lundi 24 mars 2008

Tenir un livre dans ses mains...

Des journées de boulot particulièrement démentielles ces temps-ci (« T'avais qu'à dire non! »), qui grugent les heures d'une journée de façon assez terminale. Quand j'ai deux secondes pour respirer (ce qui est très rare), je jette un coup d'oeil rapide à mon quotidien (il faut bien que je prêche par l'exemple et que je me tienne à jour avec mon cours de culture générale et ces contrôles périodiques sur des sujets d'actualité) ou, si je dispose d'une plage de temps plus généreuse, je me jette sur l'un des pianos de la maison, en espérant qu'ils ne m'en voudront pas de mon manque de rigueur (quand je m'y assois, par contre, je suis toute là). Vendredi après-midi, après une semaine « de la mort », j'ai bouclé l'ordinateur pour 48 heures (« J'veux rien savoir! », citation dans le texte) et ai pris la direction du chalet beau-familial avec, dans mes valises, mon iPod (qui m'a lâché brutalement après moins d'une heure parce que j'avais oublié de le recharger), mes vêtements chauds et quelques livres. Malgré le tourbillon de mes nombreux neveux et nièces, le bruit de fond presque perpétuel et les heures de sommeil hypothéquées (le chalet n'est pas l'endroit idéal pour celles qui, comme moi, ont le sommeil un peu léger), j'ai réussi à lire deux livres. Hourra! (Oui, je sais, vous trouviez que ça devenait vaguement prétentieux de parler d'un blogue musico-littéraire récemment...)

D'abord, un regard attentif à La soeur de Judith de Lise Tremblay, dont on disait le plus grand bien un peu partout. Si ce n'est pas nécessairement une lecture « renversante » pour moi, j'ai beaucoup aimé la façon dont la narratrice nous plonge dans cet univers d'été qui s'étire, dans une petite ville du Saguenay des années 1960 où tout le monde analyse les moindres faits et gestes de ses voisins, où les vies sont irrémédiablement changées par des hasards de la vie. Et puis, le texte est si bien travaillé, sans qu'il n'y paraisse, qu'on perçoit immédiatement cette moiteur estivale, cette nonchalance qui nous habite (habitait?), cette langueur à peine assouvie par un verre de limonade bien fraîche. Je vous l'avoue, le dépaysement était le bienvenu avec cette neige qui ne veut pas mourir...

Mais je ne pourrais pas passer sous silence mon coup de cœur pour ce classique de Boris Vian, L'écume des jours. Je ne me souviens plus si je l'avais lu jadis autrefois (i.e. quand j'avais 17 ans) ou si c'était plutôt L'arrache-cœur que j'avais alors avalé sans le digérer (Mon copain du moment, un littéraire refoulé, avait trouvé que j'avais pris cette lecture beaucoup trop à la légère et m'avait fait une scène digne d'un roman existentialiste!) mais, peu importe, cette fois-ci, ça a résonné. J'ai adoré la façon dont Vian défait le langage courant pour susciter de nouvelles images, toujours très vives, le regard amoureux qu'il pose sur le jazz (je me sentais une impulsion de me jeter sur le champ sur tout le catalogue de Duke Ellington), la façon dont ces histoires improbables sont narrées. Moi qui remplis habituellement de petits papiers les pages à citation, je ne l'ai pas fait ici, parce que j'aurais dû retranscrire une bonne partie des phrases ou des passages. Des images fortes qui surgissent comme ça: l'usine à fusils (saisissant d'actualité), le nénuphar dans le poumon de Chloé qui ronge tout sur son passage et fait même rapetisser les maisons (et les esprits), les clins d'œil délicieux et cinglants à la fois à Jean-Sol Partre (Jean-Paul Sartre, bien sûr). Tiens, en complément, pourquoi pas Duke et John Coltrane dans In a sentimental mood (je n'ai pas trouvé Chloé, malheureusement...)

6 commentaires:

Anonyme a dit…

J'ai beaucoup aimé les images dans "L'écume des jours" moi aussi. Tellement parlant!! Quant à "la soeur de Judith", j'ai beaucoup aimé aussi, vu que je reconnaissais à peu près tous les coins de rue!!!

Anonyme a dit…

J'imagine que les souris représentent quelque chose, mais quoi au juste ?

Lucie a dit…

C'est une bonne question, ces souris... Pour moi (mais ce n'est qu'une interprétation, bien sûr), elles représentent peut-être la conscience ou du moins l'ouverture à l'autre. La présence de la souris démontre toujours qu'elle n'est pas indifférente. Il y a peut-être un message plus caché, mais...

Lucie a dit…

http://aire0de0repos.canalblog.com/archives/2007/03/27/4447696.html
Une très intéressante piste de réflexion sur la souris mais aussi divers aspects du roman...

Anonyme a dit…

Merci beaucoup :)

Vous enseignez quoi au juste ?

-Eduam

Lucie a dit…

Eduam: bonne question! ;-)
J'enseigne le piano, les matières théoriques (solfège/dictée/théorie) et un cours de culture générale... mais le plus important pour moi, c'est la transmission...