Voilà un autre de ces livres qui alourdissaient dangereusement ma valise au retour de Paris, ville-lumière mais surtout ville de librairies plus tentantes les unes que les autres. Encore une fois, une histoire bien particulière derrière celui-ci. Vous me direz, les yeux levés au ciel, que, évidemment, il y a toujours une histoire derrière un roman! Mais non, je parlais de l'histoire qui a entouré l'acquisition de l'objet lui-même.
Travelling arrière, terrasse d'un café sympa, situé à quelques pas de la fontaine Saint-Michel. Je retrouve Caro[line] et Auteur Chouchou no 2 pour l'apéro. Je suis légèrement intimidée parce que, si je connais assez bien David Foenkinos (Auteur chouchou no 1), je n'ai rien lu de Nicolas Cauchy, celui-là même que je rencontrerai cette fois. Loin de s'en offusquer, il me tendra une copie dédicacée de son premier roman, avec une référence musicale charmante. Au fil des instants passés en sa compagnie, j'ai pu découvrir un être sensible, ouvert à la littérature des autres, avec un gros faible pour Brahms. (L'air de rien, il l'a glissé, comme ça, en page 109, dans un charmant passage, qu'il a identifié d'un astérisque complice, comme si j'allais passer à côté d'un tel clin d'œil!) J'avais donc hâte de découvrir le texte derrière l'auteur.
La véritable histoire de mon père est un roman coup de poing, soutenu par une écriture particulièrement efficace, d'une sobriété remarquable, maniée comme un scalpel. Dès les premières pages, nous basculons dans l'horreur. Simon, un carriériste type, ambitieux, a commis l'irréparable. « Vous avez mené votre carrière de main de maître, gravissant les échelons quatre à quatre, sans hargne ni revanche à prendre, mais rapidement, avec élégance même. Pensant qu'il suffisait de pourvoir aux besoins matériels de votre famille pour être un bon père, un bon époux. Une excuse plutôt pour justifier votre absence, l'échec de votre premier mariage. » (p. 23) Dans un moment d'égarement qui nous échappe alors, il a mis fin à la vie de son enfant et a pris la fuite au volant d'une Porsche volée à l'un de ses copains friqués, en visite chez lui.
La donne est connue du lecteur et nous devons accepter de monter à bord de la voiture du criminel qui nous racontera, par pans, les instants qui ont précédé et immédiatement suivi cette minute fatidique, les années d'insatisfaction, les hésitations paternelles, les révélations aussi face à ces deux filles qui lui ont toujours échappées. Déclinée au vous, l'histoire se révèle peu à peu, pas du tout celle que l'on croyait au début. Le narrateur nous harangue-t-il? Se semonce-t-il? On hésite, on se questionne, on trépigne, on se révolte. Malgré la multiplicité des signaux, on le suit pourtant dans cette course folle qui ne peut que le mener vers l'expiation.
Tous les indices ont pourtant été semés pour que le lecteur comprenne l'effroyable mais limpide conclusion mais, le cœur presque au bord des lèvres, on n'est pas encore prêt à accepter, à ouvrir les yeux, comme lorsqu'on monte, plus de gré que de force, dans une montagne russe redoutable.
Nicolas Cauchy signe ici un premier roman parfaitement maîtrisé, comme il y en a trop peu, que j'ai lu d'une traite parce qu'il m'était impossible de m'en extirper. La route est tantôt sombre, tantôt lumineuse. L'horreur cède parfois la place à la tendresse. La petite musique d'une vie est bien présente, déchirante, pas toujours harmonieuse. Pourtant, elle ne laisse pas indifférent.
Une entrevue avec l'auteur ici. Pour découvrir son site, c'est par là.
4 commentaires:
J'imagine que cela t'a donné le goût de lire De manière à connaître le jour et l'heure ?
Bon ben... il va falloir que je lise celui-là aussi!!! iL était noté en pâle... mais on va le souligner!!!
Venise: peut-être pas à la seconde même mais, oui, je suis suffisamment convaincue pour lire son autre roman. Il a aussi écrit plusieurs livres pour enfants.
Karine: je pourrai te le prêter s'il ne croise pas ta route. ;-)
Me voilà ravie ! ;-)
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