Depuis sa fondation en 1966, la Société de musique contemporaine du Québec (SMCQ) a vu son destin uni à celui du développement des musiques nouvelles d’ici. Pourtant, trop peu avait été écrit jusqu’ici sur l’histoire parfois tumultueuse de cet organisme de diffusion indispensable, dirigé tour à tour par Serge Garant (1966 à 1986), Gilles Tremblay (1986 à 1988) et Walter Boudreau (depuis 1988).
Dans ce livre fouillé, dans lequel sont habilement intégrées de nombreuses citations tirées de documents d’époque, Réjean Beaucage trace un panorama complet, de Pierre Mercure à aujourd’hui, s’attardant aussi bien sur les répercussions qu’aura Expo 67, les défis de programmation rencontrés par la société, les perceptions souvent peu nuancées des critiques – en curieuse opposition au rayonnement des compositeurs québécois sur la scène internationale – que la mise sur pied d’événements rassembleurs tels que la Symphonie du millénaire ou les festivals MNM et Musimars. L’auteur a su éviter l’écueil du langage spécialisé, voire hermétique, préférant une approche rigoureuse mais conviviale, soutenue par un style particulièrement limpide qui donne parfois presque l’impression de feuilleter un roman tant on est happé à la lecture. Un index et une bibliographie détaillée sont proposés en annexe, transformant la somme en un ouvrage de référence essentiel, pour quiconque souhaite revivre l’un ou l’autre des pans de cette histoire volontairement tournée vers l’avenir.
La musique et l’écriture ont été de tout temps les deux pôles de la vie créatrice de l'auteure. Ce site se veut donc un hommage à la musique (particulièrement classique) et à la littérature, mais aussi au théâtre et aux autres manifestations artistiques.
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samedi 30 avril 2011
jeudi 28 avril 2011
Conduis-moi
Parce que visuellement, cela me me semble presque un écho d'Amazone, une histoire de pianiste noir jouant sur un piano blanc au milieu de la jungle que je lis ces jours-ci, parce que la chanson de Yann Perreau m'a séduite à la première écoute, parce que le clip est le résultat d'un concours organisé à travers des écoles secondaires du Québec et que les quatre lauréats de FESTIFILM ont créé, tourné et transformé Conduis-moi en court métrage avec la complicité du réalisateur Tristan Dubois, il fallait que je partage...
Yann Perreau: Conduis-moi from Bonsound on Vimeo.
Yann Perreau: Conduis-moi from Bonsound on Vimeo.
mercredi 27 avril 2011
L'andante inconnu
J'aime le hasard des rencontres, qu'elles soient avec les êtres, avec les œuvres musicales, avec les livres. Alors que je faisais des recherches dans le catalogue de la Bibliothèque nationale afin d'étoffer le contenu mes conférences préconcert de la mi-mai qui traiteront de l'amitié entre Mozart et Haydn, Iris m'a proposé ce livre de Bernard Pingaud.
Invité à un congrès d'écrivains à Helsinki, le narrateur ignore les suggestions de sorties de ses collègues et, attiré par le nom de Christoph Biedermeier, pianiste qu'il admire et qui ne joue que très rarement, il se glisse en salle, même si l'artiste interprète un concerto de Mozart - compositeur qu'il trouve de façon générale trop léger - qu'il ne connaît pas, en fa dièse mineur, K. 627. L'andante du concerto le hante et, dès son retour à l'hôtel, il n'a de cesse d'en retrouver son thème principal, qui lui échappe constamment. Une fois rentré chez lui, il fait des recherches auprès d'un collègue spécialiste, des disquaires, pour évidemment se faire dire que le concerto en question n'existe pas et que Mozart n'a utilisé la tonalité de fa dièse mineur que dans le mouvement lent du K. 488 (certes sublime).
Les années passent, mais périodiquement, le narrateur continue de loin en loin de repenser à ce mouvement de Mozart. Aurait-il rêvé cette soirée? Que cherchait à lui dire son subconscient alors? Les questions persistent, jusqu'à ce qu'un soir, dans un café de Vienne, il entende de nouveau l'andante, transformé, neutralisé d'une certaine façon par les doigts d'une pianiste jazz. Tout aurait-il été dit? « J'étais assuré, maintenant, que la merveilleuse musique qui m'avait obsédé si longtemps n'était pas perdue. Qu'elle continuait à voltiger, à travers l'espace et le temps, comme les mouettes de mon rêve, se posant là où il lui plaisait, quand il lui plaisait, dès l'instant où elle trouvait quelqu'un pour l'écouter. »
Pingaud revisite ici le concept même de l'idée fixe, en une recherche non pas tant de l'œuvre perdue que des sentiments qu'elle évoque. Peut-on recréer en mots une émotion, peut-on tout transmettre au lecteur, peut-on s'extraire de notre histoire personnelle? Autant de questions plus ou moins sans réponses, qu'il tisse avec maestria au canevas de cette longue nouvelle. Détail intéressant, en complément du texte, l'auteur revient sur la part de réalité et de fiction intégrée au texte, certains personnages réels - dont son ami André Frénaud, mort quelques mois avant que l'auteur ne rédige sa nouvelle -, côtoyant ainsi des amalgames d'êtres qui ont croisé sa route, dans des lieux tantôt aimés (Vienne), tantôt recréés de toutes pièces (Helsinki). Mozart aurait vraisemblablement aimé.
