Le Festival des films du monde révèlera ses lauréats aujourd'hui, mais j'ai terminé mon édition personnelle samedi en fin d'après-midi, après avoir vu un total de 12 films en 8 jours. Alors, mes impressions de néophyte? J'ai trouvé l'atmosphère plutôt bon enfant, conviviale, les gens discutant des films vus avant ou après les représentations, entre amis mais aussi dans la file d'attente avec de parfaits inconnus, alors que les plus discrets lisent un livre ou feuillette le guide de la programmation, crayon en main. J'ai aimé cette impression de pouvoir faire un tour du monde, simplement en changeant de salle, la juxtaposition des films de fiction et des documentaires, des courts et des longs métrages. En lisant les rares comptes rendus dans les médias imprimés, j'ai bien compris qu'il semble de bon temps de vilipender l'organisation, de préférer la glamour du Festival de Toronto, de citer les bons coups de Cannes, de Venise, de Berlin. N'empêche. J'ai peut-être bénéficié de la chance du débutant, mais sur 12 films vus, il y en a un seul que j'ai considéré « inutile », une biographie romancée, ultra saccharinée, des derniers jours de Liszt, un film hongrois en plus! Pas franchement mauvais, juste trop...
Je vous propose un court retour. (En suivant les liens, vous pourrez visionner les bandes-annonces.)
Ende der Schonzeit de Franziska Schlotterer (Allemagne): une relecture féminine d'une période un peu trouble de l'histoire allemande (la fin de la Deuxième Guerre mondiale) à travers l'histoire intime - intimiste même - d'un couple de fermiers qui héberge un Juif pour des raisons tout à fait surprenantes.
La noche de enfrente de Raul Ruiz (Chili): un souffle sud-américain, une histoire qui n'a rien de linéaire, un questionnement sur la littérature et l'imaginaire, les personnages principaux y côtoyant notamment Long John Silver, Gean Giono et... Beethoven!
Das Wochenende (je vous en parlais ici)
My name is not Ali de Viola Shafik: une coproduction Égypte-Allemagne qui lève le voile sur El Hedi Ben Salem, l'amoureux de Fassbinder, rendu célèbre par le film Tous les autres s'appellent Ali. Une narration plutôt sage, mais une histoire fascinante, même si d'une grande tristesse.
Schuld sind immer die Anderen (je vous en ai parlé là)
La mer à l'aube de Volker Schlöndorff (France-Allemagne): certainement pas le plus grand film du réalisateur, mais là aussi, un regard allemand sur une page très trouble de la Deuxième Guerre mondiale, l'exécution de 150 otages français. Plusieurs scènes à donner froid dans le dos, car ne relevant pas de la fiction.
La dernière rhapsodie de Bence Gyöngyössy (Hongrie): un très vieux Liszt revient sur ses amours tumultueuses avec la belle Nina, l'une de ses élèves. Une biographie de compositeur comme on en faisait jadis, avec couleurs saturées, dégoulinante de bons sentiments, portée par une musique pas entièrement représentative.
Paisajes devorados d'Eliseo Subiela (Argentine): des étudiants en cinéma décident de tourner un documentaire sur un patient d'une institution psychiatrique qui se dit réalisateur. Un hommage au cinéma, au rôle essentiel qu'il joue, tant pour le spectateur que pour les artisans. Poétique.
Grand comme le baobab de Jeremy Teicher (Sénégal-États-Unis): Coumba et Debo sont les premières de la famille à quitter le village et à étudier dans la grande ville. Des dettes importantes étant encourues par la famille (le frère aîné s'est blessé en taillant un baobab), le père se résigne à offrir la plus jeune des deux sœurs en mariage. L'aînée réussira-t-elle à empêcher l'inévitable? Un très beau premier film, tourné avec des acteurs amateurs (rencontrés lors du tournage d'un documentaire quatre ans auparavant), qui évoque et ne juge pas. « Ne change pas ta culture. Comprends ta culture », explique d'ailleurs la mère à un moment.
Africa: The Beat de Samaki Wanne, un collectif composé de deux musiciens, un peintre et un cinéaste (Espagne-Tanzanie): une excursion passionnante dans le quotidien des Wagogo, peuple pour lequel la musique (polyphonique) joue un rôle essentiel au quotidien. De très belles images, une partition riche, un film qu'on savoure comme une œuvre musicale cohérente, en plusieurs mouvements.
Danse la danse d'Alain Deymier (Espagne): un portrait des derniers instants de Nacho Duato avec la Compañía nacional de danza de Madrid qu'il dirige depuis vingt ans. La narration fragmentée n'aide pas la clarté du propos, mais les segments dansés et les interviews avec le chorégraphe demeurent fascinants.
Schumann at Pier 2 de Christian Berger (Allemagne): une réhabilitation en règle de Schumann en tant que symphoniste. L'enthousiasme de Paavo Järvi et des musiciens de la Deutsche Kammerphilhamonie Bremen qui expliquent l'un ou l'autre passage, le montage qui permet la superposition d'instants pris en répétition, en concert et certaines exergues sur fond blanc, quatre symphonies magnifiquement rendues: une envie folle de se plonger dès la sortie dans les quatre symphonies de Schumann. Chapeau! Souhaitons que le FIFA mettra la main sur ce film, qui était présenté en première mondiale à Montréal.
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