Soir de fête hier pour les gourmands, avec deux pages concertantes pour violon interprétées par Joshua Bell en première partie et la monumentale Turangalîla de Messiaen en seconde. Je ne propose pas ici une critique objective, d'une part parce que l'OSM est l'un de mes clients (j'écris notamment des notes de programme pour l'orchestre et suis très impliquée dans ses Matinées jeunesse), mais surtout parce que tous dans la salle (ou presque) semblaient en période d'apprivoisement de la salle. Les têtes se déplaçaient de gauche à droite, histoire de bien apprécier les moindres détails architecturaux, particulièrement dans la symphonie (qui a semblé en déconcerter plusieurs qui ont décidé de quitter après 5 ou 6 des 10 mouvements) et certains n'ont pas encore saisi que, si oui, avant, il était peut-être possible de chuchoter et d'échanger sur les Ondes Martenot avec son voisin, eh bien là, dis donc, c'est que tout le monde vous entend!(Pour la petite histoire, je serais bien partie avec, ces Ondes Martenot, histoire de les apprivoiser un peu moi-même!)
Cette soirée en aura été une d'opposés. En première partie, Joshua Bell a prouvé qu'il n'était pas que beau gosse (entendons-nous ici, il vieillit plutôt bien et semble charmant en vrai, comme quelques curieux ont pu le constater alors qu'à l'entracte, il est tout bonnement venu prendre un verre à l'un des bars de la salle), mais sait faire parler son instrument (même s'il n'a pas offert une interprétation parfaite, loin de là). Sa « Méditation » extrait de Souvenir d'un lieu cher de Tchaïkovski ruisselait de poésie et de délicatesse. Cela faisait longtemps que je n'avais entendu quelqu'un porter autant de soin aux fins de phrases, sculpter chaque note, respirer selon le phrasé, prendre le temps de laisser la musique toucher l'âme de l'auditeur. Autre moment suspendu: sa cadence du Concerto de Glazounov, absolument magique, accueillie par un silence religieux exemplaire.
En seconde partie, autre époque, autre univers, l'orchestre augmenté à plus de 100 musiciens nous offrent la Turangalïla Messiaen, entre mots d'amour murmurés et exubérance la plus totale, des pianissimos aux derniers méga fortissimos de la fin des cinquième et dernier mouvements, qui donnaient une impression de jouissance presque physique à l'auditeur. (Une dame à deux rangées de moi avait plutôt l'impression que c'était trop, puisqu'elle s'est couvert les oreilles à la toute fin, mais bon...) Écouter une symphonie de cette ampleur « le son dans le tapis », c'est quand même autre chose. Oui, il y aura des ajustements à faire au niveau de la réverbération parfois excessive du son (l'acousticien était d'ailleurs au poste hier soir, encore une fois), les musiciens devront apprendre à calibrer leurs attaques autrement, mais aucun regret possible ici, une autre histoire s'amorce et c'est tant mieux.
La critique de M. Gingras de La Presse...
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