L'année s'achève déjà et vient l'heure des traditionnels bilans. Je n'oserai proposer un top 10, restant persuadée qu'il se transformerait en top 8 ou top 12. Plutôt quelques moments forts de l'année, classés dans quelques catégories pour la convenance.
Concerts classiques
Je vais ici paraître d'un snobisme involontaire, mais aucun doute dans mon esprit, si je ne devais retenir qu'un seul concert, il faudrait que ce soit celui du Philharmonique de Berlin en février. J'en ai parlé de vive voix des dizaines de fois depuis et le souvenir reste incroyablement vif: la cohésion de l'ensemble, le sourire comblé de Sir Simon Rattle quand il a cessé de diriger pendant une quinzaine de mesures dans Apollon Musagète de Stravinski, un son de hautbois comme je n'en ai jamais entendu auparavant dans ma vie (sublime Albrecht Mayer dans la Quatrième de Mahler!), mais surtout le plaisir évident qu'avaient les musiciens de jouer ensemble. De les voir se taper dans le dos avant de quitter la scène de la Philharmonie comme s'ils venaient de jouer un match de foot, ça n'avait pas de prix.
Sinon, je m'en voudrais d'oublier l'Appassionata de Pollini à Pleyel, le retour (après presque 45 ans!) du New York Philharmonic à Montréal, la poésie pure de Marc-André Hamelin avec l'OSM dans la Ballade de Fauré et les Variations symphoniques de Franck ainsi que le plaisir d'assister à la naissance d'une étoile en entendant Beatrice Rana, lauréate du grand prix du Concours Musical International de Montréal.
Opéra
Trois villes, trois coups de cœur. Je ne pourrai pas oublier Lulu de Berg, à l'Opéra de Paris, une œuvre que j'admire et que j'ai enfin pu voir sur scène dans une mise en scène qui magnifiait l'univers de l’œuvre. À Québec, il y aura eu cette présentation enchanteresse du Rossignol et autres fables de Stravinski, une réussite totale de Robert Lepage. À Montréal, je m'en voudrais de ne pas mentionner Arias, le spectacle 20e anniversaire de Chants libres, qui m'a fait regretter de ne pas avoir vu l'intégralité de la majorité des productions proposées. Je serai assurément dans la salle pour la première d'Alexandra, opéra consacré à l'exploratrice Alexandra David-Néel, à la mi-mai.
Autres musiques
Je serais tentée de faire mienne cette phrase que m'a récemment confiée l'altiste Antoine Tamestit: « J’ai toujours pensé que la musique, c’est toutes les musiques. » Fan convaincue du travail de Pierre Lapointe, j'ai pris plaisir à me glisser dans la galerie de l'UQAM lors de la première de son Conte crépusculaire, projet iconoclaste réalisé en collaboration avec David Altmejd, spectacle qui a ébranlé la critique qui n'a pas su réaliser qu'elle assistait à un événement unique.
Sinon, sur disque, j'ai craqué pour le travail de Francesco Tristano, entre musique classique et électro, la délicatesse du premier album de l'Epsen Eriksen Trio, les derniers albums de Yann Perreau (Un serpent sous les fleurs) et Philippe B (Variations fantômes), le piano planant d'Olafur Arnalds. Je ne peux pas passer sous silence mon plaisir coupable de l'année, Broken Hearts & Madmen du Gryphon Trio et Patricia O'Callaghan, que j'ai écouté un nombre incalculable de fois.
Expos
Là aussi, trois villes, trois expos. À Montréal, Big Bang (il vous reste jusqu'au 22 janvier pour y aller, n'hésitez pas, c'est gratuit! J'y retourne!), à Paris, Expressionismus Expressionismi à la Pinacothèque (jusqu'au 11 mars) et à New York, l'exposition Alexander McQueen, qui m'a permis de constater que la haute couture pouvait susciter des émotions autres que de l'admiration pour la finesse des détails.
Théâtre
Si je n'ai pas eu d'illumination cette année, quelques souvenirs puissants refont surface, par exemple la densité de Tom à la ferme de Michel Marc Bouchard qui, même si pas tout à fait aboutie, continue de me hanter et les coups de poing qu'ont été Temps de Wadji Mouawad et Trust du tandem Falk Richter et Anouk Van Dijk du Schaubühne Am Lehniner Platz de Berlin, présenté au Festival Transamériques.
Cinéma
Cela me permet de revenir encore une fois sur Pina de Wim Wenders, bien sûr. Je ne l'ai pas encore revu, mais ai depuis téléchargé la BO sur iTunes. J'adore!
Journalisme
Parce que je fais un métier quand même chouette, qui me permet de faire des rencontres (ne furent-elles que téléphoniques), qui me portent ailleurs, me font réfléchir, je ne peux passer cette catégorie sous silence. La pianiste ne peut oublier cette conversation avec Emanuel Ax (même si mon voyage en Allemagne m'a empêché d'entendre son récital Schubert). La fan a pris beaucoup de plaisir à écouter Pierre Lapointe parler de ses recherches et de la nécessité de renouveler la chanson française. Celle qui aime comprendre a apprécié cette rencontre sur la scène de la nouvelle Maison symphonique de Montréal avec l'acousticien Tateo Nakajima, Richard Roberts, Paul Merkelo et Marianne Perron (ce qui m'a permis d'être lue pour la première fois en sol britannique). La lectrice et l'artiste retiendront ce lunch passé en compagnie de Jean Derome, à parler de Kafka et des défis liés à la création.
Demain, l'année en lectures...
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