dimanche 31 janvier 2010

De la partialité des jurys


Ce ne sera pas la première ni la dernière fois que je reste perplexe face à une décision d'un jury de concours. On se rappellera de certaines annonces de résultats de concours internationaux, maintenant pièces d'anthologie, comme cette « sortie » d'Argerich quand Pogorelich avait été écarté du palmarès. Je réalise que cette partialité des jurys (vous me direz que je viens d'écrire une lapalissade et vous aurez sans doute raison) ne se joue pas que sur les grandes scènes.

J'assistais hier à un concours d'amateurs. Je ne vous révélerai pas le lieu, puisqu'au final, il n'a que bien peu d'importance. Au programme de la soirée: différents numéros, de genres souvent diamétralement opposés (du rock lourd joué par des jeunes hommes très chevelus à des présentations de danse vaguement éthérées), plus ou moins fignolés selon les participants. Je réalise parfaitement que l'on parle d'un spectacle de la relève, que personne ne brûlera les planches de la Place des Arts dans un avenir prévisible (fût-ce dans le cadre du sympathique concours Ma place des arts), que le ton était bon enfant et que la foule, composée d'amis et de parents, était bien évidemment conquise d'avance.

Le jury était aussi multiple que le programme et comprenait des chanteurs pop (dont une « vedette »), un metteur en scène, une propriétaire d'école de danse et une professeur de musique d'expérience (25 ans, ça compte, non?) Qu'ont-ils bien pu entendre qui m'ait échappé? Je ne sais trop. Je devrais peut-être reformuler la chose et plutôt avancer: ils n'ont certainement pas entendu ce que j'ai entendu.

Je ne prétends aucunement être l'autorité suprême en musique. Ce serait franchement arrogant et je crois qu'apposer ce genre d'étiquette à qui que ce soit est hautement dangereux. Mais des deux prix remis, l'un était selon moi totalement injustifié et m'a laissée perplexe face à la perception que les membres du jury ont pu avoir d'une interprétation classique. On parlait ici d'une pièce ardue techniquement, absolument inaccessible à moins de posséder une technique remarquable. On parlait aussi d'une pièce qui demandait une grande clarté d'élocution pour être transmissible, qui exigeait qu'on y respire, qui ne supportait pas que le jeu soit précipité. Si un de mes élèves avancés était arrivé en leçon et m'avait interprété la pièce de cette façon, j'aurais été atterrée. J'aurais peut-être même considérer entrer dans une très rare colère, puis me serais vraisemblablement portée à la défense du compositeur, aurais repris le texte note par note pour en décortiquer les subtilités.

Ce que le jury a entendu est vraisemblablement que l'interprète jouait très vite et très fort: un « show de boucane » si l'on veut. Que les musiciens pop n'aient pas pu identifier la fraude, passe encore. Que le prof de musique d'expérience ait jugé que cette interprétation méritait d'être récompensée, je n'y comprends rien... Inutile de préciser que je n'ai ni applaudi après la prestation ni après l'annonce de ce résultat. Au moins, le premier prix était mérité...

vendredi 29 janvier 2010

Plein la vue

Pour oublier qu'il fait - 30 dehors avec le facteur éolien mais surtout pour son utilisation ludique et poétique des instruments de musique, je me devais de partager ce vidéo du Dave Matthews Band...



(Certains m'ont dit que le lien ne s'ouvrait pas dans leur pays: vous pouvez essayer de le visionner sur Dailymotion ici...)

mercredi 27 janvier 2010

Trop, c'est comme pas assez

J'ai reçu des invitations pour assister à cinq événements musicaux différents samedi soir, allant du récital de piano d'un ami proche à un concert-bénéfice classique pour Haïti et du concert-théâtre à l'opéra. Pourquoi je vous dis ça? Pour que vous ayez l'impression que je mène une vie de jetsetter? Pas du tout. C'est un mythe qui n'a aucun fondement. Pour la petite histoire, je sors rarement plus d'une fois par semaine pour aller au concert, au théâtre ou au musée et certaines semaines pas du tout.

