Avec ce premier roman, Geneviève Pettersen insuffle au roman d’apprentissage un certain parfum de terroir – ou plutôt de néoterroir. Comme son mari Samuel Archibald, la romancière a en effet choisi d’ancrer son personnage dans un lieu ciblé, à savoir le Saguenay, plus précisément en 1996, l’année du déluge. Dans une langue parlée volontiers rêche, débordante de régionalismes qui pourront déstabiliser certains lecteurs, mais finissent par devenir aplats de couleur locale, Pettersen trace le portrait d’une jeunesse pas tant désenchantée qu’en constante recherche de liberté, prête à tous les excès (mescaline, alcool, relations sexuelles) pour parvenir à se définir.Pour se fondre dans le sillage du personnage principal Catherine, qui lit Moi, Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée, comme d’autres feuillettent des revues pour adolescentes, il faut pratiquer un certain lâcher-prise : ne pas buter sur les termes qui nous échappent et viser la compréhension globale, se fondre dans l’oralité du texte, accepter de se laisser raconter une histoire puissante, qui trouve un écho chez l’adulte, même si de prime abord il peut avoir l’impression de ne pas entièrement s’y reconnaître.
Ici, le beau et le laid se côtoient, les filles et les garçons se confrontent, le grunge se superpose au bruit des multiples véhicules (pick-up, bus, ski-doo) et au martèlement des pas. On a l’impression de lire un journal intime – mieux de l’entendre –, ce qui ajoute une authenticité réelle au propos. Avec une force indéniable, la vie bat, la langue s’émancipe, l’arc narratif se tend et le rythme se bouscule, au fur et à mesure qu’approche le terrible dénouement.












