Photo: Yves Renaud |
Même
si l’œuvre se déroule en cinq langues (français, anglais et allemand pour les
militaires, italien pour la scène d’opéra mozartien, adroite mise en abyme, et
latin pour la messe de Noël commune) et que le compositeur utilise un
vocabulaire musical distinct pour chacune des armées (on y retrouvera par
exemple des pastiches de Bach, des foisonnements de couleurs orchestrales
indéniablement français et l’intégration de la cornemuse ou de l’harmonica sans
que cela ne semble plaqué), le tout est adroitement lié par un leitmotiv
discret aux cordes. Certains pourraient qualifier l’approche de postmoderniste,
mais ici, cela s’articule autrement, laissant transparaître la palette unique
de Puts. (Silent Night peut
assurément être considéré dans le prolongement des symphonies du compositeur.)
La
distribution se révèle ici sans faille aucune, autant les solistes que le chœur,
impeccablement préparé (tout à fait exceptionnel dans « Sleep »). Rien n’a
été laissé au hasard en cours de répétition et cela s’entend. Marianne Fiset en
Anna Sørensen, ange des champs de bataille et amoureuse prête à tout pour ne
pas être séparée du ténor Nikolaus Sprink (tout aussi excellent Joseph Kaiser),
convainc du début à la fin. Philip Addis en Lieutenant
Audebert transmet bien la fragilité de l’homme qui s’inquiète au sujet de sa
femme et de son fils (pas encore né quand il est parti pour la guerre),
Alexandre Hajek nous livre un Lieutenant Gordon tout en subtilité, Alexandre
Sylvestre trouve un rôle à la mesure de ses dons d’acteurs avec Ponchel et
Daniel Okulitch offre une belle profondeur à son Lieutenant Horstmayer.
La
mise en scène d’Eric Simonson tire parti du décor de Francis O’Connor, plateau
tournant nous permettant de passer en quelques secondes d’un camp à l’autre,
ajoutant une dimension presque cinématographique à la proposition (soutenue par
les projections jamais envahissantes d’Andrzej Goulding), mais ici,
indéniablement, c’est la musique de Puts qui joue le premier rôle. Mené de main
de maître par Michael Christie (qui a dirigé l’opéra à de nombreuses reprises,
notamment lors de la création), l’Orchestre Métropolitain fait lui aussi un
sans-faute dans la fosse.
À
voir absolument!
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