Non, la question est plutôt ici: comment peut-on espérer remplir toutes ces salles le même soir quand quatre des cinq événements visent le même public, celui qui apprécie la musique classique? N'a-t-on pas perdu, au fil des ans et de l'offre, l'exceptionnel du concert, de la sortie? Bien sûr, je ne souhaite pas non plus revenir 50 ans en arrière quand l'offre était plus que fragmentaire et que, en plus, dans plusieurs cas, seuls les plus riches pouvaient se permettre d'aller au concert. Mais a-t-on besoin de passer dans le registre pléthorique pour autant?

Je viens d'aller consulter le calendrier d'événements de La Scena Musicale pour samedi à Montréal: cinq événements inscrits (ce qui ne signifie pas qu'il n'y en ait que cinq, puisque seuls deux des événements auxquels j'ai été invitée s'y retrouvent). J'aurais pu être intéressée par quatre de ces événements: Tosca, une soirée de musique de chambre contemporaine au Conservatoire, The Rake's Progress de Stravinski à McGill, Les Tabarinades.

Alors, vous voulez savoir où vous me croiserez samedi soir? À un endroit où vous ne m'attendez pas nécessairement, la finale locale de Cégeps en spectacle. Eh oui, j'ai un étudiant qui y participe. Je n'ai donc pas été tiraillée très longuement par des choix déchirants, j'ai opté pour la voix du cœur et de la raison. L'après-midi, par contre, je me glisserai en salle pour la répétition générale d'un des autres concerts, auquel je ne pouvais pas ne pas assister. Et, oui, cela voudra dire qu'en moins de dix jours, je serai allée deux fois au théâtre et deux fois au concert/spectacle. De quoi faire mentir mes statistiques personnelles! Tant pis!

mardi 26 janvier 2010

Do-ré-mi

Parce que je suis une fan finie de The Sound of Music (j'ai fini par m'acheter le DVD quelques jours avant Noël, cadeau de moi à moi) et que les flashmobs me mettent de bonne humeur, je partage avec vous celle-ci. On oubliera ainsi la grisaille quelques minutes, non? Je vous mets au défi de ne pas au moins fredonner quand vous visionnerez la vidéo.

lundi 25 janvier 2010

Écrire au féminin


Peut-on parler d'écritures féminines et masculines? Peut-être bien... du moins dans certains cas. J'ai passé la journée d'hier plongée dans deux univers féminins, tout d'abord avec un court recueil de nouvelles, L'amour est très surestimé, Prix Goncourt de la nouvelle 2007, un cadeau d'une amie qui pratique le genre avec un bel enthousiasme. Brigitte Giraud (que je découvre ici) traite de l'amour, non pas dans son effervescence ou son flamboiement mais dans sa chute, quand il y a séparation, deuil, quand on doit réapprendre à vivre seule, à adopter de nouveaux codes, apprivoiser de nouveaux repères. D'entrée de jeu, avec La fin de l'histoire, le ton est donné. « On dit que la fin est inscrite dans le commencement. » (p. 11) J'ai été plutôt séduite par le ton intimiste du recueil et son unité, sauf pour L'été de l'attente qui, même si elle traite de la fin d'un amour (l'assassinat de Marie Trintignant par son amant) m'a semblé hors propos ici. Il ne se passe presque rien dans ces petites histoires qui ressemblent à tant d'autres, et pourtant, on y entre sans hésitation, porté par un certain spleen et une élégance du ton.

