mercredi 5 août 2009

Youth Orchestra of the Americas

Je sais, je vous ai peu négligés ces derniers jours mais c'est bien parce que même mes journées n'ont que 24 heures et que, en plus de gérer les impondérables du travail, j'ai été promue guide touristique depuis quelques jours. Enfin, presque... L'Europe vient à moi en la présence de deux amis pianistes, l'un allemand, l'autre française, et je me balade donc aux quatre coins de la ville et fais même, comme hier soir, des détours par Knowlton. (Les heures consacrées à la lecture ont également été particulièrement rares, vous le comprendrez aisément.)

Hier soir, le Festival de Knowlton présentait, en avant-première, le Youth Orchestra of the Americas, un orchestre international de jeunes musiciens triés sur le volet, fondé en 2001 par le New England Conservatory and Vision. Représentant une vingtaine de pays des Amériques, les jeunes musiciens retenus après des auditions serrées profitent d'un programme de deux semaines intensives de répétitions, menées par certains des instrumentistes et des chefs les plus reconnus, avant de partir en tournée pendant deux à trois semaines (cette année aux États-Unis et au Canada).

Sous la direction particulièrement convaincante et subtile du chef mexicain Carlos Miguel Prieto, ils ont joué avec un aplomb et une clarté d'élocution remarquables. Quelques minimes bavures au niveau du synchronisme ou de la justesse n'ont rien enlevé au plaisir de l'écoute, tant lors de l'étourdissante Bootlegger's Tarentella de John Estacio que de l'éternelle Symphonie du Nouveau Monde de Dvořák. Les cuivres brillaient, le solo de cor anglais du mouvement lent était poétique et on ne pouvait qu'être happé par la gestique du chef.

En fin de première partie, la pianiste Gabriela Montero a interprété le Deuxième Concerto de Rachmaninov, certes une des pages les plus aimées du répertoire concertant. Les tempi étaient par moment un peu lourds (notamment dans le fameux passage d'accords massifs du premier mouvement), les phrasés pas toujours poétiques et le son parfois forcé (peut-être était-ce aussi dû à l'acoustique particulière d'un chapiteau en plein air) mais elle a su créer un instant de beauté presque ethérée à la fin du deuxième mouvement. Coupant court aux applaudissements fournis, elle est revenue sur scène, a souligné l'anniversaire d'une amie de l'orchestre et, après que les musiciens eurent énoncé le thème de Happy Birthday, elle s'est lancée dans une improvisation remarquable sur ce thème qu'on aurait pu croire éculé, dans laquelle elle a tour à tour intégré références au romantisme, au contrepoint, au tango et aux danses sud-américaines. Les contrechants se multipliaient, les voix étaient menées de façon admirable en toute circonstances, la rythmique demeurait irréprochable et une profonde compréhension des structures transparaissait en tout temps. Autant le concerto m'avait laissé mitigée, autant ces quelques minutes m'ont soulevée.

Généreux, les musiciens et le chef ont offert deux rappels: la magnifique Danzon no 2 d'Arturo Marquez et une version décoiffante de Tico, tico, sur laquelle plusieurs festivaliers ont dansé avec un plaisir non feint, enchaînant les chaînes, les déhanchements et les sourires. La météo avait collaboré jusque là mais, une fois les derniers applaudissements éteints, un orage remarquable a tenu à se faire remarquer. Vile jalousie, sans aucun doute, face au succès remporté par les jeunes musiciens. En rigolant, nous avons attendu patiemment notre tour pour intégrer une des navettes (quatre autobus scolaires), symboliquement protégés par quelques parapluies fournis par le festival. L'atmosphère bon enfant qui régnait aurait réconcilié les spécialistes les plus irrascibles avec le plaisir brut d'avoir assisté à un événement. Mon rendez-vous est pris: j'y retourne la semaine prochaine pour le récital de Kovacevich!

4 commentaires:

wictoria a dit…

nous comprenons aisément combien les journées sont courtes ! lire ceci me laisse penser que tu as pris encore bien du temps à nous relater l'ambiance que j'ai peine à imaginer tant je suis nulle en musique, mais déjà, je me rapproche et j'entends de mieux en mieux :)

Lucie a dit…

Tu aurais adoré ce concert, très ouvert à plus d'un point de vue! Une initiation idéale...

Claudio Pinto a dit…

Chaque mot, chaque syllabe que tu écris dans ce billet est authentiquement fidèle à ce que j'ai vu et entendu là-bas en ta compagnie.

Lucie a dit…

On verra si nos impressions concorderont pour Kovacevich! ;-)