Quelques semaines après avoir lu Les doigts croisés de Jocelyn Lanouette (recrue d'octobre) qui, après quelques cabrioles langagières et diversions sur des voies de traverse, nous force à contempler la maladie en face (et, ce faisant, nous insuffle un remarquable souffle de vie), je me suis plongée coup sur coup dans deux ouvrages dans lesquels les auteures évoquent leur combat contre le cancer du cerveau.
Le premier, Soleil en tête, reprend certains billets du blogue de Julie Gravel-Richard, écrits il y a bientôt cinq ans (retravaillés pour les besoins de l'ouvrage). Ceux-ci nous permettent de la suivre au quotidien, lors de rounds de chimiothérapie qui laissent souvent KO, de ses recherches en ligne pour mieux comprendre sa maladie, de quelques confrontations avec des médecins. On y apprend beaucoup sur la maladie (qui n'a toujours pas malheureusement rendu les armes, Julie devant encore une fois se plier à une série de traitements); patients aussi bien qu'accompagnants y trouveront sans doute nombre de réponses à leurs questions. L'objet pourtant possède une portée universelle quand l'auteure fait le décompte de ses petits bonheurs, histoire de se (et nous) prouver que la vie n'est au fond qu'une succession de ces gestes infimes, en apparence anodins, jalons qui ponctuent nos vies de façon bien plus pertinente que ces prétendus accomplissements.
Avec Testament, son premier roman (La recrue du mois y reviendra bientôt), Vickie Gendreau propose un objet littéraire protéiforme, qui multiplie les ruptures de ton, les interlocuteurs, les genres littéraires (du journal extime/autofiction au poème en passant par certaines réflexions sur la littérature). On s'interroge parfois à savoir où se situe la (très) fine ligne entre littérature et exhibitionnisme.
« Je suis cette littérature, la littérature honteuse et pleine de regrets. J’ai les paupières cochonnées d’avoir trop souvent fermé les yeux, d’avoir eu trop souvent à le faire. »Toutefois, on suit la jeune auteure jusqu'au bout, que ce soit dans des clubs de danseuses plus ou moins mal famés, dans les chambres crades, dans les arcanes de ses souvenirs d'enfance. On sourit en décryptant les références post-modernes cinématographiques des documents transmis à son entourage, on se dit qu'avec une telle amie, fille, sœur, il doit être impossible de dormir au gaz.
« Tout est impératif maintenant dans ma vie. C’est probablement la dernière peine d’amour que je vis. Ça fait mal les dernières fois, c’est vulgaire la vie. »
Pourra-t-elle aller ailleurs avec son prochain roman, nous convaincre qu'elle possède une vraie voix? On le souhaite.
4 commentaires:
Qu'est-ce qu'une vraie voix ? N'est-on jamais, désespérément, que soi-même ? Je vais admettre ne pas avoir lu son bouquin, bien que ma blonde, récemment, l'avait entre les mains, et suggérait de le remettre entre les miennes. Le cancer est un thème qui me touche et m'effraie à la fois. Anyway, quand la mort approche comme ça, au diable le perfectionnement littéraire. On sort ce qu'on a dans les tripes, c'est tout.
J'ajouterais...
Trouvé dans une entrevue, à l'instant:
« V.G.: Je suis en rémission, mais je subis encore des traitements à raison d’une semaine de chimio par mois. »
Fiou !
En effet, l'urgence ici prime sur la littérature. Souhaitons néanmoins que les « miracles » de la médecine nous permettent de lire un 2e ouvrage de Vickie Gendreau.
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