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Chaque dessin devient une mini-histoire, dont les héros sont souvent des animaux ou des oiseaux, parfois traqués. Le rythme est effréné, prolongement de la trame sonore explosive de Louis Dufort, qui n'avait certes pas besoin d'être crachée à volume maximal. Deux instants de répit bienvenus pour les tympans nous donnent à voir Carol Prieur, qui se glisse sous le tapis de danse, comme si elle se dissimulait sous la tranche du livre (belle idée), pour nous déclamer, d'une voix tout sauf nuancée, un extrait du poème de Michaux et à entendre une lecture sentie, théâtrale, de la postface de Michaux.
Les oreilles et les yeux engourdis par tant de stimulations (on regarde le dessin de Michaux, on évalue l'intérêt de la relecture, parfois avec le sourire, autant d'instants volés très vite balayées par la prochaine offrande), on finit malheureusement par décrocher, relevant ici et là la façon dont Chouinard travestit un corps en y ajoutant des tissus noirs qui allongent les lignes ou la façon dont les cheveux qui s'agitent permet de retranscrire autrement un dessin. La fin, en négatif, les signes étant projetés blanc sur noir, les danseurs noyés par une lumière stroboscopique, mène néanmoins le spectateur vers un essentiel apex émotif.
Je te veux
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Les duos amoureux, tantôt érotiques, parfois vulgaires, se suivent, s'entrecroisent à des processions de groupes, l'apparition des bouffons au nez rouge, la juxtaposition de parades amoureuses entre hommes et femmes qui nous rapprochent du règne animal (clin d’œil indirect à la première proposition de la soirée). Les danseurs viennent saluer, on croit la soirée terminée. Certains se pressent vers la sortie, mais ils reviendront rapidement sur leurs pas, car il devient vite impossible de résister à cet immense post-scriptum volontiers cabotin, pendant lequel les danseurs se moquent aussi bien d'eux-mêmes que du langage chorégraphique, s'assoient au milieu du public, puis se lèvent pour applaudir de façon caricaturale quand ils ne se vautrent pas carrément sur les fauteuils en quelques poses incitant à la luxure. Sur scène, ils batifolent, se versent un verre, se mettent à fumer, dissertent dans le vide, trouvent de nouvelles utilités à un clavier électronique; le public rigole, avec l'impression d'avoir été invité à une représentation circassienne, se prend au jeu, devient partie intégrante du spectacle.
Vous avez encore deux soirs pour vous glisser en salle...
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