-teintes plutôt qu'en couleurs franches, ce qui empêche parfois l'auditeur d'entrer pleinement dans l'action.

Si je n'ai pas compris pourquoi le lit de mort de Desdémone de Véronique Bertrand (conceptrice également des très beaux costumes) ruisselait (référence à Venise encore? L'action s'est alors déplacée à Chypre. Rappel du sang inutilement versé?), il faut admettre que ce morceau de tissu qui servait aussi bien de ciel de lit que de linceul après avoir été arme du crime, s'est révélé une brillante idée.

Me suis-je réconciliée avec Othello? Mais oui, bien sûr...

La pièce est présenté jusqu'au 1er décembre au Centre Segal.
On peut voir un extrait de la production mettant en lumière les cinq principaux personnages ici... 

vendredi 22 novembre 2013

Le tour du monde en 80 jours: voyager en première classe

Photo: Luc Lavergne
Le Théâtre Advienne que pourra nous avait offert une relecture concluante desAventures de Lagardère, mais cette fois, avec Le tour du monde en 80 jours, il présente un spectacle pour tous particulièrement réussi, rodé au quart de tour, qui ne laisse aucun instant de répit au spectateur, petit ou grand.

Photo: Luc Lavergne
Ces 90 minutes filent comme l’éclair, au fond comme ce voyage complètement fou entrepris en 1872 par Phileas Fogg, gentleman sans trop d’envergure, à la vie réglée à la seconde près, qui fait le pari insensé pour l’époque d’un tour du monde à vitesse grand V. Aidé de son fidèle serviteur Passepartout, qui a plus d’un tour dans son sac, il avale les kilomètres, de Londres à Suez à Bombay puis Calcutta, sauvant d’une mort certaine la princesse Aouda «parce qu’il a le temps», avant de mettre pied en Chine, au Japon, puis en Amérique, revenant bien sûr à la date dite à Londres, au grand dam de ses partenaires de whist.
Cinq acteurs incarnent les 36 personnages avec un plaisir évident. Pour lire le reste de ma critique, passez sur le site de Jeu...
La pièce est présentée à la Salle Fred-Barry jusqu'au 19 décembre.  

jeudi 21 novembre 2013

Viande à chien: péchés de capitaux

Usurier cupide, plus ou moins indifférent à la belle Donalda, Séraphin Poudrier a rapidement remplacé dans l’imaginaire québécois le personnage shakespearien de Shylock. Après de si nombreuses adaptations (radio, cinéma, bande dessinée, sans oublier le mythique téléroman), était-il encore possible de l’inscrire dans une certaine modernité, sans pour autant altérer sa nature profonde? Avec Viande à chien, Alexis Martin, Jonathan Gagnon et Frédéric Dubois ont cru pouvoir relever le défi, mais ne livrent malheureusement la marchandise qu’à moitié. Péché d’orgueil?
Photo: Gilbert Duclos
La structure narrative de la pièce suit d’assez près à celle d’Un homme et son péché. Séraphin, pantalon de sport et polo d’une beigitude totale (en chaussettes dans ses Birkenstock!) est devenu un courtier qui passe ses journées à suivre les cours de la bourse. Donalda, vaguement exaltée, tant par la littérature (impossible de voir de mon siège le titre du livre qu’elle lit et cite) que par l’annonce d’une tempête solaire, s’occupe comme elle peut en attendant; elle avale des capsules télévisuelles (qui arrachent quelques sourires) ou quelques gorgées de vin blanc, danse comme une adolescente frénétique, se languit. Elle s’anime à peine quand Alexis revient d’un reportage photo sur les Indiens Haïda. Bertine n’est plus la fille d’Alexis, mais la gouvernante philippine de Lamont, rédacteur en chef du magazine Affaires d’en-Haut, qui signera le pacte avec le diable en offrant des actions en gage.  
Vous pouvez lire le reste de ma critique sur le site de Jeu...
La pièce est présentée à l'Espace libre jusqu'au 7 décembre

