La dernière production de la compagnie Joe Jack et John qui privilégie un théâtre inclusif, rassembleur, se veut une réflexion sur la colère. Jusqu'où peut-on accepter d'être brimé, accepter la rebuffade, avant que le tigre en nous explose? Quand peut-on enfin dire que notre voix est écoutée, que nous sommes membres à part entière d'une société?
Qui de mieux pour transmettre ce propos que trois acteurs atypiques? Michael Nimbley (qui a participé au spectacle précédent de la compagnie) a une déficience intellectuelle, mais celle-ci ne l'empêche pas, à 57 ans, de transcender les limites qu'on lui impose en devenant plus grand que nature. Qu'il câline sa poule ou se mette volontairement en attente (sur téléphone fixe et cellulaire à la fois) dans l'espoir de parler à quelqu'un, contemple Jackie qui fait des cupcakes ou danse le hula hoop, il demeure à la fois étrangement ancré dans la réalité et en marge de celle-ci. Anthony Dolbec, qui souffre du syndrome d'Asperger, offre quant à lui un portrait du Tigre, personnage décalé de baratineur, tout à fait saisissant. La performeuse néerlandaise Jacqueline van de Geer (qui joue avec une rare conviction dans sa quatrième langue une actrice de 50 ans cherchant à percer dans le monde des publicités) devient entre les deux trait d'union, contrechant plutôt.
Présenté en parallèle de la Semaine de la déficience intellectuelle, AVALe interpelle. Oui, il est question ici de théâtre social et le projet reste des plus louables. Pourtant, grâce à une mise en scène solide de Catherine Bourgeois, le propos se veut bien au-delà de cela et c'est tant mieux. On a tous besoin, à un moment ou un autre, d'être confronté au reflet de cet autre qui nous ressemble étrangement.
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