Je me demandais dans quoi j'allais pouvoir plonger après ces récits fragmentaires quand j'ai été interpellée par , qui boit l'encre. de Louise Marois. (Oui, la virgule et le point font partie du titre, ce membre de phrase étant extrait d'un passage particulièrement fort du récit que je tairai ici.) Depuis la mort de son mari, Élise souffre. Elle vit retirée de tout, a scié le lit conjugal en deux, contrôle la lumière entrante dans la pièce pour que celle-ci ne soit éclairée qu'à moitié. Le mal l'attaque, jusque dans ses entrailles. « La mort d'Auguste était un trou, dont nulle corde ne pouvait atteindre le fond. Apprendre à faire des nœuds devenait inutile. » (p.59) Son voisin, Victor, est envoûté par elle, tente de l'atteindre, de lui offrir un nouveau souffle. « Il connaissait bien ces états de tristesse qui la secouaient violemment. Détestait ces tempêtes qu'il ne comprenait pas. N'y pouvait rien. » (p. 67)

Aucun geste ne pourra réellement apaiser ces deux écorchés qui dansent un poétique pas de deux, entre le souvenir et le présent, la mort et la vie, la folie et la lucidité. À travers un texte qui fait alterner poèmes en prose et en vers, Louise Marois nous mène dans un univers onirique qui démultiplie le vertige face à la perte. Un périple à la fois douloureux et apaisant.

t'écrire sur les châteaux du jour
sur la lumière que fait ta joie
sur la terrible absence
sur ses secondes qui émiettent
le temps
elle qui écrit sur la mie blanche
que l'éphémère est un jeu d'enfant (p. 67)

dimanche 24 janvier 2010

Les Tabarinades: théâtre de variété façon XVIIe

Parfois dans la vie, il y a de ces rencontres dont on ne soupçonne pas la portée. En juin 2003, lors de la parade d’ouverture du Festival Montréal baroque, les organisateurs décident de monter une farce sur tréteaux, signée Tabarin. Dans le coin droit, Jean-François Gagnon, spécialiste de la commedia dell’arte, revêt le masque et mantelet (tabarrino) du célèbre bateleur du Pont-Neuf et transmet les subtilités du texte truculent. Dans le coin gauche, le flûtiste Francis Colpron ponctue les calembredaines d’entrelacs musicaux. La magie opère, le public d’un soir est séduit. Six ans plus tard, le directeur artistique des Boréades décide de renouveler l’expérience et commande à Gagnon un texte, assemblé à partir des farces de Tabarin, qui abordent aussi bien les thèmes de la si fragile « vertu » (pulsions sexuelles qui animent la jeunesse, mais donnent des sueurs froides aux pères) que l’éternel débat « maîtres et valets », à la fois complices et rivaux.

C'est samedi prochain au Monument National qu'aura lieu ce séduisant mariage entre théâtre et musique. Si vous souhaitez en connaître plus sur Tabarin lui-même et ce projet, je vous invite à lire mon article (en page 45 du PDF du dernier numéro de La Scena Musicale). J'aime bien ces projets hybrides, qui redéfinissent les frontières entre les genres...

jeudi 21 janvier 2010

Lire et écrire

Les Webzines, vous aimez? Certains sont un peu brouillons mais d'autres, remarquablement présentés. Parmi ceux-ci, BSC News est sans doute l'un des plus attrayants: suggestions lectures, entrevues avec musiciens ou hommes de théâtre, une présentation visuelle très soignée et le plaisir de tourner les pages à l'écran, presque comme « en vrai » (effets sonores à l'appui).

J'ai été entièrement happée par l'article d'Aline Apostolska, qui s'entretient avec Erick Blackburn, libraire propriétaire avec ses deux associés du très sympathique Port de tête, une librairie comme aucune autre, qui propose un choix unique de livres neufs et légèrement usagés. Il nous explique sa philosophie de vente. Juste après, elle nous révèle ses coups de cœur 2009 et nous présente son auteur chouchou de l'année, Jean-Simon DesRochers, auteur de La canicule des pauvres, paru aux Herbes Rouges.

Vous pouvez lire le tout ici, à la page 56 (mais surtout, n'hésitez pas à feuilleter le reste du numéro).

mardi 19 janvier 2010

Valse avec Bashir

Après avoir multiplié les rendez-vous manqués avec ce film, tant ici qu'à Paris - comme si ce film me poursuivait d'une certaine façon -, je me suis enfin assise hier devant Valse avec Bashir, ce film très troublant, à la fois magnifique et poignant, planant et révoltant, d'une grande douceur et d'une violence qui se serait avérée insupportable si non présentée à travers ces dessins magnifiques.

