vendredi 20 juin 2014

Tremblement de mère

Les histoires d’adoption internationale sont en général synonymes d’attente, de très longue attente : étude du dossier, amorce des procédures, rencontre du bébé dans un pays étranger. Quand, à 47 ans, Diane Lavoie réalise qu’elle ne pourra pas vivre sans enfant et contacte des agences d’adoption, elle se dit que des années passeront avant qu’elle ne tienne dans les siennes la main d’un enfant. Le destin en décidera autrement. Suite au tremblement de terre d’Haïti en janvier 2010, un peu plus de six mois après le dépôt de sa demande, Mélodine, trois ans, forcément bouleversée par les divers arrachements qu’elle a subis, débarque à Montréal. Pendant plus de deux mois, la petite hurlera toutes les nuits, la mère malgré elle se découvrant totalement impuissante face à tant de colère.

Impossible ici de porter des lunettes roses, de s’attendrir sur les premiers mots de l’enfant, les liens de confiance qui s’établissent. Épuisée par les nuits sans sommeil, l’impression d’être inadéquate, vivant en marge de la vie qui était la sienne, Diane se révèle désemparée. À bout de ressources, elle envisage le suicide et vivra une véritable descente aux enfers en institut psychiatrique.
« Je ne suis pas ce que tu souhaites, je le sais. Je ne suis pas la maman que tu veux. Je serai là pour toi, toujours. Je sais que tu veux ta maman, ton pays, les tiens, ta vie d’avant. Je sais que tu les pleures, car ils ne reviendront plus. Je prendrai ta peine, si tu veux bien me la donner, je prendrai tes deuils, si tu veux bien les partager. Je serai là pour toi, toujours. Je serai là pour toi, toujours. »

La plume alerte, jamais complaisante, de Diane Lavoie permet aux lecteurs de transcender les limites du témoignage. On perçoit l’adoption internationale autrement, mais on entre aussi de plain-pied dans les méandres de la détresse psychologique, sujet trop rarement abordé. Le livre se referme sur mère et fille apaisées, conscientes de l’importance du lien qui les unit désormais, soucieuses d’en préserver la nature intime. Un récit à la fois percutant et inspirant.

2 commentaires:

Karine:) a dit…

A cause de la couverture, je ne m'attendais pas du tout à ça... mais bizarrement, là, ça me tente. J'ai vu des histoires d'horreur d'adoption internationale... et du coup, je suis cuireuse.

Lucie a dit…

C'est vrai que la couverture n'est absolument pas représentative... C'est surtout ici que tout le monde peut s'y retrouver.