Invité à un congrès d'écrivains à Helsinki, le narrateur ignore les suggestions de sorties de ses collègues et, attiré par le nom de Christoph Biedermeier, pianiste qu'il admire et qui ne joue que très rarement, il se glisse en salle, même si l'artiste interprète un concerto de Mozart - compositeur qu'il trouve de façon générale trop léger - qu'il ne connaît pas, en fa dièse mineur, K. 627. L'andante du concerto le hante et, dès son retour à l'hôtel, il n'a de cesse d'en retrouver son thème principal, qui lui échappe constamment. Une fois rentré chez lui, il fait des recherches auprès d'un collègue spécialiste, des disquaires, pour évidemment se faire dire que le concerto en question n'existe pas et que Mozart n'a utilisé la tonalité de fa dièse mineur que dans le mouvement lent du K. 488 (certes sublime).
Les années passent, mais périodiquement, le narrateur continue de loin en loin de repenser à ce mouvement de Mozart. Aurait-il rêvé cette soirée? Que cherchait à lui dire son subconscient alors? Les questions persistent, jusqu'à ce qu'un soir, dans un café de Vienne, il entende de nouveau l'andante, transformé, neutralisé d'une certaine façon par les doigts d'une pianiste jazz. Tout aurait-il été dit? « J'étais assuré, maintenant, que la merveilleuse musique qui m'avait obsédé si longtemps n'était pas perdue. Qu'elle continuait à voltiger, à travers l'espace et le temps, comme les mouettes de mon rêve, se posant là où il lui plaisait, quand il lui plaisait, dès l'instant où elle trouvait quelqu'un pour l'écouter. »
Pingaud revisite ici le concept même de l'idée fixe, en une recherche non pas tant de l'œuvre perdue que des sentiments qu'elle évoque. Peut-on recréer en mots une émotion, peut-on tout transmettre au lecteur, peut-on s'extraire de notre histoire personnelle? Autant de questions plus ou moins sans réponses, qu'il tisse avec maestria au canevas de cette longue nouvelle. Détail intéressant, en complément du texte, l'auteur revient sur la part de réalité et de fiction intégrée au texte, certains personnages réels - dont son ami André Frénaud, mort quelques mois avant que l'auteur ne rédige sa nouvelle -, côtoyant ainsi des amalgames d'êtres qui ont croisé sa route, dans des lieux tantôt aimés (Vienne), tantôt recréés de toutes pièces (Helsinki). Mozart aurait vraisemblablement aimé.
dimanche 24 avril 2011
Pâques en musique
« Je n’écoute plus que Mozart, et c’est plutôt bon signe. Je ne sais rien de plus frais que cette musique, comparable seulement au chuchotement des rivières ou au balbutiement des nouveau-nés. Une telle perfection ne prouve rien et surtout pas, comme on le prétend parfois, l’existence de Dieu. D’ailleurs une existence – fût-elle celle de Dieu – ne se prouve pas. Elle s’accueille ou se rejette, et ce n’est pas la même chose ni le même langage. Prouver est un désir de savant ou de policier. Accueillir est un désir d’amoureux. Mozart ne prouve rien, il simplifie. »
Christian Bobin, Autoportrait au radiateur
Christian Bobin, Autoportrait au radiateur
vendredi 22 avril 2011
David Fray dans Mozart
Son interprétation de la Sonate de Liszt (reprise sous étiquette ATMA Classique) et sa grande maturité avait séduit le jury du Concours Musical International de Montréal en 2004, qui lui avait décerné alors un deuxième prix. Ceux qui ont suivi sa carrière ont rapidement pu constater que la reconnaissance était méritée, le pianiste démontrant certes une technique irréprochable, mais surtout une réelle personnalité – non dénuée de certains tics au concert. En ont témoigné sur disque ses Notations de Boulez (2007) et sa version de référence des concertos de Bach avec l’Orchestre de chambre de Brême (2008), tous deux lauréats du prestigieux ECHO Klassik.
Cette fois, David Fray offre deux concertos de Mozart, très proches dans leur esthétique de l’opéra. (Le nozze di Figaro sera d’ailleurs créé quelques mois après le K. 482.) Le pianiste démontre une complicité réelle avec l’univers de Mozart, souvent transformé par d’autres mains en petites choses insipides. Sa sonorité reste ample mais veloutée, et il sait transmettre avec une grande subtilité la poésie des Andante et une effervescence presque tendre, qui respire toujours admirablement, dans les Allegro. Ses rubatos sont respectés de façon quasi symbiotique par Jaap van Zweden et le Philharmonia Orchestra, qui offrent un écrin somptueux aux arabesques du piano, notamment dans le deuxième mouvement du K. 503. La prise de son reste claire, équilibrée, avec juste ce qu’il faut de réverbération pour créer l’illusion de s’être glissé dans les mythiques studios d’Abbey Road.