Si certaines images continueront de me hanter, comme un poème qui vient nous chercher droit au cœur, je me suis aussi laissé happer par la trame sonore du film, signée Max Richter. Je pars de ce pas à la découverte de ce compositeur qui a su m'envoûter en quelques mesures.

Une magnifique chorégraphie sur On the Nature of Daylight peut être visionnée ici.

lundi 18 janvier 2010

Blogosphère littéraire sous la loupe

Les blogues littéraires sont nombreux, comme en témoigne ce « recensement » établi il y a quelque temps par la presque mythique Cuné. Si le lecteur moyen y trouve son compte, la presse traditionnelle a jusqu'ici levé le nez - et très haut avec ça - sur le phénomène, usant d'épithètes parfois peu sympathiques, s'insurgeant contre le fait que la critique littéraire devait être faite par des professionnels et non de vulgaires amateurs. Vous me direz que je suis un peu assise entre deux chaises là-dessus, puisque je publie dans la presse écrite des critiques mais pour moi, le terme d'« amateur » n'a jamais eu de connotation péjorative. Je l'admets volontiers: quand un(e) blogueur(se) que j'aime bien - ou, encore mieux, un(e) ami(e) - me vante avec enthousiasme un bouquin, il y a plus de chances que je craque que si j'ai lu un article pointu dans un magazine spécialisé.

Le célèbre Télérama dédie un article de fond au phénomène, Très à la page, les amazones de la blogosphère! (Mais oui, pardonnez le féminin, messieurs, car vous n'êtes pas très nombreux!) Pour lire, c'est ici...

dimanche 17 janvier 2010

Dans les mots de Jean-François Beauchemin

« On a trop dit à propos des artistes qu’ils étaient des rêveurs, et donc qu’ils vivaient dans un monde étranger à celui qu’ils décrivent pourtant. Comme si ces hommes et ces femmes n’étaient pas avant tout, à l’image de tout ouvrier, des assembleurs de matériaux. Certains artistes eux-mêmes, dont des écrivains, en ne repoussant pas cet insupportable romantisme, contribuent à la fausse conception qui voudrait faire croire qu’écrire un livre ou peindre une toile est autre chose que de former un aménagement de souvenirs, de désirs, de blessures puissantes et de secrètes volontés. » (p. 25-26)

« Je n’ai presque rien demandé aux hommes. Mais j’ai tout exigé de leurs livres. Il est excusable qu’un homme, ou même un dieu, n’ait pas compris le fonctionnement de l’âme. Je n’ai jamais eu cette indulgence pour les livres. » (p.31)

Jean-François Beauchemin, Cette année s'envole ma jeunesse

vendredi 15 janvier 2010

Le 15, jour de Recrue

Je n'ai pas osé signer de commentaire de lecture pour notre Recrue du mois, Les Murs d'Olivia Tapiero, lauréate du Prix Robert-Cliche, puisque je ne peux certes pas faire preuve de droit de réserve et de totale objectivité ici. J'avais néanmoins très hâte de connaître les avis de mes collègues de La Recrue. À lire ici...

jeudi 14 janvier 2010

Continuer d'y croire

Des entrevues enfilées pendant deux jours, sur un sujet commun ou presque. D'un côté, les purs, les amants du répertoire, ceux qui, malgré un climat économique parfois peu réjouissant, continuent d'y croire et s'abonnent, histoire d'entendre 5, 10 ou même 20 concerts dans leur saison musicale. De l'autre, de jeunes musiciens chevronnés, qui essaient de renouveler l'expérience du concert sans la défigurer. (Oui, je sais, on dirait que j'ai volontairement employé un oxymore avec « jeunes » et « chevronnés » mais, à 30 ans, je pense qu'on peut être de plain-pied dans les deux catégories.)

