Un
après-midi paresseux d'été, quand le temps oscille au gré du vent et des
vaguelettes dansées par les pieds qui clapotent dans l'étang. Les citadins ont
pris possession du parc Lafontaine, l'utilisent pour échanger, lire, dormir,
oublier qu'à quelques dizaines de mètres à peine, la métropole continue à
s'agiter frénétiquement.
Ils sont deux, qui se retrouvent enfin, exaltés par l'instant. Ils rigolent
comme des adolescents en contemplant cette dame d'un âge certain qui semble
vouloir apprivoiser un des canards placides, s'attendrissent quand le chien
attend patiemment que sa balle revienne près du bord. Il glousse quand le petit
homme se lève du banc qui l'accueillait et fonce vers un ailleurs d'une
démarche chaloupée de top-modèle. Elle remarque le vieillard en chaise
roulante, vêtu de l'horrible chemise de nuit verte, en permission, qui fait le
tour du parc le sourire aux lèvres avant de retrouver lumière glauque et
couloirs javellisés.
Les minutes se sont liquéfiées en heures avant que l'appel du glacier ne se
fasse plus pressant. Ils reprennent le sentier quand, hypnotisés par le son
d'une suite pour violoncelle de Bach, ils bifurquent. L'instrumentiste est
assis sur un banc, son reflet se fondant dans l'onde alors que les notes
s'effilochent dans la douceur d'une fin d'après-midi. À ses côtés, en apparence
immobile, un badaud écoute, dans une pose qui rappelle les vases grecs anciens.
Il n'ose troubler le fil de l'inspiration mais, de temps en temps, son corps
oscille très légèrement au son de ces danses oubliées. De l'autre côté de
l'étang, ils écoutent, ils observent. Les relents de musique les enveloppent, se
fichent profondément en eux. En silence, ils reprennent la route.
La musique et l’écriture ont été de tout temps les deux pôles de la vie créatrice de l'auteure. Ce site se veut donc un hommage à la musique (particulièrement classique) et à la littérature, mais aussi au théâtre et aux autres manifestations artistiques.
Affichage des articles dont le libellé est tranche de vie. Afficher tous les articles
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jeudi 6 août 2015
lundi 3 août 2015
Bibliothèques... bis
Dans ma chambre d’enfant, il n’y avait que
l’essentiel, du moins le croyais-je alors: mon piano, un bureau
de travail qui me semblait drôlement imposant quand je m’y suis assise la
première fois, un lit sous lequel je lançais les médicaments antirhume que je
refusais systématiquement d’avaler, et une bibliothèque, construite par mon
père. Je ne conserve qu’un souvenir plutôt flou de ce que j’y avais empilé. Un
casier était vraisemblablement dédié à la Comtesse de Ségur, un autre
(peut-être même deux) à mon encyclopédie Tout connaître et mon fidèle Dis
pourquoi?, un dernier aux disques que j’écoutais fiévreusement. De ceux-ci,
surgissent spontanément à ma mémoire Le petit prince lu par Gérard
Philippe, La vie de Mozart de la collection du Petit ménestrel et Alice
au pays des merveilles. À la fin de mon cours primaire, une section avait
été envahie par deux gros dictionnaires, étranges – m’avait-il semblé alors –
cadeaux d’anniversaire d’une tante traductrice à l’ONU. Au fil des ans, les
partitions avaient grugé le reste, faisant dangereusement ployer les planches de
bois bon marché, le banc de piano ayant démissionné très tôt devant
l’impossibilité de les contenir toutes.
Le bureau m’a toujours suivie; j’y dépose
maintenant mon ordinateur portable - même s'il n'est pas d'une hauteur idéale. Des piles de papiers sur lesquelles sont
griffés notes, corrections, rêves, des disques et des pots remplis de crayons
s’en sont emparé, le transformant en meuble beaucoup moins imposant. Le piano (un cousin en fait, plus Wolfie) sont dans la salle de musique. L’étagère de mon enfance a rendu l’âme il y a plusieurs années
déjà, remplacée par d'autres bibliothèques (suédoises), robustes. Dans
l’une sont glissées – plus ou moins sagement et en ordre
alphabétique relatif – mes partitions. Dans une autre, les
biographies de compositeurs, les analyses d’œuvres, les traités d’orchestration
et de composition. Dans une autre, élancée, j’y ai glissé mes dictionnaires –
qui ne me semblent plus si étranges –, mes archives de journaliste. Sur le côté, punaisées sur un babillard fait main, des cartes d'amis, des souvenirs, mon essentiel macaron «Why be normal » et un texte, Essayez… c’est si facile!, publié jadis, dans
lequel mon père livre ses conseils d’écriture journalistique. Et puis, bien sûr, il y a celles contenant les ouvrages littéraires, regroupés en ordre alphabétique par genres (québécois, autres, poésie, théâtre, essai, lettres allemandes) et l'inénarrable PAL, tout sauf ordonnée.
Il faudrait bien que j'arrête d'aller à la bibliothèque, tiens, et que je lui fasse subir une (légère) cure de minceur!
vendredi 8 mai 2015
Des gens et des choses
Il y a de ces projets fous, qui changent une vie, celle de celle qui les lance (Heidi Miller, étudiante à la maîtrise en média-expérimental), mais aussi de ceux qui ont osé lui dire oui: dix auteurs (onze si l'on compte Heidi), un slammeur (Ivy), quatre comédiens, cinq musiciens, six illustrateurs.
Nous avons vécu pendant un mois avec un objet ayant appartenu à quelqu'un d'autre, certains trouvés dans les brocantes, d'autres donnés. Interdiction de parler de ce qui se trouvait dans la boîte blanche, de mentionner la chose dans notre texte. J'ai d'abord commencé par plus ou moins nier la présence du dit objet, que je trouvais d'une banalité affligeante. Je ne voyais pas comment je pourrais extraire une fiction de tout cela, puis j'ai compris comment lui donner une nouvelle - faussement ancienne? - vie, rêvée...
Parce qu'ici, au fond, il est question de vendre du rêve ici, quelque chose d'un peu fou dans le monde dans lequel nous évoluons ces jours-ci. Les chanceux qui assisteront aux représentations (il reste encore quelques places pour la répétition générale du 15 mai, dépêchez-vous) pourront en effet miser sur ces objets-mystères, fantômes, grâce à de magnifiques lampes interactives. S'ils remportent la mise, ils pourront non seulement repartir avec l'objet lui-même, mais aussi une copie du texte et de l'illustration l'accompagnant.
Le projet souhaite explorer nos relations avec les choses qui nous entourent. Nous concentrons-nous uniquement sur leur fonction? Ne sont-ils bons qu'à être jetés quand on s'en lasse? Je ne prétendrai pas vivre dans un environnement aseptisé ou minimaliste. (Difficile d'affirmer une telle chose quand on héberge deux pianos et une multitude de livres et de partitions.) Au contraire. Ici et là, j'ai déposé des objets, ceux que je considère importants: un coffre aux trésors, le bouchon de la mini-bouteille de champagne que j'ai bue avec une amie quand j'ai emménagé dans ce lieu, une reproduction dénichée à Kamouraska, une oeuvre réalisée par une amie que je ne vois pas assez souvent, un nez de clown, des cartes... autant de petites pierres blanches qui me rappellent où j'ai mis les pieds et combien je suis privilégiée d'être entourée d'amour...
Dans cette vidéo, vous pouvez découvrir les dix auteurs (Heidi se cache derrière la caméra, mais vous l'entendrez). Il y a quelque chose d'émouvant dans tout cela, qu'on l'admette ou non. Une chose est certaine: j'ai très hâte d'entendre les comédiens s'approprier nos mots, les musiciens les envelopper d'une autre couche de sens.
Pour en apprendre plus sur le projet...
Nous avons vécu pendant un mois avec un objet ayant appartenu à quelqu'un d'autre, certains trouvés dans les brocantes, d'autres donnés. Interdiction de parler de ce qui se trouvait dans la boîte blanche, de mentionner la chose dans notre texte. J'ai d'abord commencé par plus ou moins nier la présence du dit objet, que je trouvais d'une banalité affligeante. Je ne voyais pas comment je pourrais extraire une fiction de tout cela, puis j'ai compris comment lui donner une nouvelle - faussement ancienne? - vie, rêvée...
Parce qu'ici, au fond, il est question de vendre du rêve ici, quelque chose d'un peu fou dans le monde dans lequel nous évoluons ces jours-ci. Les chanceux qui assisteront aux représentations (il reste encore quelques places pour la répétition générale du 15 mai, dépêchez-vous) pourront en effet miser sur ces objets-mystères, fantômes, grâce à de magnifiques lampes interactives. S'ils remportent la mise, ils pourront non seulement repartir avec l'objet lui-même, mais aussi une copie du texte et de l'illustration l'accompagnant.
Le projet souhaite explorer nos relations avec les choses qui nous entourent. Nous concentrons-nous uniquement sur leur fonction? Ne sont-ils bons qu'à être jetés quand on s'en lasse? Je ne prétendrai pas vivre dans un environnement aseptisé ou minimaliste. (Difficile d'affirmer une telle chose quand on héberge deux pianos et une multitude de livres et de partitions.) Au contraire. Ici et là, j'ai déposé des objets, ceux que je considère importants: un coffre aux trésors, le bouchon de la mini-bouteille de champagne que j'ai bue avec une amie quand j'ai emménagé dans ce lieu, une reproduction dénichée à Kamouraska, une oeuvre réalisée par une amie que je ne vois pas assez souvent, un nez de clown, des cartes... autant de petites pierres blanches qui me rappellent où j'ai mis les pieds et combien je suis privilégiée d'être entourée d'amour...