mardi 19 novembre 2013

Tu é moi

Photo: Martine Doyon
Tu é moi, première pièce de l’acteur Marco Collin, originaire de la communauté innue de Mashteuiatsh, se décline en grande partie dans la violence: celle entre un ravisseur et sa victime, entre un vieux grincheux blanc qui vit de glanage et d’alcool et une grand-mère innue, entre la tradition et la soi-disant «modernité». Si la première convainc sans peine et que la dernière est sous-entendue par le propos général, on devra admettre que la deuxième se révèle esquissée à trop gros traits pour être entièrement convaincante. La mise en scène d’Yves Siou Durand se veut pourtant soignée, tirant adroitement profit de ce lieu si particulier, les Ateliers Jean-Brillant, délimitant des zones de jeux complémentaires élargies, adroitement sculptées par le travail d’éclairage de Thomas Godefroid.

Quand les spectateurs entrent dans la salle, ils découvrent un homme, yeux bandés, attaché à un calorifère (Charles Bender, déjà habité par son personnage). Troublante dichotomie entre les babillages de ceux qui s’installent et cet emprisonnement forcé, dont la raison échappe d’abord à la victime. Des horloges projetées de chaque côté, haut sur les murs, deviennent oracles d’un compte à rebours qui s’enclenche dès les premiers mots prononcés, avec des arrêts en 1996 (Commission royale sur les peuples autochtones) et 1978 (signature de la Convention du Nord-est québécois et rencontre au sommet à Québec entre le gouvernement et 40 chefs de bande). « Le temps, c’est maintenant! » 

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dimanche 17 novembre 2013

Edmonton

« Je vais vite, je ne prends pas le temps de vous dire, on n’arrête pas la masse en mouvement, dès qu’il y a mouvement, souvenez-vous, on met tout ça sur l’ordinateur, il faut y aller d’un seul geste, technique de la terre brûlée, ne rien laisser derrière, je… je… attendez… »  Guillaume Berwald joue le tout pour le tout avec Edmonton, misant aussi bien sur son expérience personnelle (il a, comme son héros, cédé un temps aux sirènes de l’argent en apparence facile dans une province en pleine expansion économique) que sur ses acquis littéraires. Ni tout à fait road novel à la Kerouac ni tout à fait tributaire de la vague d’autofiction ayant frappé la littérature québécoise ces dernières années, ce premier roman s’appréhende comme un objet littéraire aux contours quelquefois fuyants, dans lequel les deux solitudes ne sont pas nécessairement celles que l’on croit.
L’argent y joue un rôle essentiel, à la fois plaie et panacée, mais aussi le sens de la famille, Émil espérant peut-être mieux comprendre son frère en s’extrayant de l’existence morne qu’il croit être condamné à mener. Une version presque désincarnée de l’amour (qui ne rime pas ici avec toujours) est intégrée en filigrane, les fils tissés par les mots qu’Émil dédie à celle restée là-bas devenant de plus en plus fragiles au fil des semaines passées entre hommes, dans des conditions sordides, les chèques de paye servant le plus souvent à éponger des dettes de consommation.
Si l’écriture de Berwald se révèle d’une belle fluidité, travaillée sans devenir plaquée, il faut néanmoins accepter de se frotter à certaines aspérités, que ce soit l’intégration – nécessaire? – de segments en anglais ou l’instillation ici et là d’une impression de décrochage, le lecteur ne saisissant parfois qu’à moitié le sens de la quête initiatique du protagoniste principal. Peut-être faut-il simplement alors adopter un autre rythme de lecture, moins raisonné, comme lorsque les choses se précisent avec une clarté fulgurante au milieu d’un rêve qui semble pourtant nous échapper.« J’avais besoin d’atteindre ce niveau de fatigue extrême jusqu’à ne plus trouver la force de ne pas écrire. »  Malgré ces quelques réserves, on referme le livre suffisamment intrigué pour avoir envie de suivre Berwald, sur la route ou ailleurs, dans sa prochaine aventure littéraire.

