Des centaines de millions d'humains habitent sur les lignes de faille de la planète, plus ou moins conscients des dangers associés, se croyant à l'abri du déchaînement des éléments. Nous avons été témoins de nombreuses images d'horreur et de désolation au cours des dernières années et la chorégraphe néo-zélandaise Sara Brodie, qui a vécu un tremblement de terre, a choisi de provoquer une rencontre avec les 16 danseurs de la Leshan Song & Dance Troup, qui ont vécu de - très - près le séisme ayant frappé la province du Sichuan en 2008.
Certains moments de cette narration somme toute linéaire, fragmentée en tableaux complémentaires, sont particulièrement forts. Difficile d'oublier la beauté intrinsèque et la douleur brute de ces êtres qui rampent d'un côté à l'autre de la scène, enchaînés les uns les autres, qui ne peuvent s'extraire de la mouvance que grâce à l'aide de ceux ayant déjà retrouvé la « terre ferme », cette danseuse solitaire qui, après avoir attaché les autres avec un ruban jaune, les tire derrière elle ou même ces regards hallucinés jetés vers la salle, alors que des danseurs, par petits groupes, cherchent à s'échapper de la zone circonscrite. La puissance de la trame sonore de Gareth Farr et Gao Ping, heureux amalgame entre sonorités orientales et traitements symphoniques presque hollywoodiens, nous heurte aussi très souvent en plein plexus, nous menant dans des zones troubles de peurs refoulées auxquelles se juxtaposent une compassion certaine pour toutes ces victimes.
Les mouvements, qui évoquent tour à tour la danse classique, le tai chi, les arts martiaux et la danse folklorique, sont parfaitement maîtrisés, mais semblent parfois désincarnés, nous perdent un peu parfois dans les méandres de leur plastie parfaite, sauf ceux qui s'ancrent dans ce sol inclément. Un certain flou dans l'arc narratif aurait sans doute permis une compréhension plus émotive de cette oeuvre, qui aurait ainsi gagné en profondeur et en universalité. On n'avait ici pas besoin des projections en trois langues qui, certes, expliquent les phénomènes, mais distraient l’œil de ce qui se passe sur scène à ce moment-là, ou de cette simulation des consignes de sécurité. La danse ne peut-elle pas tout raconter?
Présenté jusqu'au 1er mars à la 5e Salle, dans le cadre de l'événement Spectaculairement Chine.
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