J'avoue avoir été fascinée par certaines de ces témoignages d'amour entendus. Je me suis ainsi entretenue avec un acteur salué par ses pairs, la critique et le public, qui admet assister à au moins une vingtaine de concerts chaque année, parfois seul, parfois avec un proche. Il y a eu aussi ce juge à la retraite qui continue depuis plus de 45 ans de soutenir un orchestre. J'ai rencontré des gens « ordinaires » qui font le choix conscient de sortir au concert une dizaine de fois par année, malgré la gestion du quotidien. J'ai aussi parlé à une dame à l'âge vénérable (mais on tait l'âge des dames, n'est-ce pas?) qui a entendu l'OSM pour la première fois... en 1938, lors d'une Matinée jeunesse dirigée par Wilfrid Pelletier, et qui continue de sortir au concert régulièrement.

Moi qui suis devenue légèrement blasée par l'expérience de concert - et c'est bien dommage d'une certaine façon -, j'ai été renversée par la conviction avec laquelle ces mélomanes croyaient en la vitalité de la musique classique, qu'ils évoquent Chostakovitch, Prokofiev, Berlioz ou Mozart. Je me suis dit que, si elle ne fait peut-être pas courir les foules, elle continue de convaincre, d'interpeller, de remuer, de faire pleurer, de susciter le fou rire...

En cette période de globalisation et de dématérialisation du support, la voie pour un jeune musicien d'accéder au sommet reste semée d'embuches. Il ne suffit plus d'avoir gagné un concours ou d'être endossé par une multinationale du disque. Il faut se renouveler, multiplier les contacts, susciter les occasions d'aller chercher un nouveau public, le convaincre de revenir en salle... mais il semble bien que le jeu en vaille encore la chandelle!

lundi 11 janvier 2010

Écrire le deuil

Après l'effervescence de Thomas s'en fout, j'ai abordé un univers complètement différent, avec deux auteurs qui, à première vue, n'ont rien en commun et qui, pourtant, ont intégré le deuil à leurs écrits: Vénus Khoury Ghata, née au Liban mais vivant en France depuis des années et Jean-François Beauchemin.

Khoury Ghata intègre à son roman La maison aux orties sa mère, son mari et son frère disparus, de façon si intime qu'on ne réussit plus à dissocier la part de vérité de la fiction. « Ce que j'appelle mes romans est écrit impulsivement comme on crie. Je couds tel un patchwork des morceaux de ma vie, fais de mes amis des personnages. Tant pis pour ceux qui se reconnaissent. Mon écriture ne va pas au-delà de ma peau et des maisons que j'ai habitées. » (p. 18) On plonge dans un univers où la frontière entre l'ici et l'au-delà n'est que symbolique, le passé rejoignant le présent, les morts dialoguant avec les vivants, dans un émouvant texte qui nous enveloppe comme un châle qu'on se transmettrait de génération en génération.

Dans Cette année s'envole ma jeunesse, Jean-François Beauchemin retrace avec beaucoup de sensibilité le deuil qu'il a dû faire de sa mère, au fil de quatre saisons qui le voit se transformer presque imperceptiblement sous nos yeux. Il évoque sa mère en gestes légers, en mouvements infimes, pour extraire la profondeur du lien qui les unit. Cela donne aussi place à de très belles pages sur l'écriture elle-même, traduites dans la langue si poétique qui reste la sienne.« On croit à tort que les artistes pansent leurs blessures avec leur œuvre. Mais le bel arc de la sculpture, la phrase touchante du livre, l’inoubliable note de la chanson, toutes ces empreintes laissées sur les sens ne sont jamais que d’autres larmes, d’autres cris et d’autres appels. » (p. 49)

Les hasards de la vie ont fait que, cette même semaine, j'ai dû assister à des funérailles. Comme quoi, parfois, la vie se veut prolongement de la fiction...

vendredi 8 janvier 2010

Ouf...

C'est moi où l'année 2010 a commencé sur le chapeau des roues? Déjà que j'avais omis d'inclure une ou deux journées de lézardage pendant la période des fêtes. (Comment oser écrire le « congé des fêtes » après ça?) L'année prochaine, apprendrai-je enfin de mes erreurs?