Dans cette vidéo, vous pouvez découvrir les dix auteurs (Heidi se cache derrière la caméra, mais vous l'entendrez). Il y a quelque chose d'émouvant dans tout cela, qu'on l'admette ou non. Une chose est certaine: j'ai très hâte d'entendre les comédiens s'approprier nos mots, les musiciens les envelopper d'une autre couche de sens.
Pour en apprendre plus sur le projet...
dimanche 15 mars 2015
Huit ans...
Au fil des ans, je vous ai parlé de musique et de littérature bien sûr, mais aussi beaucoup de théâtre (cette forme artistique occupant beaucoup de ma vie maintenant), de danse, de cirque, de pédagogie, de société, de philosophie... Impossible pour moi de me confiner à un seul genre, un seul filon. L'important restera la transmission, encore et toujours...
Clavier bien tempéré s'est voulu dès le début prolongement de mon travail de journaliste culturelle, mais je n'avais pas réalisé en cliquant sur « publier » la première fois qu'il me permettrait surtout de rencontrer d'autres passionnés et de nouer des liens durables avec plusieurs d'entre eux. Je pense ici tout particulièrement aux collaborateurs de La Recrue du mois, présents ou passés, dont le numéro de mars est justement lancé aujourd'hui et qui met en lumière Demoiselles cactus de Clara B.-Turcotte. À découvrir impérativement ici...
dimanche 22 février 2015
Le concert comme madeleine
Vendredi soir hivernal, Maison symphonique de Montréal. J'attends mon meilleur ami en jetant un coup d’œil sur les mélomanes qui se pressent pour assister au récital d'Emanuel Ax. Je réalise avec surprise que je ne reconnais personne. Amis, autres pianistes, public habituel de l'OSM (que l'on identifie sans peine, même si on n'a jamais été présenté) ont sans doute préféré entendre « Manny » dans le Premier concerto de Brahms dans les jours qui ont précédé. (On a également pu entendre pour la première fois le magnifique Nocturne de Samy Moussa, à découvrir en reprise sur Medici.)
Nous nous pressons dans la salle, nous posons et, là, au milieu de ces inconnus, je me rappelle d'un seul coup tous ces concerts gratuits, proposés les vendredis Salle Claude-Champagne par Radio-Canada, qui enregistrait le tout. (Les temps ont bien changé.) À combien ai-je assisté? Grand mystère. Certains (liés au piano, dont ceux de Raoul Sosa et Louis Lortie) se sont inscrits de façon indélébile, d'autres restent souvenirs fugaces. Je me souviens comment j'avais l'impression d'être bombardée de notes, gracieuseté de mon oreille absolue que je n'avais pas encore appris à désamorcer. Des années après, en discutant avec un ami chef d'orchestre, je comprendrais que, lorsque j'entends distinctement notes ou enchaînement harmoniques, c'est que le cœur n'est pas touché, que seule la tête assimile les données.
Photo: Lisa Marie Mazzuco |
Les lumières s'éteignent et Emanuel Ax s'avance, nous offre en entrée une pièce jamais jouée, les Variations chromatiques de concert de Bizet, une série de déclinaisons d'une simple gamme chromatique d'abord ascendante puis descendantes. Je me laisse charmer par certains détournements du thème, sans ressentir de réelle connexion avec l'oeuvre. Pourtant, je ne peux m'empêcher de remarquer comment Ax est efficace dans sa production du son, son contrôle absolu de la respiration musicale et la profondeur du lien qu'il établit avec le public. (Aucun applaudissement intempestif ne ponctuera le récital entier, tant tous sont entièrement sous son joug.)
Le pianiste nous propose ensuite six pièces de Rameau, parfaitement ciselées, qui donnent l'envie de plonger dans ces pages habituellement réservées aux clavecinistes et de les travailler, d'y entrer plus profondément, de les partager avec des élèves aussi. Je me souviens ici des quelques fois où j'ai enseigné le «Tambourin » de Rameau, réalise ce que pourraient apporter « L'indifférente » ou « L'enharmonique » aux plus avancés.
Le segment Debussy est celui que j'attendais avec le plus d'impatience: les Estampes, l'« Hommage à Rameau » tiré de la première suite d'Images et L'isle joyeuse. Impossible de ne pas céder à l'ondoiement des « Pagodes », à la chaleur de la « Soirée dans Grenade » ou à l'effervescence des « Jardins sous la pluie », particulièrement bien rendus par Emanuel Ax. À l'écoute du triptyque se superposent le souvenir des heures passées à l'instrument alors que je travaillais ces pages, mais aussi le souvenir du récital de Menahem Pressler offert dans le même lieu il y a quelques années. À l'entracte, une conversation s'engagerait avec une autre pianiste qui avait préféré cette version, alors que je donnais Ax gagnant ici, même si c'est tout particulièrement dans l'« Hommage à Rameau », pièce souvent rendue de façon assez fade, qu'il a atteint un sommet inégalé de poésie.
L'après-entracte serait entièrement consacré à un sommet absolu du répertoire de musique de chambre: le Quintette avec piano de Schumann, Emanuel Ax partageant la scène avec les premières chaises de l'OSM Andrew Wan, Olivier Thoun, Neal Gripp et Brian Manker. Rarement aura-t-on entendu une telle complicité entre les musiciens (qui n'ont évidemment pas pu disposer d'heures de répétitions infinies), pu sentir la joie contagieuse que chacun avait à jouer cette page dans laquelle le piano a la part du lion, imposante partition qui ne prend tout son sens pourtant qu'avec le soutien des autres musiciens qui commentent tour à tour l'une ou l'autre assertion. J'ai entendu cette oeuvre des dizaines de fois, dans autant de versions, mais je ne pourrai jamais oublier l'instant précis où je l'ai découverte, en lecture, au piano, à Tanglewood. Je ne me souviens pas comment la partition s'est retrouvée sur mon lutrin, qui étaient les quatre autres interprètes. Impossible pourtant d'oublier l'impact qu'aura eu sur la pianiste de 17 ans alors cette page maîtresse, jamais (re)travaillée depuis.
Le piano m'appelle: signe indéniable que l'interprète du récital de vendredi a été à la hauteur...
Le segment Debussy est celui que j'attendais avec le plus d'impatience: les Estampes, l'« Hommage à Rameau » tiré de la première suite d'Images et L'isle joyeuse. Impossible de ne pas céder à l'ondoiement des « Pagodes », à la chaleur de la « Soirée dans Grenade » ou à l'effervescence des « Jardins sous la pluie », particulièrement bien rendus par Emanuel Ax. À l'écoute du triptyque se superposent le souvenir des heures passées à l'instrument alors que je travaillais ces pages, mais aussi le souvenir du récital de Menahem Pressler offert dans le même lieu il y a quelques années. À l'entracte, une conversation s'engagerait avec une autre pianiste qui avait préféré cette version, alors que je donnais Ax gagnant ici, même si c'est tout particulièrement dans l'« Hommage à Rameau », pièce souvent rendue de façon assez fade, qu'il a atteint un sommet inégalé de poésie.
L'après-entracte serait entièrement consacré à un sommet absolu du répertoire de musique de chambre: le Quintette avec piano de Schumann, Emanuel Ax partageant la scène avec les premières chaises de l'OSM Andrew Wan, Olivier Thoun, Neal Gripp et Brian Manker. Rarement aura-t-on entendu une telle complicité entre les musiciens (qui n'ont évidemment pas pu disposer d'heures de répétitions infinies), pu sentir la joie contagieuse que chacun avait à jouer cette page dans laquelle le piano a la part du lion, imposante partition qui ne prend tout son sens pourtant qu'avec le soutien des autres musiciens qui commentent tour à tour l'une ou l'autre assertion. J'ai entendu cette oeuvre des dizaines de fois, dans autant de versions, mais je ne pourrai jamais oublier l'instant précis où je l'ai découverte, en lecture, au piano, à Tanglewood. Je ne me souviens pas comment la partition s'est retrouvée sur mon lutrin, qui étaient les quatre autres interprètes. Impossible pourtant d'oublier l'impact qu'aura eu sur la pianiste de 17 ans alors cette page maîtresse, jamais (re)travaillée depuis.
Le piano m'appelle: signe indéniable que l'interprète du récital de vendredi a été à la hauteur...
jeudi 11 décembre 2014
Retour au bercail
Je reviens complètement séduite par Bruxelles, une ville à taille humaine, dans laquelle se mêlent harmonieusement le vieux et le nouveau, les deux langues parlées. Des rencontres inoubliables, avec des gens d’une rare gentillesse, avec les œuvres d’artistes belges (il n’y a pas que Magritte dans le plat pays… même si le musée consacré à ses œuvres est fort intéressant), avec une gastronomie multiple, raffinée. Une ville où il fait bon marcher (passablement moins se promener en voiture ai-je cru comprendre), prendre le temps de bouquiner (je n’ai rapporté que des auteurs belges, exception faite de deux essais offerts en cadeau), entrer dans les galeries d’art au hasard, qu’elles soient minuscules ou de taille conséquente, élaborer des projets de collaboration.