samedi 16 novembre 2013

Clôture de l'amour: les mots comme scalpel

Comment dire à l'autre qu'après des années passées à ses côtés, alors qu'on avait cru rendre notre dernier souffle dans ses bras, qu'il nous étouffe? « Je suis prisonnier », balancera d'emblée Stan, metteur en scène, affirmation tempérée peu après par un « on aimait s'aimer » presque fataliste et une évocation toute en tendresse de ce qu'aurait pu être l'amour, qu'il balaiera du revers de la main en lui jetant au visage qu'il ne ressent plus de désir pour elle, qu'il pourrait en éprouver pour une autre. Pendant une heure, il analyse, dissèque, abusant de termes techniques, parle de « reparamétrage », de « paradigmes.». Pour Stan, l'amour, comme la vengeance, est un plat qui se mange froid. Pendant ce temps, Audrey encaisse, laisse ses mots la traverser, entre douleur et déni, confrontation et effondrement, bravade et larmes. Il a la main sur la poignée de porte, pense s'en tirer à bon compte. Il a déjà réquisitionné la chaise à broderie rose et un croquis. Sa vie sera ailleurs, point barre.
Mais, bien sûr, Audrey réplique, retourne ses arguments contre lui. « Qui parle comme ça? Qui pense comme ça? » Sous le tir nourri, le ton grande tragédienne (après tout, le personnage est une actrice), Stan s'effondre, se liquéfie sous nos yeux. Alors que lui parlait de « ce spectacle, notre spectacle », elle va bien plus loin en assénant un  « Tu tues notre langue commune. » À l'excès, elle répond par la nuance, dressant une touchante liste de ces moments de tendresse qui jalonnent une vie à deux, moment peut-être le plus déchirant de la pièce. Au « en garde » sous-entendu de l'homme, elle réplique par un « je garde ».
Le texte de Pascal Rambert a été travaillé au scalpel, les monologues juxtaposés devenant deux dialogues continus, dont l'un des deux intervenants ne peut réagir que par le corps. Maude Guérin tire mieux son épingle du jeu que Christian Bégin et démontre une fois de plus l'étendue de sa palette expressive. Lors du monologue de ce dernier, son corps crie ce qu'elle tait et on piaffe presque d'impatience qu'enfin, elle trouve les mots pour le remettre à sa place, raconter son côté de l'histoire. Quand elle parle, celui-ci semble disposer d'une palette physique passablement moins développée. Est-ce un choix conscient ici du metteur en scène Christian Vézina qui, même si le texte ne prend pas parti pour l'un ou l'autre, le fait indirectement? On pourra aussi questionner les légères latitudes prises avec le texte pour le « québéciser ». Avait-on absolument besoin d'ajouter ici et là quelques sacres pour mieux rejoindre le spectateur? S'il y a un sujet universel, auquel chacun pouvait apposer son vécu, douloureux ou non, c'est pourtant bien celui de la rupture amoureuse. 
« Quelle horreur, la fin de l'amour! » On ne peut que sortir ébranlé du théâtre, avec l'impression d'avoir traversé à découvert un véritable champ de bataille. Douloureux, mais nécessaire.
Jusqu'au 6 décembre au Théâtre de Quat'Sous. 

