« À Swift Current, l’hôtel où se trouve le bar Big I s’appelle Impérial. C’est une grande bâtisse au bas de la ville, dans Central Avenue. Derrière l’hôtel du côté de Railway Street, on voit, sur la voie ferrée, passer lentement les trains de marchandises aux wagons rouillés, ou on les voit attendre leur cargaison de blé ou de bétail. »
À Swift Current, la vie se vit à un rythme autre, celui des récoltes plus ou moins abondantes, des chinooks qui forcent les habitants à se cloitrer chez eux, de la saison de la chasse à laquelle il semble impossible de ne pas se plier, des diktats du calendrier scolaire, des soirs de week-end passés au bar à échanger histoires et parfois coups, des dimanches qui exigent une présence à l’église, du regard des autres qui s’immisce, toujours.
À Swift Current, certains ont leur bock attitré derrière le comptoir, d’autres se servent d’une boîte de sirop d’érable comme prétexte aux rencontres, d’autres ne font que passer, mais tous semblent posséder au creux d’eux-mêmes une certaine nostalgie, du français mal-aimé, d’une terre ancestrale jamais entièrement oubliée, d’un ailleurs dans lequel on tente de s’évader, un verre de bière, une tasse de café, un trajet en autobus ou en camion à la fois.
À Swift Current, on ressent d’abord l’impression troublante d’avoir été parachuté dans un autre lieu, une autre époque; on peine à en décortiquer les codes. En milieu de parcours, on comprend que cette accumulation de petits riens finit par ponctuer une vie. Quand on referme le livre, après une montée émotionnelle réussie (la dernière nouvelle, « Le mari de l’infirmière », se veut un voyage aussi bien dans l’imaginaire que dans le passé, dans l’art théâtral que dans la langue), on se dit qu’au fond, on aurait peut-être envie de s’y installer, le temps de panser quelques plaies, d’apprivoiser de nouveaux repères, que Vartan Hézaran nous raconte encore une histoire.
4 commentaires:
La couverture est plus qu'engageante, cela donne envie de lire ce livre;
C'est vrai que la couverture doit te parler...
Depuis quelques temps j'ai comme une envie de canadatitude.
Le Papou
Ce n'est pas une tare, n'est-ce pas? ;)
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