La télé nous réserve parfois d'agréables surprises, au moment où on s'y attend le moins. Quand je l'ai allumée hier, je n'espérais rien, hormis peut-être quelque film de saison ou une émission pétrie de bons sentiments qui sonne creux. Et pourtant... Radio-Canada avait décidé de présenter le documentaire Le cœur d'Auschwitz, véritable inspiration de courage et d'espoir. Le cœur d'Auschwitz est un objet étonnant: une petite carte de vœux qui se déplie comme un origami, fabriquée
clandestinement par des prisonnières, pour l'anniversaire de l'une d'entre elles, Fania, le 12
décembre 1944. À l'intérieur, des phrases en hébreu, en français, en polonais, qui traversent l'âme, des décennies après. « Avec les autres, il faut rire. Quand
tu pleures, cache-toi. » ou « Quand tu seras vieille, mets tes lunettes et rappelle-toi de mon nom. » ou encore « Notre victoire, ce sera de ne pas
mourir. »
En voyant l'objet, exposé au Centre commémoratif de l'holocauste à Montréal (il faudra absolument que j'aille enfin y faire un tour), le documentariste Carl Leblanc a su qu'il tenait là quelque chose, sans trop savoir quelle forme le film prendrait. En effet, comment faire revivre cette histoire improbable de courage, le cœur de papier étant passé d'une main à l'autre, dissimulé par toutes celles qui l'ont portée, même lors de la Marche de la mort de janvier 1945? Il a retrouvé Fania Sainer (dont l'anniversaire était alors souligné), qui habite maintenant Toronto, s'est ensuite jeté sur les traces des autres, de l'innommable passé, de façon plus intuitive qu'objective.
Si la facture du documentaire reste assez conventionnelle et que par moments, on s'interroge sur l'insistance avec laquelle Leblanc presse les survivantes de se souvenir d'une époque qu'elles ont tout fait depuis pour oublier, on sort du visionnement bouleversé, bien sûr par l'ampleur du génocide (malheureusement pas le dernier), mais surtout par la luminosité qui perce à travers tout cela. De voir ces grand-mères, se retrouvant après toutes ses années, dénudant leurs avant-bras pour dire à haute voix le numéro tatoué, d'entendre ces enfants d'une des signataires évoquer la générosité de leur mère aujourd'hui décédée, d'être témoin de la tendresse d'une classe d'enfants du primaire qui offre à Fania un nouveau cœur de papier, qui comprend des messages en français, anglais, chinois, espagnol et allemand, rappelle que, au-delà de l'horreur, la vie continue certes, mais surtout continue d'émouvoir.
Un document pédagogique conçu pour les enfants du 3e cycle primaire en lien avec ce documentaire.
6 commentaires:
C'est fantastique, de retour de voyage hier soir, fatigué, trop peut-être pour aller me coucher, j'ai fait exactement comme vous. Assis devant mon poste télé, je me suis mis à zapper, sans conviction, jusqu'à ce que je tombe sur les débuts du film "Le coeur d'Auschwitz". Ce documentaire m'a profondément ému. Cela démontre comme il est important de briser l'anonymat de grands drames de l'humanité.
Bienvenue ici!
J'ai été si troublée que, après le visionnement, j'ai enregistré le tout (heure de Vancouver) et y reviendrai (surtout que j'avais raté le tout début).
Madame,
Comme vous avez raison...
Étant prof au primaire depuis 28 ans,lorsque j'étais en 5e année,je présentais un document de TV5 sur l'histoire d'un grand-père qui a refait le chemin avec ses enfants et petits enfants de Birkenau jusqu'à sa libération.J'ai été touché de la même façon par ce dernier.Bravo à Carl Leblanc et à vous pour votre blog!
Jean-François Laferté
Terrebonne
Bienvenue également à vous!
Je suis ravie de constater que ce documentaire a su vous toucher de façon aussi essentielle également. Alors qu'on se demande souvent si l'humanité ne court pas à sa perte, cela permet de relativiser les choses.
« Quand tu seras vieille, mets tes lunettes et rappelle-toi de mon nom. » Celle qui a écrit ça c'est celle qui a fait le coeur ou celle qui ne voulait plus en parler?
C'est l'un des textes dans le cœur lui-même, mais qui a écrit quoi?
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