J'ai été plongée dans deux univers entièrement différents cette semaine, à des lieues l'un de l'autre: la musique de scène de Purcell (des notes de programme pour le prochain concert de l'Orchestre baroque Arion) et la musique du compositeur contemporain Arvo Pärt, né en Estonie mais vivant maintenant à Berlin. J'ai donc pu m'approprier certains codes du théâtre baroque anglais (le deus ex machina, c'est de là que ça vient) pour mieux comprendre comment la musique s'inscrivait en filigrane. (Les Anglais pratiquaient notamment le semi-opéra, très proche de la comédie musicale actuelle.) En parallèle, je me suis appropriée la philosophie de création bien particulière d'Arvo Pärt, qui recherche dans quelques notes, l'essence même de l'existence. « Si quelqu’un cherche à me comprendre, il doit écouter ma musique. S’il cherche à connaître ma philosophie, il devra alors lire n’importe lequel des pères de l’Église. S’il souhaite connaître ma vie, il y a des choses que je tiens à garder secrètes », confiait-il lors d'une rare entrevue.

J'ai notamment déniché cette entrevue qu'il avait accordée à Björk il y a une dizaine d'années... Inspirant!


On retrouve aussi le compositeur dans ce clip fascinant, alors qu'il décortique sa pièce Für Alina.

mardi 5 janvier 2010

Thomas s'en fout


J'ai hésité, tergiversé... Franchirais-je le cap de la nouvelle année dans l'intensité ou dans le rire? Pour m'y accompagner, deux livres offerts par des amis, l'un coup de cœur de Katch qui me l'avait remis lors de mon périple parisien, l'autre cadeau impromptu de Wictoria, avec qui j'avais déjeuné et rigolé, à Paris aussi, arrivé pile le jour de mon anniversaire. Les deux livres me sont passés dans les mains et, finalement, j'ai choisi les bulles (Thomas s'en fout) avant l'introspection (La maison aux orties).

Premier ouvrage de Thierry Wojciak, journaliste de son métier, spécialiste en publicité et médias, Thomas s'en fout se veut un portrait assez décapant de ce milieu. Avec une plume enlevée et souvent délicieusement acerbe, l'auteur en décortique les rouages et nous offre une savoureuse galerie de personnages en échange. « 10h39. Toujours les mêmes gestes, tous les matins. J'allume mon ordinateur, je m'assois et j'attends. Un regard sur ma droite et c'est ma consœur (il y a de ces mots dans la langue française, tout de même...) Sophie que je vois. Une fille grande, sympathique et vivante. Le genre de fille qui a bien compris l'usage convulsif que l'on peut faire de la parole. De la moindre de vos interrogations (existentielles ou pas) elle vous transforme la vie en vaste encyclopédie de l'opinion et des certitudes. Avec elle, je ne pense tout haut qu'en solitaire. Un plaisir rare. » (p. 9)

Les phrases sont courtes, punch, se laissent déguster avec un plaisir presque coupable. «... verbe facile, cravate dénouée méthodiquement et particulièrement sûr de son fait et de ses capacités, l'individu injecte son monologue assommant comme il enfilerait des perles en cristal sur un cactus géant dans une auto tamponneuse un samedi soir à la foire du Trône. » (p. 107) On réalise aussi que, au final, que l'on couvre la scène musicale ou la publicité, les codes de langage peuvent différer (les mots « buzz ») mais les magouilles et la sensation de vide vertigineux qui nous assaille lors d'un lancement ou d'une conférence de presse sont quasi identiques. Les défis quand viennent le temps de rédiger aussi: « Je commence mon topo relativement exhaustif de ces quatre derniers jours. Entre exagération et sous-estimation, j'arrive à un degré de vérité proche de la réalité. Je suis fatigué. » (p. 100) Par moments, j'ai cru lire de la chick lit mais pour hommes et je dois bien admettre que l'impression était plutôt favorable. Occultés les stéréotypes de princes charmants et de jeunes filles éplorées! Oublions les « ils vécurent heureux et eurent de nombreux enfants » et optons plutôt pour la vraie vie.