vendredi 15 novembre 2013

Rassemblement

À quelques jours de l’ouverture de la 36e édition du Salon du livre de Montréal, je ne peux que me réjouir du côté rassembleur de la littérature. Alors que mon preneur de son ajustait ses lectures de micro avant une entrevue avec Simon Lanctôt (diffusée le 19 novembre à 9 h 05 sur les ondes de CKCU-FM puis en baladodiffusion), auteur de Tout foutre en l’air, réflexions d’une rare pertinence sur les défis liés à la transmission de la littérature au collégial, sa copie annotée de Jacques le fataliste passait déjà de ses mains aux miennes, gestes ponctués d’un « Tu dois absolument lire ce passage! » et autres exclamations. Non seulement il m’a convaincue de lire le roman de Diderot, mais surtout il m’a rappelé combien la lecture, activité solitaire s’il en est une, peut mener en quelques instants au partage. Mais comment peut-on transmettre à un autre ce qui nous a happés dans une œuvre?
Notre Recrue ce mois-ci, Guillaume Berwald, auteur d’Edmonton, en lice pour la 13e édition du Grand prix littéraire Archambault, jugerait sans doute que je me pose beaucoup trop de questions. (Il aurait sans doute raison.) « Il me semble que si j’écris (et j’écris), l’écriture doit avoir une place dans ma vie et si je lui donne une place, ce doit bien être qu’elle m’apporte quelque chose, explique-t-il candidement dans ses réponses à notre questionnaire. C’est logique. Mais demander pourquoi et comment, vraiment, c’est manquer de pudeur. En amour, il ne faut jamais demander : pourquoi tu m’aimes. »
En écho à Edmonton, ce numéro regorge de propositions de lectures étonnantes. Je pense ici à Frères de David Clerson, lu en duo par Claudio Pinto et notre nouvelle collaboratrice, Marion van Staeyen, à qui je souhaite la plus chaleureuse des bienvenues, dans lequel les deux héros, un peu comme les jumeaux du Grand cahier, devront affronter blessures et peurs. Le muséum de Marie-Anne Legault se révèle un autre objet insolite, tout comme Avis de décès : les tribulations d’un croque-mort de Daniel Naud. Un autre récit, Boules d’ambiance et kalachnikovs: Chronique d’une journaliste au Congo de Nathalie Blaquière, nous invite à la découverte d’une Afrique qui n’a rien de romancée. Politique, errance et guerre se nichent également au cœur de Le mur mitoyen, deuxième roman d’une ancienne recrue, Catherine Leroux, « un incontournable de la rentrée, d’une très grande humanité » selon Marie-Jeanne Leduc.
Même si La Recrue, par nature, regarde vers l’avant, nous vous proposons aussi deux regards vers l’arrière, avec une entrevue avec Luc Mercure, qui publie ces jours-ci son sixième roman, La mezquita, mais revient avec une affection non feinte sur son premier, ainsi qu’une lecture de Bonheur d’occasion de Gabrielle Roy, publié en 1945, traduit depuis en une quinzaine de langues, première publication qui devait valoir à son auteure le prestigieux Prix Femina.
On se croise au Salon?
Pour lire le numéro courant de La Recrue...

mardi 12 novembre 2013

Cendrillon: une relecture brillante d'une histoire que l'on croyait connaître par coeur

Tout y est : la mère morte, le père mou, la belle-mère acariâtre, les sœurs égoïstes, la fée marraine un peu dépassée, le bal, le prince, un soulier, autant d’éléments qui s’articulent autour d’une adolescente, héroïne malgré elle. Pourtant, en articulant son propos autour du deuil et de la transmission de la parole, Joël Pommerat réussit avec brio à détourner les clichés, à retourner les attentes contre le spectateur, à instiller en lui une toute autre lecture du conte repris aussi bien par Perrault que les frères Grimm.
Trop jeune, Sandra perd sa mère. Sur son lit de mort, celle-ci lui a confié un souhait, mal décrypté. En effet, elle reste convaincue que la seule façon d'honorer son souvenir est de penser constamment à elle. Aucune chance de l’oublier d’ailleurs, sa montre tonitruant aux cinq minutes les premières notes d’Ah! vous dirais-je maman. Elle ressent le constant besoin de parler de l’absente, que ce soit à sa peut-être nouvelle belle-mère (la famille reconstituée l’est ici à l’essai) qui lui détaille la liste des corvées à accomplir ou aux filles de celle-ci, qui la surnommeront vite Cendrier. Quand elle finira par rencontrer le prince, lors d’une soirée plus transe que chic, elle n’y verra non pas une panacée à sa solitude et à son statut d’esclave ménagère (Cendrillon ayant choisi elle-même d’expier son deuil en multipliant les tâches ingrates), mais y reconnaîtra un double, l’adolescent ayant lui aussi perdu sa mère quand il avait cinq ans, même si son père lui a toujours dissimulé la vérité.