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Grand-Place (photo: Lucie Renaud) |
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À l'entrée du restaurant Confucius (photo: Lucie Renaud) |
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Coup de cœur pour l'expo Night Time d'Hans Op de Beeck |
J’ai ensuite retrouvé Paris et les amis, dans l’effervescence presque brutale du temps des fêtes (un sacré défi que d’avancer un samedi après-midi rue de Rivoli!), dans le bruit de la grande ville, dans une certaine grogne aussi, perceptible dans les métros, les boutiques, la rue. La colère gronde, mais éclatera-t-elle entièrement? Pour la première fois, je ne me suis pas arrêtée au Centre Pompidou, mais lui ai préféré le Musée d’art moderne, que je ne connaissais pas: un très beau doublé Sonia Delauney/David Altmejd (l’expo sera l'année prochaine au MAC et vaut certainement le détour). J’ai aussi vu deux spectacles: La petite fille aux allumettes d’Andersen au Studio-Théâtre de la Comédie-Française et surtout la comédie musicale tirée du film mythique An American in Paris au Châtelet… absolument sensationnel! J’ai découvert de nouveaux quartiers, des lieux dont j’ignorais l’existence, bu des chocolats et des thés un peu partout dans la ville, fait un crochet jusqu’à Billancourt pour un stage de danse.
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Parc Monceau (photo: Lucie Renaud) |
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(Photo: Lucie Renaud) |
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Le cavalier bleu (Photo: Lucie Renaud) |
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Vue de la terrasse du Châtelet (Photo: Lucie Renaud) |
J’aime assurément les vieux pays, mais reste convaincue que je préfère nettement l’hiver blanc et froid québécois à celui gris et humide de l’Europe.
mardi 29 juillet 2014
Communauté
Il y a ceux qui aiment les grandes villes et ceux qui préfèrent la campagne. Les rats des villes et les rats des champs. Je suis indéniablement une fleur de béton, mais j'accepterais sans peine de passer quelques mois loin de l'agitation, des spectacles, chaque été, surtout face à la mer. Certains qui habitent dans des villages aiment cette proximité avec le voisin, que l'on croise à la poste, à l'épicerie, au casse-croûte. L'impression de collaborer à une histoire collective, faite de riens qui s'accumulent, pourtant qui finissent par faire sens.
Anthony Quinn - Zorba The Greek (Short Dance... par STARDUST72
Comment faire pour retrouver ce sentiment de communauté quand on habite une métropole? Dans certains quartiers, des résidents aménageront des ruelles vertes, y organiseront périodiquement des soirées, les enfants circuleront de chez l'un à l'autre sans apparentes frontières. Un rêve difficile à réaliser pour plusieurs. On peut aussi se bâtir une communauté autour d'une cause par exemple. Elle peut aussi se définir de façon plus insidieuse, à travers une série de gestes partagés ou pratiqués côte à côte. Est-il nécessaire de connaître la vie de la dame qui fait du yoga à côté de vous chaque jeudi, de cet homme qui, chaque mardi, aligne les longueurs de piscine? Non. Avez-vous néanmoins pris conscience de son existence, y jetez-vous un regard sinon intéressé, du moins pas désabusé? Peut-être bien.
Je me suis remis à l'exercice à l'automne, par choix, par nécessité, par volonté de retrouver celle d'avant, qui pouvait courir après un ballon de soccer pendant 90 minutes, pour réaliser aussi que je ne suis plus qu'un cerveau et ce, même si je jongle avec des concepts parfois flous au quotidien, que je parle une langue que certains qualifieraient de morte (la musique classique), que j'aime être confrontée par les expériences artistiques. Je me suis inscrite à un gym de quartier, tout petit, tenu par et pensé pour des femmes. Zéro testostérone, une certaine attention aux détails, un sourire franc quand on passait la porte.
Quelques mois après, il a fait faillite. Pendant un mois, j'ai tourné en rond, avec toute cette énergie qui ne pouvait être dissipée dans le geste - ou pas assez. L'offre dans le quartier n'était pas exceptionnelle, mais il y avait ce grand centre communautaire, juif. Une ancienne copine de gym s'y était inscrit, m'avait vanté l'éventail de cours, l'horaire modulable. Je me suis dit que, oui, peut-être... La première semaine, j'étais perdue. Trop grand, trop de monde, je ne savais pas comment m'inscrire dans la masse. Mais il y avait les profs, certains exceptionnels. Pas nécessairement parce qu'ils réussissent à vous sculpter un corps en trois coups de couteau (ou de fouet). Plutôt parce qu'ils aiment sans contredit leur boulot.
J'ai été chanceuse. Le premier cours de zumba que j'ai suivi là-bas était donné par Carole: un sourire aussi lumineux que le soleil, une peau de miel, une voix qui vous encourage après chaque chanson (« Mais oui! Bravo, bravo! ») et une musicalité certaine. Facile pour moi de comprendre où s'en va le geste quand il semble couler de source, que la séquence de mouvements n'a pas besoin d'être analysée, qu'elle peut simplement être ressentie, que les pieds se calent naturellement aux temps forts. Il n'y a qu'elle pour passer dans un même cours d'Elvis à du hip-hop un brin salance, du disco bonbon à la salsa, pour réussir à me faire danser sur du country en rigolant.
Au début, je me suis concentrée sur la matière transmise, puis me suis mise à prendre conscience des gens qui m'entouraient, pas toujours les mêmes certes, mais quand même: des personnalités qui s'épanouissent tant qu'on choisit de les observer. Au début, j'étais un peu déstabilisée de voir certaines juives orthodoxes arriver en cours couvertes des pieds à la tête ou presque. J'ai rapidement occulté les superpositions de textures pour me concentrer sur un sourire absolument éblouissant, sur la voix d'une dame d'un certain âge qui chante à tue-tête Let's Get Loud de Jennifer Lopez. J'ai espéré que cette joie qu'elles me transmettaient faisait partie de leur quotidien, que le cours ne servait pas que d'exutoire. Il y aussi cet homme qui semble conçu à partir de ressorts, toujours prêt à bondir. Cet autre qui hurle sa joie après chaque chanson dansée. (Il me manque...Est-il en vacances? Malade?) Il y a cette dame d'au moins 80 ans aux tenues coordonnées que n'aurait pas renié Jane Fonda, qui bouge à son rythme, mais qui bouge sans jamais s'arrêter. J'espère disposer d'une telle énergie quand j'aurai son âge. Ce jeune homme de 18 ou 20 qui accompagne son amie en cours, même si peu d'hommes osent danser la zumba au milieu de trente femmes.
Au début, je me suis concentrée sur la matière transmise, puis me suis mise à prendre conscience des gens qui m'entouraient, pas toujours les mêmes certes, mais quand même: des personnalités qui s'épanouissent tant qu'on choisit de les observer. Au début, j'étais un peu déstabilisée de voir certaines juives orthodoxes arriver en cours couvertes des pieds à la tête ou presque. J'ai rapidement occulté les superpositions de textures pour me concentrer sur un sourire absolument éblouissant, sur la voix d'une dame d'un certain âge qui chante à tue-tête Let's Get Loud de Jennifer Lopez. J'ai espéré que cette joie qu'elles me transmettaient faisait partie de leur quotidien, que le cours ne servait pas que d'exutoire. Il y aussi cet homme qui semble conçu à partir de ressorts, toujours prêt à bondir. Cet autre qui hurle sa joie après chaque chanson dansée. (Il me manque...Est-il en vacances? Malade?) Il y a cette dame d'au moins 80 ans aux tenues coordonnées que n'aurait pas renié Jane Fonda, qui bouge à son rythme, mais qui bouge sans jamais s'arrêter. J'espère disposer d'une telle énergie quand j'aurai son âge. Ce jeune homme de 18 ou 20 qui accompagne son amie en cours, même si peu d'hommes osent danser la zumba au milieu de trente femmes.
Il y a quelques semaines, moi aussi, j'ai commencé à sourire de façon gratuite à certaines, entre deux chansons, pendant que je prends une gorgée d'eau. La semaine dernière, une est tombée à la renverse, à deux rangées de moi. A-t-elle eu un malaise? A-t-elle été encombrée par une autre? J'avais bien remarqué combien elle semblait prendre son entraînement au sérieux, ayant même investi récemment dans l'achat de quelques tenues plus adaptées. Elle est partie du cours et toute la semaine, je me suis inquiétée. Hier matin, elle était à mes côtés et je me suis dit que, cette fois, si quelqu'un lui mettait des bâtons dans les roues, elle aurait affaire à moi. Quand, comme dernière chanson avant l'étirement, Carole nous a proposé la sirtaki de Zorba le grec et que, pleines de sueur, toutes n'ont pourtant pas hésité à se mettre en ligne, à répéter les pas, toujours plus rapidement, je me suis dit qu'au fond, si on ne choisit pas sa famille, on peut peut-être bien s'inventer une communauté.
Anthony Quinn - Zorba The Greek (Short Dance... par STARDUST72
dimanche 18 mai 2014
Tournants
Une vie est faite de tournants, sans que l'on réalise sur le coup que l'on vient d'en prendre un. Je suis venue au journalisme en fondant La Muse affiliée en septembre 1998, magazine de pédagogie musicale qui tentait de palier à l'isolement que tous les professeurs d'instrument (dans ce cas-ci, particulièrement ceux affiliés à l'École Vincent-d'Indy) ressentent à un moment ou l'autre. Un soir comme un autre, je rentrais chez moi quand mon œil a été attiré par cette couverture d'un magazine dont j'ignorais tout, qui en était dans sa troisième année de publication.
