jeudi 14 octobre 2010

La pureté

Certains livres ont besoin d'être avalés d'un seul coup, d'autres décantés. Quelques jours après, qu'en restera-t-il, que voudra-t-on en transmettre? Souhaite-t-on le faire lire par notre meilleur ami? Autant de questions qui n'ont pas trouvé de réponse claire, une fois refermé le recueil de nouvelles La Pureté de Vincent Thibault, qui « consacre son temps au travail spirituel et à l'écriture », dixit le quatrième de couverture.

L'auteur a pris le délicat parti pris de rendre hommage à la subtilité et au minimalisme de la littérature japonaise, défendue admirablement par les Mishima, Ogawa ou Shimazaki. Pensez instants suspendus, haïkus, descriptions poétiques de petits riens. On suit ainsi le quotidien de l'initiateur d'une terrible attaque au sarin dans le métro de Tokyo (« La Pureté ») ou le curieux périple d'un homme qui ne sait comment se débarrasser d'un surnom qui lui colle à la peau (« Le navet »). On plonge dans le fantastique (« Le grain noir »), le polar presque romantique (« Naomi »), le constat social  (« Cent jours de neige ») et le quasi féerique dans « S'animer ». Bien sûr, je ne pouvais qu'être séduite par « Un air nouveau », dans lequel la musique joue un rôle essentiel, à la fois apaisant et douloureux, coup de cœur du recueil.

La question reste entière: était-il suffisant de situer ces nouvelles au Japon ou que le narrateur soit japonais (comme le moine bouddhiste de la novella « Le promeneur » dont la première de trois parties, zen bonbon, m'a horripilée, mais dont j'ai apprécié les deux autres tiers) pour que l'effluve si typique des littératures asiatiques soit perceptible? J'ai voulu y croire, m'y accrocher, mais l'illusion n'a pas fonctionné. Il aurait fallu une plume plus délicate peut-être, plus de sous-entendus, des silences prégnants, un minimalisme aux teintes délavées (je pense ici au Neige de Fermine, sommet du genre) et, surtout, occulter toute tournure québécoise des textes. Je reste pourtant convaincue que le style de l'auteur se prêterait bien à un propos plus ancré dans l'ici et l'aujourd'hui.

3 commentaires:

Venise a dit…

Tu donnes dans La Pureté mitigée, d'après ce que j'en lis.

Excellent commentaire avec ses quelques mots frappants pour décrire chaque nouvelle.

adrienne a dit…

oui je trouve aussi, je comprends bien ce que tu veux dire parce qu'il me semble que la lecture de ce livre m'aurait fait le même effet :-)

Lucie a dit…

Venise: Je suis mitigée en effet... je pense que c'était un peu trop « croissance personnelle » rencontre faux minimalisme japonais pour moi. En même temps, la plume de l'auteur était intéressante...

Adrienne: la promenade zen avec commentaires du type « je regarde la roche et me rappelle la fragilité de mon existence et la solidité de la terre » (paraphrase totale) m'a vraiment fait tiquer mais certaines nouvelles m'ont néanmoins beaucoup plu.