Quelques réserves sur le travail de relecture. On aurait dû être plus vigilants sur l'utilisation parfois désordonnée des majuscules et la disparition un peu aléatoire de certains traits d'union. Le découpage en segments d'heures précis (10 h 38, 10 h 40, etc.) devient aussi plus ou moins inutile et je l'ai ignoré systématiquement après un moment (sauf le premier du chapitre, histoire de situer le moment).

Merci à Wictoria pour cette découverte! Serais-je la première lectrice québécoise de l'auteur? C'est bien possible... Le blogue du livre, qui permet de le commander...

lundi 4 janvier 2010

Choc

Retour à la « vraie vie » ce matin, ce qui veut dire des recherches Internet afin de pouvoir rédiger mes prochaines notes de programme et alimenter le blogue Analekta en nouveautés (dont l'annonce du premier concert de l'Orchestre national de diffusion du Canada sur Internet, le 8 janvier prochain). Et là, paf, jab à la mâchoire, j'apprends la mort de Lhasa de Sela des suites du cancer du sein. Et moi qui pensais vous parler d'une lecture « légère » ce matin, je repasserai...

Je ne suis peut-être pas une vraie fan mais me souviens encore avec émotion d'un concert de l'artiste, en tout début de sa carrière: une voix si particulière, presque ensorcelante, une présence scénique comme bien peu d'autres et un univers presque magique. Vous pouvez lire la nouvelle dans La Presse ici. Je vous laisse plutôt en compagnie de sa voix, qui transcende un texte essentiel, My Name... Les paroles sont ici.

EDIT: Claudio, qui la connaissait mieux que moi, lui rend hommage par là...

samedi 2 janvier 2010

Liste de lectures 2009

Tournant d'année oblige, voici le temps venu de l'archivage. (C'est le moment de l'année où je réalise que je n'ai pas toujours mis les liens vers les billets dans la catégorie « lectures commentées », oups... et promets de faire mieux l'année suivante.)

Vous trouverez ici les titres lus en 2009 (90, excluant ouvrages musicologiques, mais un ou deux titres aurait pu m'échapper, la perfection n'étant pas de ce monde), en ordre alphabétique d'auteur, avec leur cote, de 1 à 5 étoiles. Le maximum atteint cette année étant ****, il semble donc que je ne puisse pas parler d'un livre « coup de cœur absolu » 2009. En cliquant sur les titres surlignés, vous pouvez accéder à mes commentaires de lecture à leur sujet. On repart à neuf (à dix? bon, ça va, j'ai compris, j'arrête...)!

