« Ce que je touche s’écroule », écrit Kafka dans son journal. Si je fais mienne cette phrase, c’est en pensant au présent. Le passé, le nôtre, qui ne fut pas toujours rose, avait une réalité que le présent n’a plus. Je me sens amputé. J’ai perdu le seul être au monde avec qui je pouvais converser même dans le silence. Voilà pourquoi je sens le besoin de ne pas me taire.
D'entrée de jeu ou presque, ce récit d'une tristesse et d'une tendresse entièrement assumées nous happe, nous bouleverse. On ne saura au final que bien peu de choses de l'aimée, cette femme avec laquelle Gilles Archambault a vécu pendant un demi-siècle, et c'est tant mieux. On comprendra pourtant à mots couverts que, même s'il ne lui a pas toujours dit, qu'il a préféré parfois se réfugier dans le travail ou l'écriture, il l'a chérie profondément. Sobres, délicates, refusant de tomber dans le pathos, ces pages dans lesquelles il apprivoise avec difficulté la solitude émeuvent certes, mais elles démontrent avec éloquence son indéniable maîtrise de la langue.
On fermera le livre en rêvant d'un amour comme celui-là, en apparence banal, pourtant fondateur.« Vous continuez d’écrire? » m’a-t-on demandé hier.
Nulle agressivité dans le ton. Je ne pas que répondre. Je finis par dire que, puisque la vie me paraît vaine, l’écriture peut me servir. L’espace d’un instant, la recherche d’un mot, le souci de fuir l’apitoiement me distraira peut-être de mon désarroi.
5 commentaires:
Ca semble très beau... Tout comme la couverture qui attire l’œil. Je le note.
Oui, ça l'est... et c'est vrai que la couverture est très belle. C'est le détail d'une toile de Stuart Slind, Waterlands.
Oui, en effet, la couverture est magnifique. Par contre, je ne sais pas trop si c'est pour moi, les trucs vécu, je ne sais trop.
Et bon, totalement hors sujet, as-tu lu "Corps et âme" de Frank Conroy? Je l'ai lu récemment et je me demandais ce que tu en avais pensé.
C'est clair que c'est dans la catégorie « histoire vraie », mais ça reste un objet littéraire.
Je viens d'aller lire sur Corps et âme. Je note, merci! :)
Je partage avec Lucie. Ce livre est avant tout de la pure littérature, avant d'être un témoignage. Les mots qu'il utilise nous mènent dans une dimension intemporelle, sur les ailes du récit et quasiment du roman. C'est à lire et à déguster lentement, un peu à la fois. En plus, la thématique est universelle, on est tous tôt ou tard touchés par le deuil.
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