Je ne savais pas qui était l'artiste en couverture, mais disons que sa dégaine ne m'a pas laissé indifférente. J'ai donc ramassé le numéro de juin 1999 de La Scena Musicale, l'ai feuilleté avec attention. Peu après, j'enverrais mon curriculum vitae, avec un exemplaire de La Muse affiliée sans doute (je n'en ai aucun souvenir). Une première commande d'article est tombée, sur la pianiste Mitsuko Uchida qui donnait cet été-là un concert au Festival de Lanaudière. Mes premières entrevues seraient complétées à l'automne, avec la soprano Karina Gauvin et le pianiste Marc-André Hamelin. Premières d'une longue série - qui me mèneraient suite à quelques autres bifurcations à couvrir la littérature québécoise et le théâtre.
Si, depuis 1998, j'ai bien sûr suivi avec intérêt la carrière de Dmitri Hvorostovsky, je ne l'avais jamais entendu en concert. J'étais donc plutôt fébrile à la pensée de découvrir le « lion de l'opéra » dans un récital intime, donné avec son partenaire de longue date Ivari Ilja à la Maison symphonique de Montréal vendredi. Première réaction, épidermique: ciel qu'il est (encore) beau (affirme celle qui avait bien failli s'évanouir quand Ivo Pogorelich lui avait fait un clin d’œil, l'année de sa victoire au Concours international de Montréal)! Cela n'a pris que quelques secondes pour que je sois conquise, parce que la voix est encore magnifique, que sa présence suave se prêtait bien aux circonstances, parce que je découvrais du nouveau répertoire (presque entièrement russe) et que son pianiste est l'un des chambristes les plus brillants que j'aie eu l'occasion d'entendre. Ivari Ilja possède en effet une rare maîtrise de la palette sonore, un raffinement exquis dans le phrasé, une intelligence du texte et une virtuosité qui ne mise jamais sur l'esbroufe (même si certaines des mélodies données hier auraient donné du fil à retordre à nombre de pianistes). Je connaissais les mélodies de Liszt (reprises dans ses Années de pèlerinage pour piano seul) et de Rachmaninov (j'ai écrit des notes de programme pour un album Analekta il y a quelques années), avais entendu quelques pages de Tchaïkovski, mais ai découvert avec un immense plaisir celles de Medtner, compositeur trop peu joué.
Elles m'ont rappelé indirectement l'été de mes 16 ans, passé en partie au Centre d'arts Orford, alors que j'avais travaillé avec André-Sébastien Savoie de ses Contes de fées. Ce serait précisément cet été-là que j'ai réalisé que je pourrais pas vivre sans la musique...
Je ne savais pas qui était l'artiste en couverture, mais disons que sa dégaine ne m'a pas laissé indifférente. J'ai donc ramassé le numéro de juin 1999 de La Scena Musicale, l'ai feuilleté avec attention. Peu après, j'enverrais mon curriculum vitae, avec un exemplaire de La Muse affiliée sans doute (je n'en ai aucun souvenir). Une première commande d'article est tombée, sur la pianiste Mitsuko Uchida qui donnait cet été-là un concert au Festival de Lanaudière. Mes premières entrevues seraient complétées à l'automne, avec la soprano Karina Gauvin et le pianiste Marc-André Hamelin. Premières d'une longue série - qui me mèneraient suite à quelques autres bifurcations à couvrir la littérature québécoise et le théâtre.
Si, depuis 1998, j'ai bien sûr suivi avec intérêt la carrière de Dmitri Hvorostovsky, je ne l'avais jamais entendu en concert. J'étais donc plutôt fébrile à la pensée de découvrir le « lion de l'opéra » dans un récital intime, donné avec son partenaire de longue date Ivari Ilja à la Maison symphonique de Montréal vendredi. Première réaction, épidermique: ciel qu'il est (encore) beau (affirme celle qui avait bien failli s'évanouir quand Ivo Pogorelich lui avait fait un clin d’œil, l'année de sa victoire au Concours international de Montréal)! Cela n'a pris que quelques secondes pour que je sois conquise, parce que la voix est encore magnifique, que sa présence suave se prêtait bien aux circonstances, parce que je découvrais du nouveau répertoire (presque entièrement russe) et que son pianiste est l'un des chambristes les plus brillants que j'aie eu l'occasion d'entendre. Ivari Ilja possède en effet une rare maîtrise de la palette sonore, un raffinement exquis dans le phrasé, une intelligence du texte et une virtuosité qui ne mise jamais sur l'esbroufe (même si certaines des mélodies données hier auraient donné du fil à retordre à nombre de pianistes). Je connaissais les mélodies de Liszt (reprises dans ses Années de pèlerinage pour piano seul) et de Rachmaninov (j'ai écrit des notes de programme pour un album Analekta il y a quelques années), avais entendu quelques pages de Tchaïkovski, mais ai découvert avec un immense plaisir celles de Medtner, compositeur trop peu joué.
Elles m'ont rappelé indirectement l'été de mes 16 ans, passé en partie au Centre d'arts Orford, alors que j'avais travaillé avec André-Sébastien Savoie de ses Contes de fées. Ce serait précisément cet été-là que j'ai réalisé que je pourrais pas vivre sans la musique...
vendredi 4 avril 2014
Étiquette 101
Je suis à 100 % pour la démocratisation de l'art et salue haut et fort toutes les initiatives qui permettent de le déplacer dans un lieu autre, plus accessible, comme ces concerts de musique classique dans les cafés (le Poisson rouge de New York a très bien compris la tendance), ces lectures de poésie sur les places publiques (encore trop peu fréquentes) ou des initiatives qui exigent une participation active du spectateur (comme Bells 13, par exemple, ou le Spa philosophique qui sera proposé par le FTA cette année). Par contre, quand le quidam fait le choix d'une expérience théâtrale ou musicale dans un lieu disons plus « encadré », je m'attends à ce que certaines règles de simple bienséance soient respectées.
Trois discordances en une même semaine me poussent ici à prendre la parole, toutes liés de près ou de loin à un usage abusif du cellulaire. Si l'écoute a été étonnante tout au long du spectacle du Cloud Dance Theatre, on n'aura certes pas pu en dire autant lors du post scriptum, un (assez) long segment pendant lequel un des interprètes dessinait une série de cercles concentriques avec un râteau. La dame devant nous ne pouvait-elle vraiment pas attendre pour consulter son FB? Avait-on besoin à ce moment précis de cette pollution visuelle, alors que nous venions de participer à quelque chose qui se rapprochait de la méditation?
Déjà, la veille, nous avions failli faire la peau à un charmant (hum...) technophile qui avait passé la représentation de Norman à texter et/ou vérifier ses courriels. Oui, il penchait un peu son écran, pensant contenir une partie de l'émission lumineuse sans doute, mais il n'avait pas réalisé que, juchés quelques centimètres au-dessus de lui, nous pouvions suivre le moindre de ses sursauts téléphoniques. Ma voisine, complètement excédée bien évidemment (le spectacle était tout sauf ennuyeux), lui a vertement (mais poliment) fait la leçon en sortant. Il l'a regardée façon piteuse. Le message est-il passé? Sa capacité de rétention a-t-elle fait qu'il a tout oublié une fois sorti dans la salle? Mystère...
Cela n'était rien par rapport à ce qui s'était passé la semaine précédente lors du concert du LA Phil à la Maison symphonique, lieu à l'acoustique exceptionnelle, un froissement de mouchoir pouvant y prendre une tangente exponentielle. La salle était bien évidemment bondée et nous avons été surpris, mon ami et moi, de constater que deux places étaient demeurées libres à côté de nous. Nous avons avancé en rigolant - mais n'y croyant pas vraiment - que les personnes, sans doute âgées (stéréotypes, quand vous nous tenez!) avaient eu peur d'écouter la Première Symphonie de Corigliano, une oeuvre composée - gasp! - en 1989, donc certainement inécoutable. (Le souvenir de cette interprétation restera dans mon panthéon, comme la lecture qu'avait tiré de cette poignante symphonie Jacques Lacombe et l'OSM en 2004.) Eh bien, nous avons été déjoués. En effet, après l'entracte, un couple est apparu à nos côtés: jeune trentaine, bien habillé, fort excité de se retrouver là semble-t-il (ou tout simplement émoustillé par le premier segment de sa soirée). Cela a pris peut-être six secondes avant que le cellulaire de madame ne soit dégainé et qu'une dizaine de selfies soit pris. Sourire de monsieur, moue sexy de madame, cheveux balayés vers l'arrière, mettons-nous en scène. Impossible d'attendre bien sûr pour se connecter sur FB et Twitter (et sans doute Instagram, Pinterest, alouette...) Partageons, partageons...
Les lumières se tamisent. Nous en sommes tout au plus à la réexposition du premier mouvement de la symphonie de Tchaïkovski au programme (qui aura été certes moins mémorable que celle de Corigliano). Une petite soif de madame, qui a pensé à tout. Elle extirpe la bouteille de plastique de son sac à main (froissement du contenant dans la main bijoutée), en avale une gorgée (crissement - à peine perceptible pense-t-elle sans doute - de la bouteille). En parfaite hôtesse, elle en propose même à monsieur (évidemment pas dans la section fortissimo, cela aurait été trop aimable). Une fois rafraîchis, les tourtereaux peuvent poursuivre leur exploration, non pas du répertoire symphonique, mais du corps de l'autre. Quoique prétendent certains critiques montréalais, la salle n'est jamais entièrement dans le noir à la Maison symphonique et, hum, disons que côté intimité pour se rouler un patin, on repassera (et tout cela pour un billet dont le coût valait 8 ou 10 sorties au cinéma!). Une fois la dernière note déposée, incapable d'applaudir, mon ami s'est tourné vers moi, excédé: « Ce n'est pas la Cinquième de Tchaïkovski que nous venons d'entendre, mais l'ouverture-fantaisie Roméo et Juliette! » Une semaine après, il n'en était toujours pas revenu. (Précisons ici que, non, il n'a aucun cheveu gris, car il fait partie de la génération C, née avec une compréhension instinctive de la technologie.)
