Raoul Sosa semble à prime abord un homme de peu de mots. Pourtant, ses gestes mesurés, son regard pénétrant, son rire vibrant et surtout son jeu d’une extrême poésie sont d’une rare éloquence. Quand on écoute attentivement Raoul Sosa, on perçoit les rêves d’un tout jeune garçon né à Buenos Aires en 1939 qui, dès l’âge de cinq ans, démontre un talent exceptionnel pour la musique. On discerne l’adolescent qui accumule des premiers prix et s’adonne déjà à la composition pour exprimer une autre facette de sa personnalité. On découvre le jeune homme qui, après des débuts au Teatro Colón en 1959 et une participation aux finales du Concours international Van Cliburn en 1962, obtient la bourse tant espérée pour aller se perfectionner à Paris et Salzbourg avec Madga Tagliafero et Stanislav Neuhaus. On entend la virtuosité et le lyrisme d’un musicien qui a convaincu haut la main les jurys de nombreux concours internationaux pendant la seconde moitié des années 1960. On distingue aussi l’amoureux qui a suivi sa belle au Québec et le pédagogue dévoué qui, depuis 1967, partage sa flamme avec les étudiants du Conservatoire de musique de Montréal. On ressent les vagues d’émotions successives qu’il a fait vivre au public d’ici et d’ailleurs alors qu’il présentait des programmes mettant en lumière les œuvres-phares du répertoire pianistique. On devine aussi la fissure de l’artiste qui, au zénith de ses capacités techniques, a dû s’approprier la musique d’une nouvelle façon, à la suite d’un accident qui l’a privé de l’usage adéquat de sa main droite en 1980.
Pour lire le reste de l'article sur ce pianiste exceptionnel, on accède au PDF du dernier numéro de La Scena Musicale, ici. L'article est en pages 14 et 15.
On peut l'entendre (en cliquant le lien dans la colonne de gauche) dans l'Étude opus 10 no 6 de Chopin/Godowsky nous ravir les oreilles avec sa seule main gauche.
Addendum 6 mars: j'ai reçu un appel de M. Sosa tout à l'heure, que je sentais presque rougir au bout du fil, très content du portrait. Je pense qu'il a dû se dire que, enfin, après 40 ans ici, on reconnaissait son travail et son talent... Je n'ai été qu'inspirée par le sujet...
5 commentaires:
J'ai un respect immense pour ceux qui ont réusi à compenser la perte d'une main. A fortiori un pianiste..
Une qualité fondamentale de M. Sosa est sans nul doute sa profonde intégrité et nul compromis dans son art...
J'ai la plus grande admiration pour son courage et l'exquise sensibilité de cette interprétation. Merci Lucie pour cette découverte et bravo pour ton article.
Et, petit velours dans tout ça, M. Sosa m'a téléphoné la semaine dernière pour me remercier de l'article. Il était particulièrement craquant parce qu'on le sentait presque rougir au bout du fil!
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