jeudi 6 janvier 2011

Leçons d'étiquette

Je dois être devenue trop vieille, ringarde, dépassée. Cela vient peut-être du fait que je fréquente la musique classique depuis que je suis née ou presque. Mais n'y aurait-il quand même pas moyen pour les professeurs de donner une ou deux leçons d'étiquette de concert à leurs élèves?

J'accompagnais un saxophoniste lors d'un récital-midi dans une polyvalente offrant une concentration musique, dans une banlieue relativement à l'aise. On s'entend que, en principe, à moins que je n'aie vraiment pas saisi ce que représentait une concentration musique, on devrait avoir affaire à des élèves qui sont sensibilisés à la pratique musicale, non? Est-ce rêver éveillé que de considérer une écoute minimale comme étant espérée? Je me doute bien qu'une sonatine de Schubert, pourtant remarquable d'ingéniosité, ne les comblera peut-être pas d'extase. Mais n'aurait-il pas été possible - ou même souhaitable - que le professeur responsable (parce que, oui, un professeur accompagnait les élèves au concert) explique de façon ludique mais ferme certaines règles de base?

Ce n'est pas la première - ni la dernière fois - que je jouerai dans des conditions d'écoute déplorables. Quiconque a dû « tapisser » un vernissage ou tout autre événement mondain (on accepte quelques compromis parfois pour mettre du beurre sur les nouilles) sait pertinemment que la musique ne devient alors qu'« ameublement ». Je me souviens d'avoir joué pour une amicale d'école primaire, il y a des années de cela, et d'avoir eu de la difficulté à me faire entendre au-dessus du babil (chahut serait peut-être un terme plus précis). Je me souviens aussi que la classe d'élèves de 10 ans qui attendait alors à l'arrière-scène de présenter une courte pièce de théâtre avaient été complètement révoltés que « les adultes n'écoutaient pas ».

En dépit de tout cela, j'ai réussi à bloquer de mon champ de vision et de mon espace mental tous ceux qui gigotaient comme des poux dans les premiers rangs. Je retiendrai plutôt des échanges musicaux réussis entre les deux instruments, le plaisir de défendre un répertoire dense et, pourquoi pas, les sifflets d'encouragement entre les pièces. « On vous aime! » Mais eux, qu'auront-ils retenu de l'expérience? Bien malin qui pourrait le dire.

6 commentaires:

Adrienne a dit…

hé oui, nous avons déjà débattu de cela ici, n'est-ce pas...
c'est dommage, une occasion manquée, et c'est dommage, un prof qui baisse les bras et "laisse faire"...
mais nous on continue le combat, non?
;-)

Lucie a dit…

Oui, ce qui m'attriste le plus est bien que le prof s'en fiche et que le responsable du programme nous ait gratifié à la fin du concert d'un « Au moins, cela vous aura servi de répétition pour votre prochain récital », après que tous les élèves se soient envolés comme des supersoniques au son de la cloche, alors qu'il restait moins de 30 secondes de musique au concert.

Disons que je trouvais mon premier élève de l'année divinement charmant en après-midi après cela!

Margotte a dit…

Attention ! Sujet brûlant ! Je me suis déjà "heurtée" avec des collègues qui ne tenaient pas leur classe dans des lieux publics... Je trouve cela d'une impolitesse... comme certains élèves d'ailleurs, souvent très choqués de voir d'autres gamins de leur âge qui ne savent pas se tenir !!! Pas facile sûrement, de jouer dans ces conditions là : mais cela veut dire que tu es une vraie "pro", adaptable à toutes les situations ;-)

Lucie a dit…

Oui, sujet brûlant, sans aucun doute. La politesse n'est pas une innée, il faut l'inculquer, et si les parents et les profs ne le font pas, alors, qu'espérer?

L'adaptabilité est une qualité essentielle pour faire de la musique de chambre, alors, oui, j'ai réussi à me protéger (et protéger la musique) dans une bulle. ;-)

Marie a dit…

Bravo pour la bulle, Lucie, et bravo pour avoir osé y croire !... Je n'ai pas été aussi blindée que toi dans de pareilles circonstances. L'épreuve est toujours rude. Donner sans recevoir, c'est dur pour le moral. On peut toujours espérer que, secrètement, un être perdu dans la horde des adolescents se soit laissé toucher, atteindre, émouvoir... Un seul et ce serait déjà une petite consolation.

Lucie a dit…

Aurons-nous réussi à en accrocher un seul? Je ne sais pas... mais, au moins, à certains moments, il y avait une certaine qualité d'écoute (ou ils dormaient tous en même temps).