Devrait-on demander au public de déposer son cellulaire au vestiaire? Devrions-nous intégrer un segment étiquette de concert au milieu des mises en garde au sujet des cellulaires au début de spectacle? Doit-on accepter que notre monde est devenu si individualiste que nous en avons oublié comment vivre en société? Dois-je cesser de fréquenter théâtres et salles de concert? Suis-je vraiment si vieux jeu? Autant de questions pour l'instant sans réponses. Mon téléphone intelligent les connaît peut-être, lui...
Trois discordances en une même semaine me poussent ici à prendre la parole, toutes liés de près ou de loin à un usage abusif du cellulaire. Si l'écoute a été étonnante tout au long du spectacle du Cloud Dance Theatre, on n'aura certes pas pu en dire autant lors du post scriptum, un (assez) long segment pendant lequel un des interprètes dessinait une série de cercles concentriques avec un râteau. La dame devant nous ne pouvait-elle vraiment pas attendre pour consulter son FB? Avait-on besoin à ce moment précis de cette pollution visuelle, alors que nous venions de participer à quelque chose qui se rapprochait de la méditation?
Déjà, la veille, nous avions failli faire la peau à un charmant (hum...) technophile qui avait passé la représentation de Norman à texter et/ou vérifier ses courriels. Oui, il penchait un peu son écran, pensant contenir une partie de l'émission lumineuse sans doute, mais il n'avait pas réalisé que, juchés quelques centimètres au-dessus de lui, nous pouvions suivre le moindre de ses sursauts téléphoniques. Ma voisine, complètement excédée bien évidemment (le spectacle était tout sauf ennuyeux), lui a vertement (mais poliment) fait la leçon en sortant. Il l'a regardée façon piteuse. Le message est-il passé? Sa capacité de rétention a-t-elle fait qu'il a tout oublié une fois sorti dans la salle? Mystère...
Les lumières se tamisent. Nous en sommes tout au plus à la réexposition du premier mouvement de la symphonie de Tchaïkovski au programme (qui aura été certes moins mémorable que celle de Corigliano). Une petite soif de madame, qui a pensé à tout. Elle extirpe la bouteille de plastique de son sac à main (froissement du contenant dans la main bijoutée), en avale une gorgée (crissement - à peine perceptible pense-t-elle sans doute - de la bouteille). En parfaite hôtesse, elle en propose même à monsieur (évidemment pas dans la section fortissimo, cela aurait été trop aimable). Une fois rafraîchis, les tourtereaux peuvent poursuivre leur exploration, non pas du répertoire symphonique, mais du corps de l'autre. Quoique prétendent certains critiques montréalais, la salle n'est jamais entièrement dans le noir à la Maison symphonique et, hum, disons que côté intimité pour se rouler un patin, on repassera (et tout cela pour un billet dont le coût valait 8 ou 10 sorties au cinéma!). Une fois la dernière note déposée, incapable d'applaudir, mon ami s'est tourné vers moi, excédé: « Ce n'est pas la Cinquième de Tchaïkovski que nous venons d'entendre, mais l'ouverture-fantaisie Roméo et Juliette! » Une semaine après, il n'en était toujours pas revenu. (Précisons ici que, non, il n'a aucun cheveu gris, car il fait partie de la génération C, née avec une compréhension instinctive de la technologie.)
Devrait-on demander au public de déposer son cellulaire au vestiaire? Devrions-nous intégrer un segment étiquette de concert au milieu des mises en garde au sujet des cellulaires au début de spectacle? Doit-on accepter que notre monde est devenu si individualiste que nous en avons oublié comment vivre en société? Dois-je cesser de fréquenter théâtres et salles de concert? Suis-je vraiment si vieux jeu? Autant de questions pour l'instant sans réponses. Mon téléphone intelligent les connaît peut-être, lui...
mardi 11 mars 2014
Le héros de mon enfance
Oui, bien sûr, il est de bon ton d'affirmer que notre père reste le héros de notre enfance. Si je lui voue un amour inconditionnel, notamment parce qu'il m'a ouvert les portes de la bibliothèque, m'y amenant toutes les semaines sans jamais rechigner (il était lui-même un lecteur vorace), et que mon parcours professionnel n'est pas si éloigné du sien (il a été lui-même journaliste et rédacteur en chef de publications), un autre homme a fait battre mon petit cœur dès l'école primaire. Non, ce n'était pas le propriétaire du dépanneur chez qui j'aurais pu m'approvisionner en bonbons. (Je n'en mangeais pas alors et toujours pas aujourd'hui.) C'était plutôt le facteur, qui livrait le courrier à midi pile, à l'heure à laquelle je rentrais chez moi. Je guettais son passage avec impatience, car il était l'être suprême, celui qui livrait les lettres de mes correspondantes.
J'ai bien sûr depuis réalisé que mes parents ne devaient pas être aussi transportés de joie lors de son passage, puisqu'il leur remettait sans nul doute des factures. (Passablement, plus prosaïque comme relation!) Aujourd'hui d'ailleurs, je préfère de beaucoup recevoir ces dernières par courriel. Il faut quand même les payer, mais au moins, cela libère la boîte aux lettres d'interférences fort peu agréables. Certes, je ne reçois presque plus de lettres, écrites sur un papier à lettres magnifique (j'en ai fait collection pendant des années et ai même rêvé avec ma coloc de l'université d'ouvrir une papeterie, c'est dire...). Tout au plus ai-je parfois la surprise d'une carte d'anniversaire (et encore, elles aussi me parviennent généralement par voie électronique), de Noël ou, si je suis vraiment chanceuse, d'une carte postale que je pourrai punaiser sur mon babillard pendant quelques semaines.
Néanmoins, le facteur est encore mon héros - et je le salue toujours quand je le croise sur la rue, même si je peine à trouver une logique quelconque à son horaire depuis quelque temps -, car il me livre parfois des colis qui ont franchi des kilomètres avant de me parvenir (j'ai des amis qui croient encore en la magie des paquets lors des anniversaires), mais surtout des livres! C'est toujours un plaisir d'ouvrir ces emballages bruns, même si je sais souvent ce qu'ils contiennent, demande de services de presse pour les collaborateurs de La Recrue du mois oblige. Je sais aussi que, deux jours, une semaine après, un ami viendra fouiner dans ma bibliothèque pour voir quels nouveaux livres se seront ajoutés à l'étagère dédiée aux services de presse et que, quelques instants, il laissera courir ses doigts sur les couvertures, lira l'exergue ou un passage au hasard, souvent à haute voix, me confirmera que, même si nous vivons en cette ère du numérique, l'objet continue d'interpeller, de vouloir être humé, caressé, manipulé.
Quand j'ai su que, d'ici quelques années, les facteurs allaient disparaître, j'en ai ressenti une profonde tristesse. N'aurais-je pas dû leur dire avant combien je les aimais, combien j'étais jalouse au fond de leurs privilèges d'« hommes (et de femmes) de lettres »?
Photo: Olivier Pontbriand, La Presse |
J'ai bien sûr depuis réalisé que mes parents ne devaient pas être aussi transportés de joie lors de son passage, puisqu'il leur remettait sans nul doute des factures. (Passablement, plus prosaïque comme relation!) Aujourd'hui d'ailleurs, je préfère de beaucoup recevoir ces dernières par courriel. Il faut quand même les payer, mais au moins, cela libère la boîte aux lettres d'interférences fort peu agréables. Certes, je ne reçois presque plus de lettres, écrites sur un papier à lettres magnifique (j'en ai fait collection pendant des années et ai même rêvé avec ma coloc de l'université d'ouvrir une papeterie, c'est dire...). Tout au plus ai-je parfois la surprise d'une carte d'anniversaire (et encore, elles aussi me parviennent généralement par voie électronique), de Noël ou, si je suis vraiment chanceuse, d'une carte postale que je pourrai punaiser sur mon babillard pendant quelques semaines.
Néanmoins, le facteur est encore mon héros - et je le salue toujours quand je le croise sur la rue, même si je peine à trouver une logique quelconque à son horaire depuis quelque temps -, car il me livre parfois des colis qui ont franchi des kilomètres avant de me parvenir (j'ai des amis qui croient encore en la magie des paquets lors des anniversaires), mais surtout des livres! C'est toujours un plaisir d'ouvrir ces emballages bruns, même si je sais souvent ce qu'ils contiennent, demande de services de presse pour les collaborateurs de La Recrue du mois oblige. Je sais aussi que, deux jours, une semaine après, un ami viendra fouiner dans ma bibliothèque pour voir quels nouveaux livres se seront ajoutés à l'étagère dédiée aux services de presse et que, quelques instants, il laissera courir ses doigts sur les couvertures, lira l'exergue ou un passage au hasard, souvent à haute voix, me confirmera que, même si nous vivons en cette ère du numérique, l'objet continue d'interpeller, de vouloir être humé, caressé, manipulé.
Quand j'ai su que, d'ici quelques années, les facteurs allaient disparaître, j'en ai ressenti une profonde tristesse. N'aurais-je pas dû leur dire avant combien je les aimais, combien j'étais jalouse au fond de leurs privilèges d'« hommes (et de femmes) de lettres »?
mercredi 1 janvier 2014
Une extraordinaire 2014 à vous tous!