lundi 11 novembre 2013

Un Falstaff réjouissant

Vous fréquentez l’opéra pour les grands airs, les amours condamnées, les morts qui s’éternisent? Falstaff ne vous séduira sans doute pas. Vous aimez le théâtre, les mises en scène huilées au quart de tour, les distributions sans faiblesse? Courez voir le Falstaff présenté par l’Opéra de Montréal ces jours-ci.
Oleg Brujak et Marie-Nicole Lemieux
Photo: Yves Renaud
Dans ses comédies, Shakespeare reste un maître des rebondissements et l’adaptation qu’ont tirée Verdi et Boito des Joyeuses commères de Windsor et d’Henry IV magnifie cette force. D'entrée de jeu, on éprouve un certain mépris pour ce grotesque Falstaff, à la panse plus que remplie, fêtard notoire, persuadé de disposer encore de tous les atouts nécessaires pour séduire deux belles du village en même temps, Alice Ford et Meg Page. Avec arrogance, il leur envoie une même lettre, sans se douter qu’elles se confieront l’une à l’autre et qu’il deviendra bientôt le dindon de la farce – et deux fois plutôt qu’une – et se retrouvera littéralement le bec à l’eau.
Si Oleg Brujak campe un Falstaff efficace, à la voix puissante, fat sans être entièrement sot, il faut admettre que Marie-Nicole Lemieux en Ms. Quickly l’éclipse sans peine dans cette scène où elle joue les entremetteuses  jusque  dans son lit!  en tant qu'ambassadrice des deux dames enamourées. Elle a joué le rôle sur les grandes scènes internationales et son expérience est apparente dès le moment où elle met le pied sur la scène, son panier sous le bras. Il aurait été très facile ici de sur-jouer le rôle, mais elle n’en fait rien, misant sur un humour ironique, sardonique, plutôt que sur la bouffonnerie.  
Aline Kutan se révèle impeccable en Nannetta, la fille des Ford, et Antonio Figueroa un complice idéal dans le rôle de son amoureux. Gianna Corbisiero et Lauren Segal convainquent aussi dans les rôles d’Alice et Meg. Dans les rôles de soutien, Jean-Michel Richer en Bardolfo démontre un réel don d’acteur et n’hésite pas à privilégier un jeu physique.
La mise en scène de David Gately est rodée au quart de tour et il réussit à tirer une belle cohérence des numéros d’ensemble. Soulignons la maîtrise avec laquelle il découpe l’espace scénique, se servant notamment habilement des paravents, qu’ils soient réels (deuxième acte) ou suggérés (premier acte, ce qui permet un tableau d’ombres chinoises derrière les draps accrochés à la corde). Sous la direction subtile de Daniele Callegari, l’Orchestre métropolitain réalise un sans-faute.
Une soirée bonbon, qui ne laisse aucun arrière-goût de succédané en bouche.

samedi 9 novembre 2013

Montréal la belle

Photo: Lucie Renaud
« Longtemps, la ville avait eu cette couleur, la couleur aimée de son arrivée, celle qu'elle avait imaginée et espérée. Puis, avec le premier soleil, les terrasses avaient surgi comme si on avait brusquement levé un rideau, et les rues étaient devenues jaune pâle.C'était une couleur frileuse encore, transparente et nue. Elle avait pris de l'épaisseur quand l'été s'était installé, et elle était devenue plus riche et plus dense et, plus tard, Julia l'avait vu éclater comme un fruit mûr. Montréal était brune les soirs d'orage. Elle était nacrée quand les arbres dégoulinaient de pluie, et ses nuits étaient alors vertes et profondes. » 
Françoise de Luca, Vingt-quatre mille baisers