(Un clic sur la pochette pour écouter l'album...)
Cette fois, David Fray offre deux concertos de Mozart, très proches dans leur esthétique de l’opéra. (Le nozze di Figaro sera d’ailleurs créé quelques mois après le K. 482.) Le pianiste démontre une complicité réelle avec l’univers de Mozart, souvent transformé par d’autres mains en petites choses insipides. Sa sonorité reste ample mais veloutée, et il sait transmettre avec une grande subtilité la poésie des Andante et une effervescence presque tendre, qui respire toujours admirablement, dans les Allegro. Ses rubatos sont respectés de façon quasi symbiotique par Jaap van Zweden et le Philharmonia Orchestra, qui offrent un écrin somptueux aux arabesques du piano, notamment dans le deuxième mouvement du K. 503. La prise de son reste claire, équilibrée, avec juste ce qu’il faut de réverbération pour créer l’illusion de s’être glissé dans les mythiques studios d’Abbey Road.
(Un clic sur la pochette pour écouter l'album...)
mercredi 20 avril 2011
Fébrilité préconcert
Plus que onze jours avant le concert de mes élèves. Quand je ris, c'est parfois jaune, car voici venu le temps non pas des cathédrales, mais de « serrer la vis » de façon subtile, mais non équivoque. Il y a deux semaines, j'ai assené quelques « tu rigoles? tu n'es pas du tout prêt! » d'un sourire vaguement crispé qui témoignait peut-être d'une certaine exaspération. Pourquoi, à chaque année, les élèves ne se donnent-ils à fond que lorsqu'il est minuit moins une? Il y a bien une ou deux exceptions à la règle, mais si peu... N'empêche, une fois réveillés en sursaut par ma voix tonitruante (même pas vrai), ils ont tous démontré que, tiens donc, ils étaient capables de donner plus. (J'ai tant farci la tête d'un élève hier en l'aidant à mémoriser Galaxy de Lee Evans que je lui ai recommandé de porter des bouchons aux oreilles pour éviter que le contenu ne se répande sur le trottoir ou sur le trajet vers son domicile! Le pire, c'est qu'il a à peine souri, conscient que je n'exagérais presque pas.)
J'ai constaté il y a quelques années en devenant discret membre du public d'un ou deux récitals d'élèves que, sous mon apparente constante bonne humeur (la dernière fois qu'une élève m'a vraiment énervée remonte déjà à plusieurs années), je refuse d'accepter n'importe quoi. Il y a un minimum de respect du texte à instaurer et la musicalité n'est jamais en option. Je préférerai toujours un passage techniquement imparfait mais senti à une interprétation impeccable sans relief. Ce qui me rend le plus fière le matin du concert: quand ils font de la musique et que la pièce, de quatre lignes (j'ai plusieurs débutants cette année, ce qui ajoutera une part importante d'imprévisibilité à la donne) ou de quatorze pages, possède une personnalité distincte, qui laisse autre chose qu'un vague souvenir. Mais d'ici à ce que je les applaudisse à tout rompre, il reste encore passablement de boulot. Ensemble, nous y parviendrons.
J'ai constaté il y a quelques années en devenant discret membre du public d'un ou deux récitals d'élèves que, sous mon apparente constante bonne humeur (la dernière fois qu'une élève m'a vraiment énervée remonte déjà à plusieurs années), je refuse d'accepter n'importe quoi. Il y a un minimum de respect du texte à instaurer et la musicalité n'est jamais en option. Je préférerai toujours un passage techniquement imparfait mais senti à une interprétation impeccable sans relief. Ce qui me rend le plus fière le matin du concert: quand ils font de la musique et que la pièce, de quatre lignes (j'ai plusieurs débutants cette année, ce qui ajoutera une part importante d'imprévisibilité à la donne) ou de quatorze pages, possède une personnalité distincte, qui laisse autre chose qu'un vague souvenir. Mais d'ici à ce que je les applaudisse à tout rompre, il reste encore passablement de boulot. Ensemble, nous y parviendrons.
lundi 18 avril 2011
Equus
Il y a de ces textes qui vieillissent difficilement et d'autres qui restent pertinents, défiant presque avec insolence le poids des ans. En assistant à la première d'Equus de Peter Schaffer mercredi dernier, j'ai pu constater que cette pièce pouvait être rangée dans la première catégorie. Oui, on peut avancer que la religion n'occupe peut-être plus un rôle aussi important que chez cette famille anglaise bien sous tout rapport, mais incapable d'exprimer émotions franches et la moindre parcelle d'originalité. Pourtant, cette volonté de se fondre dans la masse est encore bien présente aujourd'hui, même à cette heure de célébrité instantanée et de partage d'émotions à toute heure du jour sur diverses plateformes, rendant les réflexions du psychiatre Martin Dysart d'une criante actualité.
Village Scene Productions propose une lecture assez assurée de la pièce, malgré certains choix moins heureux. L'idée d'utiliser la scène du Rialto et le devant de la salle se révélait intéressante, mais on a peut-être oublié que tous les spectateurs ne pouvaient pas s'assoir au premier rang et que ceux juchés sur des tabourets de bar (plus ou moins confortables pour une production qui dure près de trois heures, entracte compris) devaient souvent faire quelques contorsions pour ne rien rater de l'action. L'idée de faire assoir les acteurs ne participant pas à une scène en périphérie était néanmoins astucieuse, favorisant l'abolition du quatrième mur sans nous distraire du propos principal. Les chorégraphies de chevaux (six jeunes hommes et jeunes femmes à la plastie parfaite, coiffés d'une tête de cheval qui évoquaient astucieusement à la fois l'animal et le masque antique) de Jacqueline Van de Geer m'a certes moins convaincue, distrayant plus que ne complétant le propos, les gestes étant néanmoins adroitement étudiés pour représenter les animaux. Si l'idée d'utiliser l'écran du Rialto pour projeter un extrait du film porno qu'Alan et Jill vont voir m'a semblé par contre excellente, peut-être aurait-on pu aussi l'utiliser à d'autres reprises (comme toile de fond à la folle chevauchée à dos de Nugget, peut-être?).
On saluera ici la présence scénique plus que convaincante des acteurs. (On aurait souhaité une meilleure projection de la part de Nadia Verrucci toutefois, dans le rôle d'Hesther Salomon). Le jeune Bobby Lamont dans le rôle d'Alan Strang nous amène habilement sur le tranchant entre folie et normalité, jeunesse et vieillesse, force brute et troublante fragilité. Noel Burton a donné quant à lui une interprétation remarquable du docteur Martin Dysart, tantôt manipulateur et tantôt profondément secoué par ce que cette confrontation avec lui-même que Strang lui impose. Pas une seule seconde on a senti l'énergie ou la concentration diminuer et le texte a toujours été transmis de façon limpide. Alarey Alsip a su rendre l'aguichante Jill Masson adroitement, tandis que Victoria Barkoff et Clive Brewer ont campé des parents solides.
Une pièce à découvrir ou à se réapproprier, d'ici le 24 avril. Billetterie et information...
Village Scene Productions propose une lecture assez assurée de la pièce, malgré certains choix moins heureux. L'idée d'utiliser la scène du Rialto et le devant de la salle se révélait intéressante, mais on a peut-être oublié que tous les spectateurs ne pouvaient pas s'assoir au premier rang et que ceux juchés sur des tabourets de bar (plus ou moins confortables pour une production qui dure près de trois heures, entracte compris) devaient souvent faire quelques contorsions pour ne rien rater de l'action. L'idée de faire assoir les acteurs ne participant pas à une scène en périphérie était néanmoins astucieuse, favorisant l'abolition du quatrième mur sans nous distraire du propos principal. Les chorégraphies de chevaux (six jeunes hommes et jeunes femmes à la plastie parfaite, coiffés d'une tête de cheval qui évoquaient astucieusement à la fois l'animal et le masque antique) de Jacqueline Van de Geer m'a certes moins convaincue, distrayant plus que ne complétant le propos, les gestes étant néanmoins adroitement étudiés pour représenter les animaux. Si l'idée d'utiliser l'écran du Rialto pour projeter un extrait du film porno qu'Alan et Jill vont voir m'a semblé par contre excellente, peut-être aurait-on pu aussi l'utiliser à d'autres reprises (comme toile de fond à la folle chevauchée à dos de Nugget, peut-être?).
On saluera ici la présence scénique plus que convaincante des acteurs. (On aurait souhaité une meilleure projection de la part de Nadia Verrucci toutefois, dans le rôle d'Hesther Salomon). Le jeune Bobby Lamont dans le rôle d'Alan Strang nous amène habilement sur le tranchant entre folie et normalité, jeunesse et vieillesse, force brute et troublante fragilité. Noel Burton a donné quant à lui une interprétation remarquable du docteur Martin Dysart, tantôt manipulateur et tantôt profondément secoué par ce que cette confrontation avec lui-même que Strang lui impose. Pas une seule seconde on a senti l'énergie ou la concentration diminuer et le texte a toujours été transmis de façon limpide. Alarey Alsip a su rendre l'aguichante Jill Masson adroitement, tandis que Victoria Barkoff et Clive Brewer ont campé des parents solides.
Une pièce à découvrir ou à se réapproprier, d'ici le 24 avril. Billetterie et information...
vendredi 15 avril 2011
La légende des anonymes et autres promenades
Jérémie Leduc-Leblanc nous propose avec La légende des anonymes et autres promenades un parcours qui ne ressemble à aucun autre. Au fil des nouvelles, on y croise et recroise certains protagonistes, découvre les situations évoquées sous un nouvel angle. On s’arrête un instant, perplexe, avec une impression diffuse que cette promenade en apparence détendue, à travers la ville, les destins, derrière les masques, exige qu’on y porte une attention soutenue et là réside la plus grande force de ce recueil.
D’entrée de jeu, j’ai été charmée par le ton légèrement décalé, presque irrévérencieux, adopté par le narrateur dans Rose de Panamá. Le pavillon des fous ne peut qu’ébranler certaines convictions du lecteur, alors que l’habileté avec laquelle Libuše Kopičková est menée a su me toucher. « J’ai aimé Libuše Kopičková comme on aime une ville étrangère et lointaine, d’un amour aussi déraisonnable qu’inusité. Sans trop savoir où elle me conduirait. Et sans savoir exactement où elle me perdrait. » Je me suis glissée avec délectation dans l’ombre de Cybèle Cinéma, ai rythmé les « non » du Banquet des insolites, aurais voulu qu’Éric puisse entendre le plaidoyer de celui qui avait partagé sa vie, ai marché avec Bertrand. « Si Bertrand écrivait, il pourrait sans doute noter toutes ses observations. Décrire, par exemple, le froissement de la lumière filtrant à travers le dôme des arbres. Expliquer la réverbération des sons dans les ruelles de la ville les soirs de grande humidité. Ou encore expliquer la luminescence du béton au crépuscule. S’il écrivait, il pourrait narrer le récit de ses pérégrinations. » Si les beautés des Paysages de Meir-Kebrah n’ont eu que peu d’emprise sur moi, La valse des chenillettes, magnifique ode à l’écriture, reste une inspiration. « Mais le silence de Mozart n’est pas un vrai silence pour Hans. Même si, pour un temps, l’écriture se remet en marche. » Autant d’êtres pas si anonymes que cela au fond qui, sous la plume poétique de Jérémie Leduc-Leblanc, prennent une densité que plusieurs pourraient leur envier.
Vous pouvez lire ici ce que les autres commentateurs de La Recrue en ont pensé...
D’entrée de jeu, j’ai été charmée par le ton légèrement décalé, presque irrévérencieux, adopté par le narrateur dans Rose de Panamá. Le pavillon des fous ne peut qu’ébranler certaines convictions du lecteur, alors que l’habileté avec laquelle Libuše Kopičková est menée a su me toucher. « J’ai aimé Libuše Kopičková comme on aime une ville étrangère et lointaine, d’un amour aussi déraisonnable qu’inusité. Sans trop savoir où elle me conduirait. Et sans savoir exactement où elle me perdrait. » Je me suis glissée avec délectation dans l’ombre de Cybèle Cinéma, ai rythmé les « non » du Banquet des insolites, aurais voulu qu’Éric puisse entendre le plaidoyer de celui qui avait partagé sa vie, ai marché avec Bertrand. « Si Bertrand écrivait, il pourrait sans doute noter toutes ses observations. Décrire, par exemple, le froissement de la lumière filtrant à travers le dôme des arbres. Expliquer la réverbération des sons dans les ruelles de la ville les soirs de grande humidité. Ou encore expliquer la luminescence du béton au crépuscule. S’il écrivait, il pourrait narrer le récit de ses pérégrinations. » Si les beautés des Paysages de Meir-Kebrah n’ont eu que peu d’emprise sur moi, La valse des chenillettes, magnifique ode à l’écriture, reste une inspiration. « Mais le silence de Mozart n’est pas un vrai silence pour Hans. Même si, pour un temps, l’écriture se remet en marche. » Autant d’êtres pas si anonymes que cela au fond qui, sous la plume poétique de Jérémie Leduc-Leblanc, prennent une densité que plusieurs pourraient leur envier.
Vous pouvez lire ici ce que les autres commentateurs de La Recrue en ont pensé...
mercredi 13 avril 2011
La chorale du diable
Martin Michaud m'avait plus qu'agréablement surprise avec son premier roman, Il ne faut pas parler dans l'ascenseur, lu dans le cadre de La Recrue du mois l'année dernière, finaliste au Prix Saint-Pacôme du roman policier. J'attendais donc avec une certaine impatience son deuxième ouvrage, histoire de repasser de nouveau quelques heures avec ce cher Victor Lessard, l'un de ces inspecteurs attachants parce que si imparfait.
Dans cette deuxième enquête, on le retrouve peut-être un peu plus sage (il ne boit que du décaféiné, a perdu du poids, s'est repris en main), mais ses opinions et son attitude se veulent tout aussi tranchées. Lessard enquête sur un drame familial des plus scabreux, une famille entière ayant été sauvagement abattue à coup de hache. Est-ce un quadruple meurtre suivi d'un suicide? A-t-on affaire à un tueur fou qui maquille les scènes du crime (et y déverse une quantité folle de mouches, détail non anodin)? Que vient faire là-dedans le SIV (Servizio informazioni del Vaticano)? Autant de pistes à explorer pour le lecteur, prisonnier consentant de cet écheveau assez habilement tissé par Martin Michaud.
J'ai aimé retrouvé Montréal dans ces pages - Montréal la sale, la cosmopolite, pourtant si attirante malgré tout -, que ce soit le quartier Notre-Dame-de-Grâce (les meurtres ayant été perpétrés à un coin de rue à peine de mon ancien home, de façon plutôt ironique), le centre-ville, le Plateau, le Village ou la louche rue St-Jacques. (Michaud y a aussi cette fois glissé des bribes d'Abitibi et de Sherbrooke.) Certains passages auraient néanmoins eu avantage à être resserrés, histoire d'éviter de tomber dans certaines comparaisons parfois boiteuses (« La jeune fille a tout tenté pour oublier, pour enfermer son passé à double tour dans les lacets de son esprit » n'est par exemple pas des plus élégants) et certains poncifs oisifs. Mais il faut bien admettre qu'on feuillette rarement un roman policier pour s'extasier sur le raffinement de la langue; on veut être mis en contact avec la face sombre de l'humanité. Et cela, Martin Michaud le réussit à merveille.
Dans cette deuxième enquête, on le retrouve peut-être un peu plus sage (il ne boit que du décaféiné, a perdu du poids, s'est repris en main), mais ses opinions et son attitude se veulent tout aussi tranchées. Lessard enquête sur un drame familial des plus scabreux, une famille entière ayant été sauvagement abattue à coup de hache. Est-ce un quadruple meurtre suivi d'un suicide? A-t-on affaire à un tueur fou qui maquille les scènes du crime (et y déverse une quantité folle de mouches, détail non anodin)? Que vient faire là-dedans le SIV (Servizio informazioni del Vaticano)? Autant de pistes à explorer pour le lecteur, prisonnier consentant de cet écheveau assez habilement tissé par Martin Michaud.
J'ai aimé retrouvé Montréal dans ces pages - Montréal la sale, la cosmopolite, pourtant si attirante malgré tout -, que ce soit le quartier Notre-Dame-de-Grâce (les meurtres ayant été perpétrés à un coin de rue à peine de mon ancien home, de façon plutôt ironique), le centre-ville, le Plateau, le Village ou la louche rue St-Jacques. (Michaud y a aussi cette fois glissé des bribes d'Abitibi et de Sherbrooke.) Certains passages auraient néanmoins eu avantage à être resserrés, histoire d'éviter de tomber dans certaines comparaisons parfois boiteuses (« La jeune fille a tout tenté pour oublier, pour enfermer son passé à double tour dans les lacets de son esprit » n'est par exemple pas des plus élégants) et certains poncifs oisifs. Mais il faut bien admettre qu'on feuillette rarement un roman policier pour s'extasier sur le raffinement de la langue; on veut être mis en contact avec la face sombre de l'humanité. Et cela, Martin Michaud le réussit à merveille.
lundi 11 avril 2011
La danse de la vie
Une amie m'a fait parvenir récemment ce texte inspirant et inspiré, extrait du Discours pour Pina de Wim Wenders. Trop beau pour ne pas être partagé, comme la bande-annonce du film, qui pour la première fois intègre la technologie 3D au film d'auteur. (On peut entendre le réalisateur qui parle de ce film ici...) Je regretterais presque de ne pas être en Europe ces jours-ci pour pouvoir l'apprécier. Patience, patience...
LES É-MOTIONS
« Se lever, s’affaler
tituber, s’effondrer,
se dérober, saisir, relâcher,
sauter, bondir, pirouetter,
s’affaisser sur soi-même,
rouler, chercher protection,
s’endurcir, se tendre,
s’entrelacer, prendre par l’épaule
se toucher et s’éloigner l’un de l’autre,
se laisser soulever, porter, tomber
baisser la tête, pleurer, rire, exulter, glousser
éclater de joie, pouffer, sangloter,
glisser, trébucher, faire la galipette, foncer…
aller, marcher, courir, cavaler, s’arrêter,
rester immobile…
perdre un soulier et continuer avec l’autre
à cloche pied,
faire le beau, flâner avec nonchalance
se peser, se coller l’un à l’autre
se balancer, frapper du pied avec impatience
être délaissé,
lever le menton,
baisser les yeux,
ramper,
être humilié,
être encensé…
Le rouge à lèvres qui bave !
La jupe qui glisse !
La manche que l’on retrousse !
La chemise qui sort du pantalon !
La langue pendante,
Les cheveux au vent,
L’index dressé,
Le dos courbé,
La tête relevée… »
LES É-MOTIONS
« Se lever, s’affaler
tituber, s’effondrer,
se dérober, saisir, relâcher,
sauter, bondir, pirouetter,
s’affaisser sur soi-même,
rouler, chercher protection,
s’endurcir, se tendre,
s’entrelacer, prendre par l’épaule
se toucher et s’éloigner l’un de l’autre,
se laisser soulever, porter, tomber
baisser la tête, pleurer, rire, exulter, glousser
éclater de joie, pouffer, sangloter,
glisser, trébucher, faire la galipette, foncer…
aller, marcher, courir, cavaler, s’arrêter,
rester immobile…
perdre un soulier et continuer avec l’autre
à cloche pied,
faire le beau, flâner avec nonchalance
se peser, se coller l’un à l’autre
se balancer, frapper du pied avec impatience
être délaissé,
lever le menton,
baisser les yeux,
ramper,
être humilié,
être encensé…
Le rouge à lèvres qui bave !
