Après une première incursion en Afrique l’année dernière, qui avait permis de voyager notamment au Burkina Faso (avec deux pièces d’Aristide Tarnagda) et au Togo (inoubliable À petites pierres de Gustave Akakpo), Dramaturgies en dialogue mettait en lumière les esthétiques complémentaires du Congo-Brazzaville et de la République démocratique du Congo.
Présenté en lecture pour la première fois à Avignon en 2013, Et les moustiques sont des fruits à pépin… de Fiston Mwanza Mujila se révèle une œuvre dense, volontiers jubilatoire, dans laquelle l’absurde et l’humour noir se côtoient avec une dextérité incontestable. On découvre une famille particulière, dans laquelle le père (Alexis Martin, véritablement en feu ce soir-là) cite Marx à tour de bras et vénère Staline, alors que la mère (Marie Michaud, qui ne se laisse pas damner le pion) réplique par des versets de la Bible. Entre les deux, un fils plus que lassé par cette constante joute verbale tente de s’extraire d’une certaine médiocrité, mais finira par devenir victime de leur cupidité.
À force d’être dégoupillés à tout propos, les mots se trouvent presque dénués de sens, posture renforcée par le transistor (rôle de soutien défendu avec brio par Dominique Leclerc) qui crache des réclames ineptes, nous entretient de la vie sexuelle des requins bleus ou diffuse de la propagande. « Paraît-il que les mots sont passibles de peine de mort. » Impossible ici de ne pas évoquer Gauvreau, même si les univers apparaissent plus complémentaires que gémellaires, notamment grâce à l’introduction dans la pièce de Mwanza Mujila d’un deuxième dialogue de sourds, cette fois entre le chœur des Créatures de merde (incarné avec conviction par Christiane Pasquier) et celui des Politiciens et officiers du 32e jour (Jean-François Blanchard, lui aussi impeccable). Avec une verve non dénuée d’une réelle poésie, Mwanza Mujila pose un regard critique, mais néanmoins tendre, sur son pays qui peine à s’accepter.
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