N’ignorez plus ce rêve qui attend sagement sur une
tablette. Dépoussiérez-le, examinez-en les contours, redessinez-les sans
remords. N’attendez pas que l’on
vous aborde, suscitez la rencontre. Que celle-ci dure trois secondes, cinq
minutes ou dix ans importe peu. Tendez la main. Regardez celui qui vous fait
face dans les yeux. N’ayez pas peur de perdre ce que, de toute façon, vous ne possédez
pas. La vie est parfois frivole, souvent futile, toujours fragile. Dites à ceux
qui vous sont chers que vous les aimez. N’attendez rien en retour. Sachez
donner; cela vous aidera à recevoir.
Vivez chaque jour non pas
comme s’il était le dernier, mais comme le premier, comme une somme des
possibles, que tout était encore à définir.
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Photo: Lucie Renaud |
dimanche 4 août 2013
Premier amour
Un ami pianiste et moi nous lancions dans un après-midi shopping vendredi quand nous avons croisé une jeune fille avec un t-shirt qui a tout de suite capté mon attention. « Music was my first love. » Pas d'image, pas de contexte, une simple phrase. Éberluée, j'ai posé la question à mon ami: « Qu'est-ce que cela veut dire selon toi? » Perplexes, nous ne pouvions imaginer que cette phrase puisse se conjuguer à l'imparfait ou au passé composé. La musique était mon premier amour... Peu importe les circonstances, si on aime la musique d'amour, comment peut-on l'oublier? Si la musique était son premier amour, par quoi se sent-elle animée aujourd'hui? La littérature, le théâtre, la peinture, le tricot? Travaille-t-elle comme secrétaire et a-t-elle besoin que son t-shirt lui rappelle qu'elle n'est pas que cela?
Nous avons certes raté une belle occasion de poser la question directement à la demoiselle en question. Peut-être au fond n'a-t-elle jamais réalisé les ambiguïtés qu'une telle phrase pouvait susciter chez des professionnels musicophiles. Pour moi, la musique est et restera toujours mon premier amour, ma langue maternelle, une langue universelle. Quand on me demande combien de langues je parle, je réponds parfois que je suis parfaitement trilingue (français, anglais, musique), poursuis mon apprentissage de l'allemand et possède des bribes d'italien. Cela en fait fuir quelques-uns, il faut l'admettre...
Bien avant de savoir que les garçons pouvaient faire palpiter les cœurs des fillettes, j'ai aimé Mozart. D'abord enfant-dieu parfait à mes yeux, il est devenu par la suite entièrement l'un de nous, un homme avec ses failles, ses doutes, ses défauts... et ses élans de génie qui transcendent tout le reste. Et puis il y a eu les autres, tous ces compositeurs que j'écoutais au quotidien, ces interprètes que je voyais en concert chaque semaine, ces découvertes d’œuvres dont je ne me remettrais pas toujours.
Aucun doute, je n'aurais jamais pu acheter un tel t-shirt, sauf peut-être si j'avais rayé le « was » et remplacé par « is and always will be »...
Nous avons certes raté une belle occasion de poser la question directement à la demoiselle en question. Peut-être au fond n'a-t-elle jamais réalisé les ambiguïtés qu'une telle phrase pouvait susciter chez des professionnels musicophiles. Pour moi, la musique est et restera toujours mon premier amour, ma langue maternelle, une langue universelle. Quand on me demande combien de langues je parle, je réponds parfois que je suis parfaitement trilingue (français, anglais, musique), poursuis mon apprentissage de l'allemand et possède des bribes d'italien. Cela en fait fuir quelques-uns, il faut l'admettre...
Bien avant de savoir que les garçons pouvaient faire palpiter les cœurs des fillettes, j'ai aimé Mozart. D'abord enfant-dieu parfait à mes yeux, il est devenu par la suite entièrement l'un de nous, un homme avec ses failles, ses doutes, ses défauts... et ses élans de génie qui transcendent tout le reste. Et puis il y a eu les autres, tous ces compositeurs que j'écoutais au quotidien, ces interprètes que je voyais en concert chaque semaine, ces découvertes d’œuvres dont je ne me remettrais pas toujours.
Aucun doute, je n'aurais jamais pu acheter un tel t-shirt, sauf peut-être si j'avais rayé le « was » et remplacé par « is and always will be »...
samedi 29 juin 2013
Despertar
Ce matin, je me suis réveillée dans un nouveau lieu. Le tourbillon des derniers jours m'a évidemment empêchée de lire plus de quelques pages éparses, mais ma bibliothèque est déjà placée, voilà l'essentiel, non? Certains amis venus m'aider hier ont un peu froncé les sourcils quand ils ont constaté que ma PAL s'étalait sur deux rayons complets. (Non, elle n'est pas classée, tout le reste, si!) Il faut bien admettre qu'avant, elle était un peu mieux dissimulée, car éparpillée en plus d'un lieu... Mais l'été, c'est fait pour jouer... et lire, non?
J'ai cherché ce que j'écouterais comme première pièce pour vérifier si j'avais bien connecté mes haut-parleurs d'ordinateur (j'ai réussi du premier coup, mauvaises langues). Le vainqueur a été Carlos Paredes, découvert lors du spectacle de nanodanse Dance & Cry, je que je partage avec vous ici...
J'ai cherché ce que j'écouterais comme première pièce pour vérifier si j'avais bien connecté mes haut-parleurs d'ordinateur (j'ai réussi du premier coup, mauvaises langues). Le vainqueur a été Carlos Paredes, découvert lors du spectacle de nanodanse Dance & Cry, je que je partage avec vous ici...
jeudi 6 juin 2013
La magie de la musique
« Le sentiment que j’ai de la vie est un sentiment musical – la musique, comme chacun sait, accomplissant ce prodige de disparaître dans le même temps où elle apparaît. » (Christian Bobin, Autoportrait au radiateur)
J'ai joué dans toutes sortes de circonstances dans ma vie: dans des cocktails mondains quand personne (ou presque) n'écoute, pour les enfants qui attendaient à l'arrière-scène lors du 50e anniversaire de mon école primaire (les adultes étant trop occupés à échanger des souvenirs sans doute), lors de mariages, en récitals privés, menant un(e) ami(e) aux larmes, dans des concerts d'élèves, dans des concours plus ou moins importants, en tant qu'accompagnatrice (pianiste collaboratrice plutôt), à quatre-mains, à deux pianos, dans un musée... Rien de comparable encore à l'expérience de jouer dans une église, sur un clavier électronique, lors de l'accueil de parents, amis et connaissances, pendant l'heure et quart précédant les funérailles du père de quatre de mes anciens élèves, fauché en quelques mois par un cancer fulgurant, à 46 ans.
Le matin, je suis partie en métro avec 4 ou 5 kilos de partitions sur le dos: quelques pages classiques, mais surtout de la pop, le père étant guitariste amateur, fervent amateur notamment des Beatles et des groupes anglais des années 1960 et 1970. Quand j'ai parlé à la mère dimanche des détails techniques, j'entendais à l'arrière-plan deux des filles, l'une chantant, l'autre l'accompagnant au piano. Cela faisait semble-t-il une heure et demie qu'elles épluchaient une anthologie des Beatles (arrangée pour piano facile) que je leur avais dénichée il y a quelques années. J'ai réalisé combien j'étais bénie d'avoir pu leur transmettre la grammaire et la syntaxe du langage universel.
L'émotion était bien sûr à son comble. On ne quitte pas cette vie de la même façon dans la force de l'âge que lorsque centenaire. L'église était aussi bondée qu'à la messe de minuit, l'homme, l'un des plus gentils et intègres que j'aie jamais rencontrés, en ayant visiblement touché des centaines d'autres. Je revoyais les enfants pour la première fois depuis un an, si dignes dans leurs vêtements sombres. Un instant, j'ai craint de ne pas avoir assez de bras, d'amour, pour les envelopper tous.
Je suis rentrée et me suis assise derrière le clavier, à moins d'un mètre de la photo du défunt, posée sur un chevalet. Lui pourrait m'entendre parfaitement, me souffler à l'oreille peut-être ce que j'allais jouer. J'ai interprété Bach, Satie, puis me suis laissée porter, parfois par les demandes spéciales des enfants. Tous sont venus à un moment ou l'autre près du piano, même si deux ont maintenant changé d'instrument. La puce, que j'ai connue même avant sa naissance, s'est plantée pendant de longues minutes à mes côtés, parfaitement attentive. Le garçon est venu s'informer à un moment si je ne m'« ennuyais pas trop » et a tourné mes pages. La troisième s'est assise dans la première rangée avec ses amies, pour discuter en musique sans doute. L'aînée me raconterait après la cérémonie qu'elle avait commencé à apprendre Stairway to Heaven, mais n'avait pas eu le temps de se rendre jusqu'au bout avant que... La mère aussi a pris le temps de respirer quelques minutes, dans le calme, alors que je jouais Smile de Charlie Chaplin. Nos regards se sont croisés quelques secondes, un sourire spontané est né. La musique, une fois encore, démontrait sa toute-puissance.
Merci à Jules de nous avoir réunis. Merci aux proches qui, à distance, m'ont accompagnée en pensée pendant ces instants d'une rare intensité. Merci la musique, langue maternelle, langue universelle. Merci la vie, même quand tu sembles un peu chiche.