La jupe qui glisse !
La manche que l’on retrousse !
La chemise qui sort du pantalon !
La langue pendante,
Les cheveux au vent,
L’index dressé,
Le dos courbé,
La tête relevée… »
vendredi 8 avril 2011
Des titres qui me font de l'oeil
Cela faisait un bon moment qu'autant de titres ne m'avaient interpellée. Peut-être parce que j'avais décidé d'être raisonnable et de tenter de remporter une bataille contre ma PAL (impossible de considérer que je réussisse un jour à la faire disparaître entièrement, j'ai accepté la donne), plutôt que de « regarder ailleurs », j'avais jeté un regard presque désabusé sur le cahier lectures des quotidiens depuis quelque temps. Mais là, la tentation commence à être passablement forte. Encore, ce matin, j'aurais pu céder.
Il y a ainsi le semble-t-il très beau premier roman de Miguel Syjuco, Illustrado. L'entrevue publiée avec l'auteur donne envie de connaître l'œuvre, il faut l'admettre. « Parce que le livre a une structure un peu chaotique, j'ai emprunté l'idée de motifs qu'on trouve dans la musique classique pour créer un sentiment d'unité. Peu importe les instruments, ces motifs se répètent: le passage à la maturité, la révolution, la responsabilité sociale envers son pays, l'exil, la relation entre un enfant et ceux qui l'ont élevé », explique-t-il. Inutile de nier que tout cela m'interpelle... Et j'admets avoir réfléchi longuement après avoir lu le passage suivant: « Peut-être parce que je viens d'un pays du Tiers-Monde, je trouve amusant de voir comment, en Amérique du Nord particulièrement, on a le luxe de pouvoir écrire à propos de petits drames domestiques, des ruptures, la mort de l'être aimé, souligne l'auteur. Bien sûr, c'est une partie de l'expérience humaine et cela fait partie de mon livre aussi. Mais c'est le travail d'un pays à l'aise, confortable. Parfois, il y a une tendance à oublier la relation entre le personnage et sa société. J'ai toujours cru que la responsabilité de l'écrivain était d'aller dans le monde et d'en rendre compte, selon sa perspective. J'aimerais voir un roman sur les soldats canadiens en Afghanistan, sur les aides domestiques, davantage de livres sur les Premières nations.. »
Il y a aussi le deuxième roman de Christine Eddie. Réussira-t-elle à charmer autant qu'avec ses Carnets de Douglas, un titre lui aussi conçu de façon plutôt musicale (et non pas seulement parce qu'il y est question à un moment d'une clarinette)? Josée Lapointe s'entretient avec l'auteure, qui admet ne pas avoir la patience d'écrire ici...
Et puis, il y aurait bien le plaisir (presque) coupable de lire Les imperfectionnistes de Tom Rachman, un autre premier roman salué, qui traite des magouilles des salles de rédaction... ou encore l'impression de voler du temps au temps en feuilletant le dernier Robert Lalonde, Le seul instant. Soupirs... tant de tentations auxquelles résister!
Il y a ainsi le semble-t-il très beau premier roman de Miguel Syjuco, Illustrado. L'entrevue publiée avec l'auteur donne envie de connaître l'œuvre, il faut l'admettre. « Parce que le livre a une structure un peu chaotique, j'ai emprunté l'idée de motifs qu'on trouve dans la musique classique pour créer un sentiment d'unité. Peu importe les instruments, ces motifs se répètent: le passage à la maturité, la révolution, la responsabilité sociale envers son pays, l'exil, la relation entre un enfant et ceux qui l'ont élevé », explique-t-il. Inutile de nier que tout cela m'interpelle... Et j'admets avoir réfléchi longuement après avoir lu le passage suivant: « Peut-être parce que je viens d'un pays du Tiers-Monde, je trouve amusant de voir comment, en Amérique du Nord particulièrement, on a le luxe de pouvoir écrire à propos de petits drames domestiques, des ruptures, la mort de l'être aimé, souligne l'auteur. Bien sûr, c'est une partie de l'expérience humaine et cela fait partie de mon livre aussi. Mais c'est le travail d'un pays à l'aise, confortable. Parfois, il y a une tendance à oublier la relation entre le personnage et sa société. J'ai toujours cru que la responsabilité de l'écrivain était d'aller dans le monde et d'en rendre compte, selon sa perspective. J'aimerais voir un roman sur les soldats canadiens en Afghanistan, sur les aides domestiques, davantage de livres sur les Premières nations.. »
Il y a aussi le deuxième roman de Christine Eddie. Réussira-t-elle à charmer autant qu'avec ses Carnets de Douglas, un titre lui aussi conçu de façon plutôt musicale (et non pas seulement parce qu'il y est question à un moment d'une clarinette)? Josée Lapointe s'entretient avec l'auteure, qui admet ne pas avoir la patience d'écrire ici...
