Des histoires d'adultère, on en a sans doute lues des centaines au fil des ans, qu'elles soient signéespar de grands noms ou d'illustres inconnus. Pourtant, peu de livres sont consacrés à ceux qui restent, que l'on a quittés et sans doute encore bien moins qui mettent en scène les deux exclus qui se rencontrent, se racontent et tissent, le temps d'un voyage entre deux escales sur le Mékong, des liens qui leur deviennent propres. On ne saura jamais pourquoi deux membres de ce quadrilatère ont quitté un matin le navire, ni même s'ils étaient amoureux. On découvrira à peine quelques bribes de leur vie passée, à travers des vêtements laissés derrière, un souvenir, un secret échangé, les deux protagonistes refusant les faux-fuyants, sans être encore entièrement capables de se réinscrire dans une réalité qu'ils n'ont pas choisie. Le propos est ailleurs.« Et il lui vint une étrange idée : n’était-ce pas une chance, finalement, que le hasard les ait fait se rencontrer. Peu importaient les circonstances, peu importait qu’ils soient tous les deux embarqués dans une histoire dont ils étaient les victimes, ils étaient ensemble et cela lui suffisait. »
Catherine Guillebaud, que je découvre ici grâce à une pioche plutôt chanceuse au rayon nouveautés de la Grande Bibliothèque, possède une plume d'une grande sensibilité, qui refuse pourtant toute sensiblerie. Les sentiments s'esquissent peut-être en demi-teintes, mais ne manquent jamais de relief. On se retrouve rapidement happé par ce huis-clos accepté, cette fuite à l'intérieur de deux êtres comme tant d'autres qui ne souhaitent pas faire face aux regards plus ou moins appuyés des autres passagers de cette croisière où tous ne s'amusent pas avec désinvolture.
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