Voyage au plus profond de l’enfer, celui de la guerre, de la haine, de l’indifférence, de soi, ce premier roman signé Rawi Hage est d’une force et d’une portée remarquables. Dans une langue directe mais imagée, sise à la frontière entre les films d’action américains et les récits fantaisistes, très peu linéaires, des pays arabes, Hage nous plonge dès les premières pages dans un univers étouffant, malsain, où la guerre devient toile de fond plutôt que sujet, où l’horreur perle au quotidien. Malgré les dix mille bombes qui s’abattent sur Beyrouth, la vie poursuit son cours, tout sauf un long fleuve tranquille, les histoires du quotidien tentant de s’extraire de l’Histoire. Des liens se tissent : amitié fraternelle à la limite du passionnel entre Bassam et son ami Georges – surnommé de Niro –, histoire d’amour (pour elle), de peau (pour lui) entre Bassam et Rana, relation trouble entre le narrateur et Rhéa en troisième partie. Des vies sont transformées, irrévocablement, sous nos yeux. Tout est décuplé par la puissance de la guerre, par l’écriture sculptée de l’auteur. « Dans les rues désertes, les maisons paraissaient voilées, étranges. Le sang de la petite fille coulait sur mes doigts et le long de mes cuisses. Je prenais un bain d’hémoglobine. Le sang est plus sombre que la couleur rouge, plus doux que la soie; sur la main, il est chaud comme l’eau d’un bain avec du savon. Ma chemise se teignait de pourpre royal. Je criais, j’appelais la petite fille par son nom, mais ma chemise buvait son sang; j’aurais pu la tordre et remplir la mer Rouge, y plonger mon corps, la revendiquer, faire le tour de ses bords et me baigner dans son soleil. » (p. 29)
La musique et l’écriture ont été de tout temps les deux pôles de la vie créatrice de l'auteure. Ce site se veut donc un hommage à la musique (particulièrement classique) et à la littérature, mais aussi au théâtre et aux autres manifestations artistiques.
samedi 15 mars 2008
Parfum de poussière: poussière de rage
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