« La mort n’éteint pas la musique, n’éteint pas les roses, n’éteint pas les livres, n’éteint rien. » (Christian Bobin, Un assassin blanc comme neige)
samedi 7 juillet 2012
Retrouver son rythme
De retour en sol natal depuis moins de 48 heures, les yeux encore remplis d'images, la tête de souvenirs. Le Berry, la Nièvre, Lille, Paris, l'Alsace, Bâle, Freiburg, Versailles ont défilé tour à tour, au gré des rencontres, des inspirations. Je n'aurai au final vu que quelques expos: une dédiée à Jeff Koons à la Fondation Beyeler en Suisse (j'admets que j'ai nettement préféré la collection permanente et l'installation vidéo de Philippe Parreno), l'expo Gerhard Richter au Centre Pompidou (absolument magnifique, un panorama très complet de l'artiste), le musée Unterlinden à Colmar (et son célèbre retable) et les structures oniriques et farfelues de Joana Vasconcelos à Versailles (je ne suis toujours pas entièrement convaincue de la réussite de leur cohabitation avec les pièces des plus classiques du lieu). Je n'ai assisté qu'à un seul concert, auquel participait l'aîné de mon amie, mais ai pu toucher moi-même un instrument lors des trois jours passés en Alsace et ai accompagné le cadet de mon amie moins d'une heure après avoir débarqué dans le Berry.
Côté lecture: quelques essais plus théoriques (L'espèce fabulatrice de Nancy Huston, qui dormait dans ma PAL depuis l'avant-dernier salon du livre de Montréal et Écrire de Marguerite Duras, ponctué de flèches auto-collantes, citation que je recopierai maintenant), quelques chapitres de Der kleine Prinz (il faut bien travailler un peu, même en vacances!), des nouvelles de Laurent Gaudé, un livre de Delphine de Vigan acheté à la FNAC avec deux autres titres. Je me suis plongée dans le Journal de Marie Uguay lors du vol de retour, mais mes intentions d'avaler des pages et des pages ont été mises KO par une lumière de plafond défectueuse. J'ai donc fermé les yeux, histoire de mater à l'avance le décalage horaire.
Quelques photos choisies avant de clore ce chapitre.
Côté lecture: quelques essais plus théoriques (L'espèce fabulatrice de Nancy Huston, qui dormait dans ma PAL depuis l'avant-dernier salon du livre de Montréal et Écrire de Marguerite Duras, ponctué de flèches auto-collantes, citation que je recopierai maintenant), quelques chapitres de Der kleine Prinz (il faut bien travailler un peu, même en vacances!), des nouvelles de Laurent Gaudé, un livre de Delphine de Vigan acheté à la FNAC avec deux autres titres. Je me suis plongée dans le Journal de Marie Uguay lors du vol de retour, mais mes intentions d'avaler des pages et des pages ont été mises KO par une lumière de plafond défectueuse. J'ai donc fermé les yeux, histoire de mater à l'avance le décalage horaire.
Quelques photos choisies avant de clore ce chapitre.
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Le lion de la fontaine St-Michel porte encore fièrement le carré rouge. |
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Père Lachaise (photo Lucie Renaud) |
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La tombe de Chopin (photo Lucie Renaud) |
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Le retable d'Unterlinden (photo: Lucie Renaud) |
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Un autre segment du même retable (photo: Lucie Renaud) |
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Les grandes orgues de Versailles (photo: Lucie Renaud) |
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La musique est partout, même dans les jardins de Versailles (photo: Lucie Renaud) |
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(photo: Lucie Renaud) |
samedi 23 juin 2012
Là-bas, là-bas
Au moment où vous lirez ces lignes, je serai en sol français, dans une salle du Conservatoire de Bourges ou sur la route de Nevers. Si je me fie à la non-coopération des réseaux wifi la dernière fois que j'étais à Paris, je ne veux pas vous promettre que je pourrai venir vous faire un petit coucou ou vous proposez une recension de livres ici ou là. Mais n'ayez crainte, je vous propose d'ici mon retour un jukebox éclectique, pour que vous ne vous ennuyiez pas trop de moi.
dimanche 3 juin 2012
Apprendre à dire au revoir
Et puis, il y a les destins de la vie. C'est ainsi qu'il y a deux jours, j'ai dû dire au revoir à une petite puce qui ensoleillait mes vendredis après-midi. Un sourire qui me faisait craquer à chaque fois, une voix tout en douceur, un pétillant dans le regard, même quand je faisais semblant de la sermonner par: « Non, mais tu veux ma mort? Tu as encore oublié ton fa dièse! » Elle riait alors de bon cœur et reprenait, sans protester.
Vendredi, elle est arrivée sérieuse comme un pape. Elle m'a tendu une boîte de chocolats, puis m'a simplement dit: « Merci de m'avoir appris la musique. » Ensuite, elle a sorti un coin-coin, qu'elle avait fait elle-même. Au départ, m'a expliqué sa mère, elle voulait faire un dessin de nous deux au piano, mais l'instrument est si difficile à dessiner (et à maîtriser). Sous les cases, au lieu des gages, elle avait simplement écrit les huit notes de la gamme, pour que je puisse faire chanter les autres. J'ai trouvé son concept parfaitement génial.
Elle déménage de l'autre côté de la grande mare et, à partir de maintenant, je devrai me contenter de la regarder grandir de loin. Je croise les doigts qu'elle trouve un prof sympa là-bas, à Lyon, qui saura faire germer la graine qui a été semée.
lundi 7 mai 2012
Apprendre... toujours
La compression d'horaire des derniers jours, avec le colloque, la couverture du Festival Vues d'Afrique (je vous reviens bientôt avec deux autres recensions) et la gestion des répétitions pré-concert d'élèves a relevé par moments de l'utopie la plus pure. J'admets que, vendredi en début de soirée, quand les derniers élèves ont quitté mon home après la répétition générale, je me suis posée de sérieuses questions. Pourquoi n'avaient-ils pas réussi à assurer? Les avais-je si mal préparés? Ne leur avais-je consacré assez d'énergie, au milieu du tourbillon? Devais-je considérer de laisser l'enseignement du piano à d'autres? N'étais-je pas complètement cinglée de vouloir jouer Vallée d'Obermann en ces circonstances? Je me suis dit qu'il y avait certainement une leçon à tirer de tout cela, mais je n'avais pas prévu laquelle.
Hier matin, je me suis éveillée, fébrile, comme tous les jours de concert. J'ai juré contre l'imprimante qui ne collaborait pas, ai fini par mater la bête et glissé des dizaines de programmes dans une pochette. Dans le métro, je me suis plongée non pas dans un livre, comme à l'habitude, mais dans ma partition, réfléchissant à certaines inflexions, entendant intérieurement le texte, assurant certaines progressions harmoniques. J'ai quand même eu le temps de saisir un ou deux regards interrogatifs, sans que personne n'émette le moindre commentaire. Juste avant le concert, alors que j'échangeais avec la mère d'un élève, je me suis préparée au pire, à la possibilité que, peut-être, il y aurait des glissements de terrain fâcheux, que je devrais peut-être consoler l'un ou l'autre. Et puis l'heure a sonné.
Un petit laïus de présentation, histoire de rappeler certaines consignes de déplacements (vieux planchers de bois obligent). Premier imprévu: une mère se lève spontanément, pour s'adresser au public, me remerciant d'avoir une fois encore organisé un tel événement. Sourire vaguement troublé de ma part. La première élève, quatrième d'une fratrie, que je connais depuis sa conception, s'est avancée, visiblement traumatisée, si petite, ne pensant pas pouvoir « faire comme les grands ». Grâce à quelques câlins et la présence de sa maman bonne fée à ses côtés, elle a fini par accepter de plonger. Impression de vertige partagée. Le concert pouvait maintenant vraiment commencer.
Tous, l'un après l'autre, se sont avancés, se sont assis à l'instrument, ont joué le tout pour le tout. Bien sûr, quelques imprécisions rythmiques se sont greffées, ainsi que quelques flous de mémoire (sans qu'aucun pourtant ne s'arrête). Mon cœur bondissait dans ma poitrine à chaque fois, mais je combattais vaillamment. C'était à mon tour de pratiquer le fameux lâcher-prise. Je n'aurais de contrôle que sur mon interprétation et rien d'autre. Je me suis accrochée, parce que la musique était présente, dans la délicatesse d'un phrasé, dans la profondeur d'un accord, dans une respiration assumée, dans les sourires, dans les regards de connivence échangés.
Quand les flashs des caméras des parents ont cessé de crépiter, après la traditionnelle « photo de famille », je me suis rappelé qu'au fond, je faisais un métier fabuleux, que je n'étais pas encore prête à arrêter de transmettre, de partager, de rire avec eux, de grincer des dents à l'occasion... d'apprendre.
Hier matin, je me suis éveillée, fébrile, comme tous les jours de concert. J'ai juré contre l'imprimante qui ne collaborait pas, ai fini par mater la bête et glissé des dizaines de programmes dans une pochette. Dans le métro, je me suis plongée non pas dans un livre, comme à l'habitude, mais dans ma partition, réfléchissant à certaines inflexions, entendant intérieurement le texte, assurant certaines progressions harmoniques. J'ai quand même eu le temps de saisir un ou deux regards interrogatifs, sans que personne n'émette le moindre commentaire. Juste avant le concert, alors que j'échangeais avec la mère d'un élève, je me suis préparée au pire, à la possibilité que, peut-être, il y aurait des glissements de terrain fâcheux, que je devrais peut-être consoler l'un ou l'autre. Et puis l'heure a sonné.