Et puis, il y aurait bien le plaisir (presque) coupable de lire Les imperfectionnistes de Tom Rachman, un autre premier roman salué, qui traite des magouilles des salles de rédaction... ou encore l'impression de voler du temps au temps en feuilletant le dernier Robert Lalonde, Le seul instant. Soupirs... tant de tentations auxquelles résister!
mardi 5 avril 2011
DRAG
« L'art lui a appris une chose: si le hasard fait le corps, le destin le sacre. » Claire est artiste-peintre dans la trentaine. Nicolaï a le double de son âge et a joué jadis pour les classes de ballet du Bolchoï. Il s'habille en robe noire et se maquille, elle souhaite gommer en partie ce que la féminité représente. « Elle n’a pas répudié son corps : elle n’a fait qu’en émousser les contours. Le vin de la solitude est si amer. » Ils vivent en périphérie, des normes, de leurs racines, du temps, et pourtant, un jour, ils se trouvent, se complètent, créent une nouvelle entité. « À deux voix, on parle; seul, on hurle. »
Si DRAG semble se décliner dans la marginalité et une certaine excentricité, le roman possède le côté intemporel des grandes histoires d'amour, projections sublimées de tant d'autres. « Il est si belle et elle est beau. » Entre d'autres mains, le propos aurait pu sombrer dans une consternante banalité, mais la plume acérée et lumineuse de Marie-Christine Arbour sait transmettre la puissance de l'image avec une rare maîtrise. « Vivre avec Nicolaï, c’est jeter une goutte d’encre dans de l’eau de rose. »
En phrases courtes, d'une redoutable perfection, l'auteure sculpte, extrait, polit, sublime, offre. En cours de lecture, on s'arrête souvent, ému par la rencontre de ces deux êtres qui se cherchaient depuis si longtemps, troublé par la force de l'écriture et la pertinence de certaines réflexions sur la musique. « Il faut savoir nier la vie, ma Clara. Car la musique est l’impossible fixation du son sur le néant. Comme le ressac emporte le sable, les mélodies défont l’âme. » Ou encore: « La musique est expansion, non retrait. Il ne faut pas craindre l’abandon. »
Une lecture dont on ne sort pas indemne et qui pousse à découvrir impérativement les autres titres de Marie-Christine Arbour.
Si DRAG semble se décliner dans la marginalité et une certaine excentricité, le roman possède le côté intemporel des grandes histoires d'amour, projections sublimées de tant d'autres. « Il est si belle et elle est beau. » Entre d'autres mains, le propos aurait pu sombrer dans une consternante banalité, mais la plume acérée et lumineuse de Marie-Christine Arbour sait transmettre la puissance de l'image avec une rare maîtrise. « Vivre avec Nicolaï, c’est jeter une goutte d’encre dans de l’eau de rose. »
En phrases courtes, d'une redoutable perfection, l'auteure sculpte, extrait, polit, sublime, offre. En cours de lecture, on s'arrête souvent, ému par la rencontre de ces deux êtres qui se cherchaient depuis si longtemps, troublé par la force de l'écriture et la pertinence de certaines réflexions sur la musique. « Il faut savoir nier la vie, ma Clara. Car la musique est l’impossible fixation du son sur le néant. Comme le ressac emporte le sable, les mélodies défont l’âme. » Ou encore: « La musique est expansion, non retrait. Il ne faut pas craindre l’abandon. »
Une lecture dont on ne sort pas indemne et qui pousse à découvrir impérativement les autres titres de Marie-Christine Arbour.
samedi 2 avril 2011
Kafka en musique
Puisque c'est relativement rare qu'un concert propose une traduction - ou peut-être plutôt une évocation en musique - de textes littéraires, sans même (dans deux des trois cas) que le texte ne soit lu, je me permets ici de reprendre ici un texte publié dans le numéro d'avril de La Scena Musicale (malheureusement pas encore en ligne au moment où j'écris ces lignes). Je me suis glissée en salle lors du premier spectacle de la série (le mot me semble mal choisi, considérant l'expérience vécue; j'aurais peut-être pu écrire performance, dialogue...) et en suis sortie troublée et touchée. Il y avait dans cette appropriation d'un texte (découvert récemment, alors que je travaillais à l'article) une possibilité de lectures croisées démultipliées, qui se répondent l'une l'autre, renvoyant au texte, mais sans en être prisonnières, le comble de la mise en abime ayant été atteint sans doute quand des spectateurs ont effectivement quitté la Chapelle historique du Bon-Pasteur, alors que le texte évoque la moins grande popularité du jeuneur, délaissé par les foules qui souhaitent découvrir autre chose.