mercredi 15 juillet 2015

Marise Belletête recrue de juillet

« Lui, peut-être, peut-être qu’il le savait, peut-être qu’il devenait peu à peu un conte pour les autres en oubliant de se plier au réel, en égratignant les souvenirs, en confondant les noms. Par l’écriture, qui rafistolait sa mémoire, il comblait les trous intimidants dans lesquels il craignait de s’abîmer. Tout devenait fiction. Tout devenait vérité. Il se reconstituait au plus vite. Jusqu’à ce que cela devienne vain et lui fasse plus de mal que de bien. »
Les contes jouent un rôle clé dans L’haleine de la Carabosse de Marise Belletête, notre recrue ce mois-ci. Ils permettront notamment à sa narratrice, Ève, de s’émanciper de l’emprise oppressante de sa mère et d’apprivoiser les ombres laissées par ce père parti jadis aux quatre coins du monde transcrire dans son journal les histoires des autres, celles que l’on se raconte le soir au coin du feu, pour oublier notre quotidien, mais aussi pour mieux se comprendre.
Dans son deuxième roman, La marchande de sable, notre ancienne recrue Katia Belkhodja use d’un stratagème semblable, détournant l’essence même de la conteuse Shéhérazade. La fable qu’elle nous propose, qui peut évoquer le désert aussi bien que les grands espaces gelés, favorise les interprétations multiples, une lecture presque contre le grain du texte.
Play Boys de Ghayas Hachem lui aussi s’amuse à détourner les frontières entre les univers, jeu et réalité, guerre réelle et fantasmée. Comme ces adolescents, le narrateur de Même ceux qui s’appellent Marcel de Thomas O. St-Pierre semble à première vue désabusé, en quête d’une identité qu’il peine à cerner. Il est intéressant de juxtaposer son destin à celui de l’héroïne d’un premier roman mythique, L’avalée des avalés de Réjean Ducharme. Bérénice aussi se révoltait contre les horreurs d’un monde qu’elle considérait en perdition. Les temps ont-ils tant changé au fond? Ces titres ont été lus par deux nouveaux collaborateurs, Normand Babin et Charles-David Tremblay, que je me réjouis de voir rejoindre notre équipe de passionnés. Bienvenue à vous deux!
Juillet est synonyme pour plusieurs de vacances. Vous pourrez également choisir de vous évader avec Les Inuits résistants! d’Anne Pélouas, entre essai et récit d’aventures, ou à travers les haïkus du recueil Soupçon de lumière de Danielle Delorme, autant d’instantanés nous rappelant la merveilleuse fragilité de cette vie qui trop souvent nous échappe.

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