vendredi 8 novembre 2013

Le sol ralentit sous mes pas

J'ai développé au cours de la dernière année un goût accru pour la poésie. Son oralité me rejoint plus directement, prolongement de la parole théâtrale peut-être, de la musique surtout. Ai-je enfin accepté son côté inéluctable, le fait qu'au fond, sans elle, la vie manque de relief, de sens? Certains livres nous attendent, plus ou moins patiemment. C'est ce qui est arrivé avec le magnifique dernier recueil de Carole Forget, Le sol ralentit sous mes pas, déambulations au musée et au cœur de soi, regards sur les toiles autant que sur les gens que la poète croise, les œuvres évoquées devenant autant de jalons de vie qui lui - nous - permettent de prendre le pouls de son évolution.
« on a parfois le trait si chétif / devant tous on se dessine / sans emblème / petit sillon mauve / à la dérive » (p. 27, 9e visite)
Une rencontre qui se concrétise trop tôt ou trop tard passera souvent inaperçue. Suffisamment intriguée par la très belle critique qu'en avait fait Le Devoir, je l'avais illico réservé à la Grande Bibliothèque. Une fois récupéré, l'exemplaire relié a attendu quelques jours sur mon étagère de chevet, celle qui accueille les emprunts, et puis un soir, au retour d'une sortie au théâtre, je l'ai ouvert, me disant que je lirais tout au plus quelques pages avant de m'endormir. Rien ne m'avait préparée au choc ressenti. Après avoir parcouru dans ma tête trois ou quatre visites, articulations subtiles du recueil, j'ai ressenti la nécessité de lire les suivantes à voix haute.
« un homme me salue / du haut d’une balustrade / nous nous bouleversons / penchés / l’un dans l’intervalle / de l’autre » (p. 45, 18e visite)
Au fur et à mesure, j'ai marqué plusieurs des pages, propulsée par l'envie de saisir l'instant sur mon petit enregistreur mp3, de les offrir à mon amie poète, avec le même enthousiasme qui m'aurait habité si j'avais découvert une nouvelle partition. Interprète disposant d'un nouveau registre, d'un nouvel instrument, j'ai repris certains segments. La fatigue qui s'installait doucement a sans doute teinté la lecture que j'en ai faite, comme lorsque l'on laisse les doigts caresser un thème aimé une fois le dernier invité rentré chez lui, avec juste un fil de nostalgie.
« on n’entre pas dans le désir / on l’observe » (p. 47, 19e visite)
Les souvenirs finissent toujours par s'estomper, mais pourtant, depuis presque un mois, le récit de ces rencontres, avec les œuvres, avec l'homme (vision sublimée ou relation incarnée, peu importe), avec elle-même, avec le langage, m'habite encore, de façon ténue, en filigrane, en contrepoint, m'a permis d'apprivoiser certaines évidences. J'ai rapporté le livre à la bibliothèque avec une légère réticence, consciente qu'il aurait été injuste de priver un autre lecteur, une autre lectrice, en me disant aussi qu'il se nicherait bientôt sur mon étagère de poésie, que je l'offrirais à d'autres aussi.

mardi 5 novembre 2013

La Bête... de scène

Jean-Guy Legault aime sans doute les défis démesurés. Fasciné par le propos de La Bête, une pièce primée écrite en 1991 par David Hirson, récipiendaire notamment d’un Prix Laurence Olivier, s’articulant autour d’un duel de mots et d’idéaux entre Élomire (Molière) et Valère, un baladin, il a passé plus de 500 heures à la traduire en alexandrins avant de réfléchir à une mise en scène efficace, ludique, sans temps morts, qui maximise l’espace scénique de la petite salle Fred-Barry. Pari tenu haut la main car, malgré quelques longueurs (le texte original de deux heures et demi, entracte inclus, aurait sans doute pu être ramassé ici et là), il faut bien admettre que l’expérience a quelque chose par moments de proprement jouissif.
Vincent Côté se révèle phénoménal en Valère et livre son texte avec une prestance étonnante, qu’il monologue pendant une trentaine de pages, cite à tort et à travers Cicéron, présente au public certaines de ses délirantes paraboles, tente de provoquer l’ire d’Élomire, déforme le sens des mots pour assener une rime plus efficace, plaide sa cause auprès du Prince de Conti, cabotine allègrement ou joue la carte de la vulgarité la plus crasse, suscitant un franc fou rire chez les jeunes spectateurs présents.
Pour lire le reste de ma critique, passez sur le site de Jeu...

dimanche 3 novembre 2013

Ludwig

Une BD symphonique autour de l'un des compositeurs les plus mythiques... que voilà une offrande originale et combien magistralement réalisée. En janvier dernier, je m'entretenais avec Christian Quesnel, l'auteur et illustrateur, lors d'un vernissage mettant notamment en lumière quelques-unes des planches qui constitueraient l'album publié ces jours-ci par Art Gloobal et Neige-galerie. J'avais été frappée par la fougue avec laquelle il me parlait de cet amour qu'il portait - qu'il semble avoir porté de tout temps ou presque - à Beethoven, de la façon dont son récit s'articulerait de façon musicale, que les images répondraient à la partition, que celle-ci deviendrait au fond souffle narrateur.