Crédit photo: Lucie Renaud |
Tous, l'un après l'autre, se sont avancés, se sont assis à l'instrument, ont joué le tout pour le tout. Bien sûr, quelques imprécisions rythmiques se sont greffées, ainsi que quelques flous de mémoire (sans qu'aucun pourtant ne s'arrête). Mon cœur bondissait dans ma poitrine à chaque fois, mais je combattais vaillamment. C'était à mon tour de pratiquer le fameux lâcher-prise. Je n'aurais de contrôle que sur mon interprétation et rien d'autre. Je me suis accrochée, parce que la musique était présente, dans la délicatesse d'un phrasé, dans la profondeur d'un accord, dans une respiration assumée, dans les sourires, dans les regards de connivence échangés.
Quand les flashs des caméras des parents ont cessé de crépiter, après la traditionnelle « photo de famille », je me suis rappelé qu'au fond, je faisais un métier fabuleux, que je n'étais pas encore prête à arrêter de transmettre, de partager, de rire avec eux, de grincer des dents à l'occasion... d'apprendre.
jeudi 3 mai 2012
Retrouver le piano
Après avoir passé de longues heures passées dans les mots, à établir des liens entre musique classique et autofiction, écouter des communications de spécialistes, échanger sur nos lectures ou nos recherches, il fait bon de retrouver le piano.
À quelques jours à peine du concert des élèves, j'avais peur de m'assoir à l'instrument hier, après plus d'une semaine passée loin de la bête - ou de la belle, selon l'humeur de l'instrument. C'est peut-être bien parce que j'ai l'impression d'arriver de voyage (avec ce que cela implique d'émotions mixtes), même si je n'ai pas quitté le sol montréalais. À la place, l'Algérie, la Tunisie, le Maroc, la France et l'Italie sont venus à moi. Une effervescence de rencontres, de lieux vus autrement, des discussions qui auraient pu se poursuivre pendant des heures, de furieux fous rires, une curiosité de connaître l'autre, l'ailleurs.
Je commençais déjà à considérer un plan B ou C (moins astreignant) d’œuvre à interpréter en clôture de concert dimanche mais le piano, compréhensif, ne m'en a pas tenu rigueur, quel bonheur! Je maintiendrai donc mon choix initial, duquel la littérature n'est nullement exclu, puisque pour écrire Vallée d'Obermann, Liszt s'est inspiré d'un roman épistolaire de Senancourt.
À quelques jours à peine du concert des élèves, j'avais peur de m'assoir à l'instrument hier, après plus d'une semaine passée loin de la bête - ou de la belle, selon l'humeur de l'instrument. C'est peut-être bien parce que j'ai l'impression d'arriver de voyage (avec ce que cela implique d'émotions mixtes), même si je n'ai pas quitté le sol montréalais. À la place, l'Algérie, la Tunisie, le Maroc, la France et l'Italie sont venus à moi. Une effervescence de rencontres, de lieux vus autrement, des discussions qui auraient pu se poursuivre pendant des heures, de furieux fous rires, une curiosité de connaître l'autre, l'ailleurs.
Je commençais déjà à considérer un plan B ou C (moins astreignant) d’œuvre à interpréter en clôture de concert dimanche mais le piano, compréhensif, ne m'en a pas tenu rigueur, quel bonheur! Je maintiendrai donc mon choix initial, duquel la littérature n'est nullement exclu, puisque pour écrire Vallée d'Obermann, Liszt s'est inspiré d'un roman épistolaire de Senancourt.
samedi 17 mars 2012
Pianiste collaborateur
La nature de mon instrument fait que ma relation avec lui se vit en général dans la solitude. Je m'assois (le plus difficile reste de s'en convaincre, après, cela va tout seul), je travaille, je répète, je fustige, je décortique, je trouve des façons de contourner le problème, je le règle si tout va bien (sinon je sors mon langage grossier), puis j'aborde une nouvelle section. Oui, vingt (mille) fois sur le métier, remettez votre ouvrage. Question d'habitude, de discipline, on s'y frotte et on s'y fait.
Et puis, parfois, heureusement, il y a le plaisir du partage: quand je présente une nouvelle pièce à un élève, quand un(e) ami(e) me demande de lui jouer une page en particulier ou me laisse carte blanche et, bien sûr, quand je dois jouer en concert. J'ai réalisé à l'âge de 14 ans que j'aimais jouer avec un(e) autre. L'idée de diviser la pression par deux, par trois, par quatre, m'a tout de suite séduite, mais aussi les heures de répétition préparatoires en commun, moments qui permettent d'essayer de nouvelles approches, de réfléchir à une interprétation de façon commune, de rigoler bien souvent. Sans oublier le simple plaisir de réellement dialoguer à travers les instruments.
Mardi dernier, je jouais en concert avec un saxophoniste, que je connais depuis des lustres. Nous ne sommes pas réellement amis; quand nous ne jouons pas ensemble, nous ne nous écrivons pas, nous parlons rarement. Pourtant, à force de le fréquenter en répétition et sur scène, j'ai appris à le connaître. Sa fixation pour le métronome m'a horripilée pendant un temps; maintenant, elle me fait sourire. Depuis le temps, il a compris que, le jour du concert, il devra de toute façon se fier à mon sens de la pulsation plutôt qu'à un tic-tac mécanique. Ses expressions pourraient parfois sembler manquer de fini; pourtant, je sais combien il est cultivé. Il n'aime rien tant que de parler d'interprétations remarquables, de pureté de sonorité, des grands instrumentistes d'aujourd'hui, mais aussi du passé. Il a lu tout Dostoïevski, aime marcher sur le bord du Richelieu. Quand il fait de l'insomnie, il écoute des vidéos de musique classique. Mais surtout, quand il approche son instrument de ses lèvres, il se transforme illico en musicien. Il lui arrive de rater une entrée parce qu'il m'écoute trop attentivement. Il s'impatiente contre lui-même quand une note grave ne sort pas correctement ou que son anche se révèle pâteuse. Il ricane quand mes doigts s'emmêlent, mais jamais méchamment.
Lors de la répétition pré-concert, nous avons retrouvé la Sonatine (écrite à l'origine pour violon) de Schubert. Dès la première lecture l'année dernière, nous étions sur la même longueur d'ondes. Aucune hésitation au niveau des respirations, les contrastes s'établissaient d'eux-mêmes, les rubatos ne semblaient jamais artificiels. Certains pourraient considérer l’œuvre moins importante dans le catalogue du compositeur, mais j'aime la façon dont elle nous unit, nous permet de dialoguer à cœur ouvert, d'aplanir tout différend, de transmettre la beauté pure du langage. Nous avons terminé le premier mouvement et il n'a pu s'empêcher de s'exclamer: « C'est l'fun de faire de la musique! » Je me suis contentée de sourire...
Une des œuvres au programme de ce concert... Le troisième mouvement est ici.
Et puis, parfois, heureusement, il y a le plaisir du partage: quand je présente une nouvelle pièce à un élève, quand un(e) ami(e) me demande de lui jouer une page en particulier ou me laisse carte blanche et, bien sûr, quand je dois jouer en concert. J'ai réalisé à l'âge de 14 ans que j'aimais jouer avec un(e) autre. L'idée de diviser la pression par deux, par trois, par quatre, m'a tout de suite séduite, mais aussi les heures de répétition préparatoires en commun, moments qui permettent d'essayer de nouvelles approches, de réfléchir à une interprétation de façon commune, de rigoler bien souvent. Sans oublier le simple plaisir de réellement dialoguer à travers les instruments.
Mardi dernier, je jouais en concert avec un saxophoniste, que je connais depuis des lustres. Nous ne sommes pas réellement amis; quand nous ne jouons pas ensemble, nous ne nous écrivons pas, nous parlons rarement. Pourtant, à force de le fréquenter en répétition et sur scène, j'ai appris à le connaître. Sa fixation pour le métronome m'a horripilée pendant un temps; maintenant, elle me fait sourire. Depuis le temps, il a compris que, le jour du concert, il devra de toute façon se fier à mon sens de la pulsation plutôt qu'à un tic-tac mécanique. Ses expressions pourraient parfois sembler manquer de fini; pourtant, je sais combien il est cultivé. Il n'aime rien tant que de parler d'interprétations remarquables, de pureté de sonorité, des grands instrumentistes d'aujourd'hui, mais aussi du passé. Il a lu tout Dostoïevski, aime marcher sur le bord du Richelieu. Quand il fait de l'insomnie, il écoute des vidéos de musique classique. Mais surtout, quand il approche son instrument de ses lèvres, il se transforme illico en musicien. Il lui arrive de rater une entrée parce qu'il m'écoute trop attentivement. Il s'impatiente contre lui-même quand une note grave ne sort pas correctement ou que son anche se révèle pâteuse. Il ricane quand mes doigts s'emmêlent, mais jamais méchamment.
Lors de la répétition pré-concert, nous avons retrouvé la Sonatine (écrite à l'origine pour violon) de Schubert. Dès la première lecture l'année dernière, nous étions sur la même longueur d'ondes. Aucune hésitation au niveau des respirations, les contrastes s'établissaient d'eux-mêmes, les rubatos ne semblaient jamais artificiels. Certains pourraient considérer l’œuvre moins importante dans le catalogue du compositeur, mais j'aime la façon dont elle nous unit, nous permet de dialoguer à cœur ouvert, d'aplanir tout différend, de transmettre la beauté pure du langage. Nous avons terminé le premier mouvement et il n'a pu s'empêcher de s'exclamer: « C'est l'fun de faire de la musique! » Je me suis contentée de sourire...
Une des œuvres au programme de ce concert... Le troisième mouvement est ici.
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