Sait Faik Abasiyanik, Une histoire pour deux ***
Anaïs Airelle, Pourquoi j'meurs tout l'temps ***
Emmanuel Aquin, Phénix ***1/2
Paul Auster, L'invention de la solitude ****
Paul Auster, Seul dans le noir ***1/2
Melissa Bank, Manuel de chasse et de pêche à l'usage des filles ***1/2
Jean Barbe, Le travail de l'huître ****
Jean-François Beauchemin, La fabrication de l'aube *** 1/2
John Berendt, La cité des anges déchus *** 1/2
Thomas Bernhard, Le naufragé ***
Pierre Bettencourt, L'intouchable *** 1/2
Neil Bissondath, Cartes postales de l'enfer ***1/2
Christian Bobin, Geai *** 1/2
Heinrich Böll, L'honneur perdu de Katharina Blum ** 1/2
Roxane Bouchard, Whisky et paraboles ***1/2
Françoise Bouffière, La louée ***
André Brink, Appassionata ***
Emmanuel Carrère, D'autres vies que la mienne ****
Annie Cloutier, Ce qui s'endigue ***
Normand Corbeil, Ma reine ***
Reine-Aimée Côté, L'échappée des dieux ***
Catherine David, La beauté du geste ***
Philippe Delerm, Le bonheur ***
Michael Delisle, Helen avec un secret ***
Constance de Salm, Vingt-quatre heures d'une femme sensible ***
Nicolas Dickner, Tarmac *** 1/2
Hedwig Dohm, Deviens celle que tu es *** 1/2
Danielle Dumais, La femme fragment ***
Éric Dupont, Bestiaire *** 1/2
Mylène Durand, L'immense abandon des plages ***1/2
Jean Echenoz, Je m'en vais **1/2
Will Eisner, New York Trilogie (La ville) ***
R.J. Ellory, Seul le silence ****
Alain Farah, Matamore no 29 ***
David Fitoussi, La bar-mitsva de Samuel **1/2
Jacques Flamand, Les décombres de la beauté ***
David Foenkinos, Nos séparations ***
Robbert Fortin, Personne n'a trouvé d'angle à la beauté *** 1/2
Marie-Noëlle Gagnon, L'hiver retrouvé ***
Pascal Garnier, Lune captive dans un oeil mort ***
André Gide, Les nourritures terrestres ***
Nicolas Gilbert, Le joueur de triangle *** 1/2
Nicolas Gilbert, Le récital *** 1/2
Denis Grozdanovitch, Minuscules extases ***
Violaine Guillerm, Prêts longtemps ***
Khaled Hosseini, Mille soleils splendides *** 1/2
Julie Hubert, Les retrouvailles ***
Nancy Huston, La virevolte ***1/2
Suzanne Jacob, Histoires de s'entendre ***
Henry James, Le motif dans le tapis ***
Michel Jean, Envoyé spécial ***
Michel Jean, Un monde mort comme la lune ***
Natalie Jean, Je jette mes ongles par la fenêtre ***
Gilles Jobidon, Morphoses ***1/2
Yasmina Khadra, Ce que le jour doit à la nuit ****
Dany Laferrière, L'énigme du retour ****
Robert Lalonde, Un coeur rouge dans la glace ****
Thérèse Lamartine, Soudoyer Dieu ***
Antoine Laurain, Carrefour des nostalgies ***1/2
Dominique Lauzon, Au milieu de nous sans équivoque ***1/2
Alexandre Lazaridès, Adieu vert paradis ***1/2
Morgan Le Thiec, Les petites filles dans leurs papiers de soie ***
François Lévesque, Un automne écarlate ***
Maia Loinaz, La massothérapeute ***
Amélie Mainville, La vie musicale à Trois-Rivières ***
Marsi, Miam miam fléau ***
Patrice Martin, Le chapeau de Kafka ***
Christian Mistral, Léon, Coco et Mulligan ***
Nattiez, Boulez et Bonnefoy, Quêtes d'absolus ****
Joyce Carol Oates, Fille noire, fille blanche ***
Éloi Paré, Sonate en fou mineur ***
Jacques Poulin, L'anglais n'est pas une langue magique ***1/2
Pascale Quiviger, La maison des temps rompus *** 1/2
Atiq Rahimi, Syngué sabour ***1/2
Jean Renaud, Le camée et le bustier **1/2
Rainer Maria Rilke, Lettres à un jeune poète *** 1/2
Bernhard Schlink, Le liseur ***
John Steinbeck, À l'est d'Eden ****
Richard Ste-Marie, Un ménage rouge ***
Patrick Süskind et Sempé, L'histoire de Monsieur Sommer ***
Rabindranath Tagore, Les oiseaux de passage ****
Olivia Tapiero, Le rêve et l'enfermement *** 1/2
Olivia Tapiero, Les Murs
Tesson, Les arts plumitifs ***
Tzvetan Todorov, La littérature en péril ***
Benoît Trottier, Des nouvelles de Pickton Vale ** 1/2
Danielle Trussart, Le train pour Samarcande ** 1/2
Oscar Wilde, Le portrait de Dorian Gray *** 1/2
Stefan Zweig, Amok ***

vendredi 1 janvier 2010

Et si on y croyait...

Pour amorcer la nouvelle année, pourquoi ne pas joindre notre vie à celle de gens de 156 pays différents et entonner All you need is love... Et si on y mettait toute notre conviction, aujourd'hui mais aussi tout le reste de l'année?

Changer le monde, un petit geste à la fois, c'est possible! Bonne année 2010!