Sur le coup, l'explication m'avait laissée perplexe. Comment un lecteur pourrait-il comprendre instinctivement le rythme que l'auteur avait souhaité insuffler à son album? Quand saurait-on qu'il fallait  tourner la page? Comment pouvait-on garder un lecteur captif d'une musique? La réponse est de fait beaucoup plus simple que je n'aurais pu l'imaginer: tout simplement grâce à des minutages inscrits en bas de page, qui nous servent d'indicateurs!

Bien sûr, le lecteur a le loisir de feuilleter la bande dessinée à son rythme, de se perdre dans une analyse concertée de chaque page, peut même lire l'album sans son support musical. Il peut aussi se faire son propre parcours, en laissant la musique lui inspirer sa prochaine tourne de page, lors de l'entrée du piano, lors du traitement orchestral en demi-teintes. L'extrait choisi, le premier mouvement du Concerto no 5 de Beethoven, « Empereur », interprété par l'Orchestre symphonique de Gatineau et la pianiste Marie-Charline Foccroulle, sous la direction d'Yves Léveillé, se prête admirablement au propos, avec sa multiplicité de textures, sa force dynamique, ses instants de poésie suspendue (propice à des dessins plus atmosphériques), la façon dont le tout relève plus de la symphonie avec piano (comme les concertos de Brahms) que du combat entre soliste et masse orchestrale.

L'esthétique du dessin de Quesnel se veut volontairement steampunk et son Beethoven n'est nullement un être désincarné, que l'on ne peut extraire de son époque, qui perdrait pied dans le 21e siècle.  Après tout, la musique du maître de Bonn reste aussi pertinente aujourd'hui que lors de sa création. Révolutionnaire alors, elle n'en est pas pour autant devenue banale aujourd'hui. Rares sont les compositeurs qui ont su ériger un édifice entier sur un simple accord comme sait le faire Beethoven. En même temps, ceux qui connaissent la vie du Grand Sourd retrouveront certains moments-clé: le dialogue Goethe-Beethoven lors du passage du roi (Goethe se courbant, mais Beethoven, trop fier, refusant de plier l'échine), l'enfance plus ou moins heureuse du compositeur, la présence de l'Immortelle bien-aimée (les musicologues et exégètes continuent de proposer l'une ou l'autre théorie pour éclaircir le mystère)... On y croise même Mozart en rock star (clin d’œil à Rock me Amadeus), le propos s'articulant plutôt de façon intemporelle qu'anachronique.

Le livre demeure un objet d'une grande beauté, entre la BD et le livre d'art, à la couverture rigide, que l'on voudrait peut-être laisser traîner sur la table en café, mais auquel on voudra revenir encore et encore, que l'on souhaitera mettre entre toutes les mains. Les textes, minimaux, histoire de laisser parler les œuvres d'art de Quesnel (difficile ici d'y référer seulement en termes de « planches ») sont également proposés en annexe en anglais et en allemand, ce qui permettra au livre de voyager plus facilement.


En attendant, ceux qui habitent Ottawa ou Gatineau pourront vivre l'expérience de Ludwig en concert samedi soir le 9 novembre à la Maison de la culture de Gatineau, lors d'un concert multimédia qui comprend l'interprétation du Cinquième Concerto (dans son intégralité) par Marie-Charline Foccroule et projection d'une série de 120 œuvres inédites intitulées La lettre à l’immortelle Bien-aimée, ainsi que la création d'une symphonie du compositeur Sébastien Tremblay, évocation de ce qu'aurait pu être la Dixième Symphonie de Beethoven. Plus de renseignements ici...

Une entrevue de Christian Quesnel à l'émission Catherine et Laurent peut être écoutée ici...


vendredi 1 novembre 2013

Henri Michaux: Mouvements / Gymnopédies: noir sur blanc

Marie Chouinard propose ces jours-ci au Théâtre Maisonneuve deux œuvres complémentaires, qui jouent beaucoup sur les oppositions, entre noir et blanc, trame sonore tonitruante et musique planante, solos (qui parfois se superposent) et numéros de groupe. 

Henri Michaux: Mouvements se veut plutôt ludique. Des dessins abstraits qui peuvent évoquer par moments le test de Rorschach quand on se met à suranalyser, sont projetés sur une immense écran blanc. Les danseurs, vêtus de noir, comme s'ils avaient été entièrement trempés dans un pot d'encre (visage et mains non compris) attendent de chaque côté de la scène, devenue véritable aire de jeu. Chacun leur tour, en duo, en trio, en groupe, parfois uniforme, parfois superposition de gestes indépendants, ils s'avancent, frondeurs, jettent parfois un regard de défi à la projection, puis prennent la pose. Taches / taches pour obnubiler / pour rejeter / pour désabriter / pour instabiliser / pour renaître / pour raturer / pour clouer le bec à la mémoire / pour repartir.

Chaque dessin devient une mini-histoire, dont les héros sont souvent des animaux ou des oiseaux, parfois traqués. Le rythme est effréné, prolongement de la trame sonore explosive de Louis Dufort, qui n'avait certes pas besoin d'être crachée à volume maximal. Deux instants de répit bienvenus pour les tympans nous donnent à voir Carol Prieur, qui se glisse sous le tapis de danse, comme si elle se dissimulait sous la tranche du livre (belle idée), pour nous déclamer, d'une voix tout sauf nuancée, un extrait du poème de Michaux et à entendre une lecture sentie, théâtrale, de la postface de Michaux. 

Les oreilles et les yeux engourdis par tant de stimulations (on regarde le dessin de Michaux, on évalue l'intérêt de la relecture, parfois avec le sourire, autant d'instants volés très vite balayées par la prochaine offrande), on finit malheureusement par décrocher, relevant ici et là la façon dont Chouinard travestit un corps en y ajoutant des tissus noirs qui allongent les lignes ou la façon dont les cheveux qui s'agitent permet de retranscrire autrement un dessin. La fin, en négatif, les signes étant projetés blanc sur noir, les danseurs noyés par une lumière stroboscopique, mène néanmoins le spectateur vers un essentiel apex émotif.

Je te veux

Pendant l'entracte, on se demande comment l'oreille réussira à apprivoiser les harmonies statiques, vaguement planantes, des Trois Gymnopédies de Satie. Quand le rideau se lève, on est d'abord fasciné par la palette de gris, magnifiquement mise en valeurs par les éclairages d'Alain Lortie, danseurs et piano étant recouverts de tissus, comme si nous pénétrions dans une maison abandonnée ou dans le coffre-fort d'un musée. (La façon dont le piano était emballé m'a d'ailleurs rappelé l'installation Inflitration homogène pour piano à queue de Joseph Beuys.) Des corps nus s'extraient des housses, disparaissant deux par deux vers l'arrière-scène. Après avoir baigné quelques instants dans l'ouverture de Tristan et Isolde de Wagner (le lien avec Satie m'échappe ici), on plonge d'un seul coup dans la matière sonore de la pièce, les Trois Gymnopédies, interprétées par l'un ou l'autre des danseurs, avec quelques fausses notes, sans trop de relief, ce qui étrangement rend le tout plus humain, devient miroir de la fragilité de ces liens qui se tissent entre les couples qui évoluent sur scène, tant hétérosexuels qu'homosexuels (superbe duo d'hommes). Ici, la couleur chair prend assurément le dessus sur le noir, pourtant porté par les danseurs.

Les duos amoureux, tantôt érotiques, parfois vulgaires, se suivent, s'entrecroisent à des processions de groupes, l'apparition des bouffons au nez rouge, la juxtaposition de parades amoureuses entre hommes et femmes qui nous rapprochent du règne animal (clin d’œil indirect à la première proposition de la soirée). Les danseurs viennent saluer, on croit la soirée terminée. Certains se pressent vers la sortie, mais ils reviendront rapidement sur leurs pas, car il devient vite impossible de résister à cet immense post-scriptum volontiers cabotin, pendant lequel les danseurs se moquent aussi bien d'eux-mêmes que du langage chorégraphique, s'assoient au milieu du public, puis se lèvent pour applaudir de façon caricaturale quand ils ne se vautrent pas carrément sur les fauteuils en quelques poses incitant à la luxure. Sur scène, ils batifolent, se versent un verre, se mettent à fumer, dissertent dans le vide, trouvent de nouvelles utilités à un clavier électronique; le public rigole, avec l'impression d'avoir été invité à une représentation circassienne, se prend au jeu, devient partie intégrante du spectacle. 

Vous avez encore deux soirs pour vous glisser en salle...