Récit de vie, récit d'écriture, ce livre de Sylvie Nicolas plonge au cœur même du geste, de sa naissance, de ses premiers balbutiements. Quand commence-t-on? Pourquoi ne peut-on pas s'empêcher de le faire? Une femme écrit, se raconte, évoque son passé, ses frères, sa mère et sa grand-mère, un amour déçu, autour duquel s'articule ces « variations », thème jamais entièrement énoncé (comme celui des Variations Enigma d'Elgar), tout comme reste volontairement floue la figure mythique de William Burroughs, spécialiste du cut-up (technique que Sylvie Nicolas maîtrise assurément), accusé de l'homicide involontaire de sa femme.
L'auteure possède un indéniable souffle poétique, une sensibilité souvent musicale, une façon de traiter les images de façon magistrale. Malgré la tristesse que l'on perçoit en filigrane (décès, départs, arrachements), il se veut surtout un immense hommage à la vie, à ces instants faits de presque riens (comme cette valise qui contenait tant d'inutiles trésors jadis) qui, au bout du compte, sont les seuls qui comptent.
« Si j’en avais eu la force, je t’aurais confié que l’écriture est en moi comme une enfant infirme, maintenue dans l’obscurité. Elle ne sait pas marcher. Ne sait pas parler. Elle est aveugle, sourde et muette. Sans destinée. Sans chemin. Elle craint ce qui l’entoure, se cambre, se rebelle, s’effondre. Elle est sauvage, animale, captive d’elle-même. Si elle était un personnage, elle serait Helen Keller. Elle avance à tâtons, se cogne partout, hurle, renverse ce qu’elle touche, fracasse ce qui l’entoure, se débat et retourne se blottir sous une table ou dans un coin. »
Lu dans le cadre de Québec en septembre, à suivre chez Karine...
3 commentaires:
J'aime bien ce passage. Il semble hachuré, presque haletant. Me voilà intriguée !
Je te le garde si tu veux! :)
Je l'ai énormément aimé ce roman! Ravie de voir qu'il t'a plu aussi!
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