Trois personnages, étrangers l'un à l'autre: un gardien de musée qui tente d'effacer son passé de prisonnier et de renouer avec sa fille adolescente, une jeune peintre qui vient d'apprendre qu'elle deviendra bientôt mère, un médecin revenu de tout mais dont la flamme refuse de s'éteindre totalement. Pourtant, leurs destins vont se croiser, dans la salle d'un musée, face à une toile de Van Dyck faisant partie d'une exposition itinérante. Le personnage du tableau, Virginio Cesarini, devient miroir, prolongement, confident de ces trois esseulés - mais ces conversations ne seraient-elles donc que le fruit de leur imagination?
Guy Mouton explore avec ce premier roman la notion de portrait: l'œuvre picturale elle-même bien sûr (qu'on peut apprécier à la fin du volume, bonne idée de l'auteur et de l'éditeur), la composition photographique (le gardien manie la Leica avec doigté) mais surtout peinture psychologique des personnages, la superposition permettant de découvrir un ensemble plutôt touchant, dévoilé en demi-teintes. Quand on s'y arrête, on réalise qu'il se passe en fait si peu de choses dans la vie des protagonistes, pourtant tous trois à une période-charnière de leur existence. « Pourquoi le monde leur échappe-t-il? Pourquoi doivent-ils découvrir une œuvre d'art pour se rappeler la beauté des choses qui les entourent déjà? » (p. 254) Malgré tout, grâce à la plume plus tendre que mordante de l'auteur, on les suit sans hésiter. Avait-on besoin de faire intervenir Cesarini comme « personnage »? Peut-être pas mais l'élément déclencheur reste intéressant. Il faut néanmoins admettre que je ne regarderai plus jamais de la même façon un de ces portraits convenus de commande dans une salle déserte de musée.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire