jeudi 6 août 2015

Bach au Parc Lafontaine

Un après-midi paresseux d'été, quand le temps oscille au gré du vent et des vaguelettes dansées par les pieds qui clapotent dans l'étang. Les citadins ont pris possession du parc Lafontaine, l'utilisent pour échanger, lire, dormir, oublier qu'à quelques dizaines de mètres à peine, la métropole continue à s'agiter frénétiquement.

Ils sont deux, qui se retrouvent enfin, exaltés par l'instant. Ils rigolent comme des adolescents en contemplant cette dame d'un âge certain qui semble vouloir apprivoiser un des canards placides, s'attendrissent quand le chien attend patiemment que sa balle revienne près du bord. Il glousse quand le petit homme se lève du banc qui l'accueillait et fonce vers un ailleurs d'une démarche chaloupée de top-modèle. Elle remarque le vieillard en chaise roulante, vêtu de l'horrible chemise de nuit verte, en permission, qui fait le tour du parc le sourire aux lèvres avant de retrouver lumière glauque et couloirs javellisés.

Les minutes se sont liquéfiées en heures avant que l'appel du glacier ne se fasse plus pressant. Ils reprennent le sentier quand, hypnotisés par le son d'une suite pour violoncelle de Bach, ils bifurquent. L'instrumentiste est assis sur un banc, son reflet se fondant dans l'onde alors que les notes s'effilochent dans la douceur d'une fin d'après-midi. À ses côtés, en apparence immobile, un badaud écoute, dans une pose qui rappelle les vases grecs anciens. Il n'ose troubler le fil de l'inspiration mais, de temps en temps, son corps oscille très légèrement au son de ces danses oubliées. De l'autre côté de l'étang, ils écoutent, ils observent. Les relents de musique les enveloppent, se fichent profondément en eux. En silence, ils reprennent la route.

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