dimanche 18 janvier 2015

Titre de transport

Nous avons tous, à un moment ou un autre, inventé des existences parallèles aux gens que nous croisons dans les transports en commun, tiré des conclusions de leurs tenues vestimentaires, associé une musique entendue à un style de vie, un livre à une école de pensée. Dans son premier recueil, Titre de transport, Alice Michaud-Lapointe joue le jeu jusqu’au bout et nous offre un portrait des plus bigarrés de Montréal, métropole multiculturelle par excellence.

Dans une écriture axée en grande partie sur l’oralité, truffée d’anglicismes et de jurons, elle lie 21 destins à 21 stations, s’attardant plus particulièrement aux oubliés de notre société, par exemple le sans-abri affolant de « Côte-des-Neiges », Gloria qui ne sort jamais de chez elle, mais découvrira quelque chose d’horrible quand elle s’y résoudra ou encore ces jeunes de la rue qui confronteront un couple englué dans la monotonie de son quotidien dans « Berri-UQÀM », assurément la nouvelle la plus puissante du recueil.

Certains textes se déclinent comme de longs monologues, deux privilégient les dialogues, misant sur un certain côté cru – volontiers cruel – et les angles tranchants. (Cela fonctionne mieux dans « Beaudry » que « Longueuil – Université de Sherbrooke ».) Plusieurs sèment délibérément le lecteur en cours de route, nous forçant à aller au-delà des apparences.

La jeune auteure ratisse large. En se transformant en caméléon, elle nous démontre sa polyvalence, mais nous empêche parfois d’extraire une voix entièrement cohérente du recueil. Certains personnages continuent d’habiter l’imaginaire des semaines après, plusieurs redeviennent un parmi tant d’autres. L’acuité de la plume séduit néanmoins suffisamment pour que l’on souhaite découvrir la vraie signature d’Alice Michaud-Lapointe dans un prochain ouvrage.


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